Préface

J’ai reçu la version quasi définitive du livre de Laurent au début décembre 2019, quinze mois après la fin du Sun Trip 2018. C’est le temps de la digestion d’un événement hors norme. Le temps pour coucher sur le papier les souvenirs de l’aventure de sa vie.

Ce livre est pour moi un beau cadeau. Il est à l’image de la participation de Laurent, inattendu et réussi.

Les fans du Sun Trip y trouveront un récit au ton direct, truffé d’informations et d’anecdotes inédites. L’aventure racontée de l’intérieur, sans filtre et sans blablas. Il n’y a rien de plus vrai.

Les gens tentés par l’idée de se lancer dans le défi trouveront un grand nombre de conseils, pour se préparer et pour avancer dans l’inconnu. Nul doute que ce livre sera utile pour beaucoup, qu’il permettra de transformer des rêves en réalité.

Du vélotaf au Sun Trip résume vraiment bien l’image que j’ai de Laurent et de sa participation. Le Sun Trip est arrivé comme un OVNI dans sa vie. Et il a tout simplement saisi la balle au bond, pour aller voir ce qu’il y avait au bout du chemin, au bout de lui-même. Le Sun Trip comme alibi pour partir à l’assaut du monde. Je trouve ça parfait. Je ne pouvais pas rêver mieux.

Un matin de mi-août 2018, à l’autre bout de l’Eurasie, qui est très grande, j’avais retrouvé Laurent le jour de l’arrivée. Si certains finissent en état d’exaltation, en larmes, ou euphorisés par les événements vécus, lui est arrivé avec calme et sérénité. Il avait les idées claires, résumées en deux phrases gardées au montage du film de l’édition.

Sortir de chez moi, ça m’a changé. Le Sun Trip a changé ma vision du monde, en positif !

Il avait fait le chemin et avait hâte de retrouver les siens, certainement pour leur dire.

Merci Laurent.

Florian Bailly

Du Vélotaf

Janvier 2017

Mes vélos de vélotafeur le VTT surtout le M5 pour l’été
Mes vélos de vélotafeur, le VTT surtout, le M5 pour l’été

— Vas-y frôle-moi encore plus ! Tu veux pas m’écraser pendant que tu y es ?

Non je ne suis pas en Chine, juste à Lyon sur la RN6 sur une portion de route qui se rétrécit de deux à une voie, avant d’aborder un énième rond-point ! Il ne faudrait pas que ces braves automobilistes si pressés ne soient pas un peu contraints de réduire la vitesse sous peine de prendre le rond-point en ligne droite, n’est-il pas !

Je peux affirmer aujourd’hui que rouler à vélo à Lyon, est un bon entraînement pour rouler jusqu’en Chine. A une ou deux exceptions près qu’on verra plus tard (voir Almaty et Urumqi à la partie consacrée aux villes).

La mort est-elle à envisager lorsqu’on parcourt sept mille kilomètres par an en vélotaf par tous les temps ? La réponse est oui. Je dis toujours qu’il faudra que je me fasse écraser pour qu’il y ait un aménagement mis en place… Mais j’en doute ! J’ai déjà vu une cycliste sur Bron allongée par terre juste une minute après l’impact avec une voiture. Je ne suis vraiment pas sûr qu’elle ait survécu… Et le passage piéton n’a pas vu sa signalétique renforcée pour indiquer le passage d’une piste cyclable sur ce passage piéton partagé !

Le vélotafeur est-il un être suicidaire ou plus conscient de l’intérêt du vélo pour sa santé physique et morale au quotidien ?

Même si je n’ai pas de plaisir à aller au travail, j’ai du plaisir en allant au travail.

Le vélo, malgré le stress qu’il peut provoquer par la vigilance qu’il nécessite, apporte un bienfait physique immédiat dans l’effort. Et cette sensation de connaître la météo intimement ! Il suffit le matin que j’ouvre la fenêtre pour savoir comment m’habiller. Comme disent les gens du nord, il n’y a pas de mauvaise météo, il n’y a que de mauvais vêtements.

— Une, deux ou trois couches de vêtements aujourd’hui ?
— Short ou pantalon ?

Le nez, les yeux, les capteurs de températures de mon corps sont là pour me le dire.

Je vis mieux en me déplaçant à vélo que lorsque j’allais au travail en voiture, en scooter 125 ou même en bus. Le seul truc qui me manque, je ne peux emporter personne avec moi avec les vélos que j’utilise et le volume des courses transportable est plus limité. Mais combien de fois ai-je eu besoin de conduire quelqu’un à mon boulot en plusieurs années ? Une fois peut-être !

Le vélotafeur qui sort de la ville, la zone des cinq-sept kilomètres autour du cœur de la ville, à vue de nez, que j’appellerais la petite couronne, est vite pris pour un fou ! Voire un emmerdeur qui grille les feux et fait ralentir les automobilistes aux ronds-points, aux rétrécissements, sur les monovoies…

— On ne te voit pas lorsqu’il fait nuit, c’est trop dangereux de rouler à vélo !

Oui j’ai déjà un peu échangé à sens unique, avec mes congénères à quatre roues ! Je crois qu’il devrait être obligatoire de passer le permis vélo en même temps que le permis voiture, avec par exemple cinq cents kilomètres à parcourir à vélo en ville pour avoir son permis automobile. Ceci permettrait d’équilibrer la discussion et peut-être un plus de compréhension.

Le faible a toujours tort, même principe entre le vélo et la voiture

Un vélotafeur est plus que ridicule du point de vue des automobilistes. Parfois certains vous disent que vous êtes courageux… Il n’y a pas qu’en politique qu’on se moque des mots. Moi j’entends toujours fou à la place du mot courageux, sinon ne viendraient-ils pas faire preuve de courage à leur tour et venir grossir le flot des cyclistes ?

Il m’arrive d’avoir la rage et de taper sur le capot d’une voiture (ça n’abîme pas le véhicule mais ça fait un bruit suffisant pour faire passer le message de j’existe et je ne suis pas content) lorsque j’ai échappé de peu à un accident. Avec l’âge j’essaie d’être de plus en plus serein et de réduire ces petits gestes indélicats… mais faut pas non plus tomber sur un mauvais jour.

En dix ans, j’ai vu s’accroître le nombre de cyclistes à Lyon dans la petite couronne. Avec l’essor de l’électrique, les vélos sont maintenant accompagnés de trottinettes, mono-roues et planches à roulettes électriques. Mais en dehors de la petite couronne, très très peu d’évolution… malgré le prix du carburant qui à mon humble avis n’est toujours pas assez élevé pour dissuader d’utiliser sa voiture pour la voituretaf.

Serais-je pris plus au sérieux, si au lieu de faire sept mille kilomètres par an pour aller de la maison au travail, je parcourais cette distance pour aller en Chine ?

La réponse est oui et c’est étrange ! Je dois avouer toutefois qu’autant de kilomètres en ligne droite (en suivant la courbe de la Terre) plutôt qu’en tournant en rond dans son microcosme reste une petite aventure personnelle assez enrichissante en découverte humaine et géographique. De quoi écrire quelques pages de mémoire de ce doux rêve qu’est le parcours de Lyon à Canton à vélo solaire.

Sans cette préparation de vélotafeur Lyonnais depuis plusieurs années, ma petite aventure Lyon-Canton n’aurait certainement pas pu se faire, faute d’entraînement physique suffisant et faute d’expérience suffisante à supporter les bords de route fréquentés par les camions, bus et autres véhicules à quatre roues ou plus.

Le vélotaf quotidien sert d’entraînement de base pour survivre sur les routes fréquentées et savoir se couvrir par tous les temps.

A croire que je m’étais préparé pour ce doux rêve du voyage à vélo solaire… sans le savoir.

Mais encore fallait-il connaître l’existence de The Sun Trip Lyon-Canton

Logo de The Sun Trip
Logo de The Sun Trip

Au Sun Trip

Mars 2017

— Mais c’est quoi cette organisation The Sun Trip ?

Le Sun Trip, quèsaquo ?

Une partie des organisateurs du Sun Trip 2018
Une partie des organisateurs du Sun Trip 2018

Le Sun Trip c’est avant tout une idée germée dans l’esprit de Florian Bailly lors d’un périple qu’il a fait en solitaire jusqu’au Japon. Il a su rallier du monde à son idée d’organiser un voyage collectif en solitaire… En s’inspirant de ce qui existe à la voile.

J’en profite pour vous montrer une partie de la fine équipe d’organisation du Sun Trip 2018. Florian Bailly, Angélique Galvaing, Guillaume Devot, Cédric Vinatier, Anick-Marie Bouchard, Olivier Reginensi

Mais avant d’en arriver à cette photo, je me souviens être tombé sur le site The Sun Trip un jour de mars 2017, je ne sais plus dire par quel hasard mais ce qui me reste c’est le choc que cela m’a produit. Un frisson dans le corps. Un rêve accessible où je pourrais postuler ?

— Un vélo solaire comme véhicule ?
— Ça existe et certains ont déjà réalisé un grand périple avec ?
— Incroyable !

Départ de Lyon et ce depuis 2013. Un grand périple tous les deux ou trois ans et je n’étais même pas au courant ! Moi qui croyais qu’avec Twitter et Facebook on ne ratait plus rien !

Après la surprise et un moment de réflexion, j’ai vu là un moyen d’aller plus loin, plus vite avec un vélo boosté à l’énergie électrique. Il était annoncé le départ d’une course pour 2018, départ de Lyon, arrivée en Chine dans une ville que je n’avais pas encore bien noté.

La Chine où je n’imaginais pas aller un jour. Et passer par le Kazakhstan… je ne savais même pas que le pays existait ! J’ai senti des fourmillements de plaisir à imaginer m’inscrire, à construire un vélo solaire, à partir une nouvelle fois en bivouac après trente-cinq ans sans l’avoir refait depuis mon petit périple Paris-Hollande-Paris qui avait duré un mois d’été alors que j’étais jeune et insouciant. Et partir à cinquante-trois ans on ne peut pas dire que ce soit énorme aujourd’hui mais ce n’est plus vraiment être jeune.

J’ai rapidement pensé aux trucs pas très clairs voire idiots ! Pourquoi utiliser des panneaux solaires pour recharger une batterie électrique ? Le poids des panneaux et du matériel nécessaire pour porter et faire fonctionner les panneaux n’allait-il pas être contre-productif par rapport à juste un vélo électrique qu’on rechargerait au fur et à mesure du trajet sur des prises de courant ? Faut-il vraiment passer par des zones désertiques pour justifier l’utilisation d’un véhicule autonome, comme si on était dans une période de fin du monde où l’usage de l’électricité ne serait plus assuré ? Ou bien si le poids n’est pas trop en défaveur, quel impact la météo va avoir sur la recharge ? Quelle conséquence sur la maniabilité du vélo à deux ou trois roues si on emporte deux à quatre panneaux photovoltaïques ? Comment réparer en cas de panne ?

Comme déjà deux éditions avaient eu lieu, en 2013 puis 2015 avec plusieurs dizaines de participants, que certains revenaient pour la troisième fois en 2018 et qu’un professeur d’IUT avait gagné l’épreuve de 2015, je me suis dit qu’il y avait peut-être moyen que l’avantage de la recharge en roulant compense le surpoids et qu’il n’y avait qu’un moyen de le savoir… essayer.

Ma curiosité n’était pas suffisante pour expliquer mon envie d’essayer. J’avais également envie de sortir de ma zone de confort et ma routine vélotaf - boulot - dodo. Même si j’aime la plupart du temps ces trois choses dans ma vie, la répétition d’un travail effectué depuis 25 ans dans la même entreprise m’incitait à prendre un peu l’air avant d’être trop vieux ou fragile. Et quelques mots clés dans ce voyage étaient là pour renforcer ma décision de tenter l’inscription.

Le photovoltaïque d’abord, auquel je crois, puisqu’en 2007, dix ans plus tôt, j’ai fait installer une toiture solaire pour produire de l’électricité sans avoir rien d’autre à faire qu’à vérifier le tableau électrique après un orage et relever les compteurs une fois par mois voire une fois par an pour demander le paiement de ma production.

Le vélo ensuite, que j’ai toujours apprécié. Le vélo a été mon premier véhicule (après la poussette). L’autonomie et la liberté de faire le tour de mon quartier en agrandissant le tour au fur et à mesure… et je n’avais pas encore 10 ans. Le vélo utilisé pendant mon adolescence, pour aller à l’école, pour rencontrer les membres de ma famille, pour faire quelques balades en solitaire ou en groupe. Puis adulte, le côté utile du vélo que j’utilise pour aller au travail et qui me sert de véhicule principal, avec quasiment 7 000 km par an. Le terme du moment est vélotaf lorsqu’on l’utilise de cette façon, probablement pour faire la distinction avec le cycliste sportif du week-end.

La Russie et autres pays russophones comme l’Ukraine et le Kazakhstan, pays à envisager pour se rendre en Chine. Cela faisait écho à mon choix fait à l’entrée en 4e au collège, de la langue russe alors que j’étais un élève plutôt médiocre. Le russe m’avait plus attiré que l’espagnol réputé plus simple pour les élèves comme moi ! Je n’ai jamais regretté ce choix, même si je suis toujours aussi médiocre en langues étrangères. Le petit groupe que nous étions, le professeur qui était bon pédagogue et le voyage en Russie qu’on avait réussi à réaliser m’avait laissé une bonne image de la langue, du pays et de ses habitants.

Restait tout de même quelques points d’inquiétude. Comment gérer la séparation pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, de ma famille que je ne quittais quasiment jamais ? Quel serait le coût de l’opération ? Comment pourrais-je m’absenter du travail sans y perdre des plumes ? Suis-je crédible pour une telle aventure ?

Dis Florian, tu me vois candidat ?

Florian et moi invité par EDF au festival Lumière de 2018
Florian et moi, invité par EDF au festival Lumière de 2018

La première étape du projet était de se faire accepter par Florian Bailly, le concepteur du Sun Trip, qui en était déjà à sa troisième organisation de voyage à vélo solaire en partance de Lyon vers l’est de l’Europe pour les deux premières éditions et pour la première fois au fin fond de l’Asie.

Comment l’aborder ? Suis-je crédible pour une telle aventure ? Alors que je n’avais pas fait de bivouac depuis trente-cinq ans, que je maîtrise très mal les langues étrangères, que j’ai du mal à demander de l’aide, ne serait-ce que pour m’aider à trouver un article dans un grand magasin, que je dors mal la nuit, que j’envisage souvent les scénarios catastrophes…

Je me fends donc d’un petit texte de présentation de ma candidature, l’écriture c’est le moyen de communication que je maîtrise le mieux, alors autant utiliser mon outil préféré, le message textuel. Un petit texte où j’annonce la couleur, je suis vélotafeur et j’ai fait du bivouac et un principal voyage à vélo en solitaire (le mot est proche de solaire n’est-il pas ?)… il y a trente-cinq ans ! Et j’ai ajouté que je travaillais chez Orange.

La réponse de Florian, ne s’est pas fait attendre.

Un grand OUI !

Trop cool sa réponse en trois mots. Première étape passée avec succès, même si je me disais que le mot Orange était peut-être pour beaucoup dans la réponse immédiate ! On verra par la suite que je ne réussirai pas à faire adhérer l’entreprise Orange à ma petite aventure, même si l’espoir m’avait aidé à préférer la couleur orange. Couleur orange pour être vu sur la route et couleur orange pour rappeler à quelle entreprise je consacre mes jours de travail depuis quasiment la moitié de ma vie. C’est pour cela que le vélo, la remorque, les cadres support des panneaux photovoltaïques, la veste, le cache-cou… étaient de couleur orange.

Par la suite, dans des moments de doutes j’aurai l’occasion encore d’échanger avec Florian.

Florian a toujours su trouver les mots justes et nécessaires pour m’encourager dans ce projet

Christel, ton avis ?

avril 2017

— Cricri d’Amour, tu me verrais partir quelques jours à vélo… pour aller en Chine ?

Christel en juin 2017
Christel en juin 2017

J’ai forcément parlé de ce projet à ma femme, un midi ou un soir, voire même un matin. Je ne m’en souviens déjà plus. C’est dire qu’il n’y a pas eu de réaction(s) immédiate(s). Il a fallu quelques explications, argumenter en faveur du Sun Trip et y aller en douceur. L’argument principal était que je pouvais faire marche arrière à n’importe quel moment, quitte à passer pour un dégonflé ou quelqu’un d’inconséquent, un rêveur de salon.

J’ai eu droit aux contres d’entrée de jeu à la lecture du règlement d’aventure.

— Quoi ? L’organisation n’est présente qu’au début et à la fin ? Ils font quoi alors ?
— Oui c’est le principe de l’aventure, tu es seul ou en équipe. L’organisation s’occupe de la promotion et de l’hébergement au départ et à l’arrivée. Un support à distance peut être donné, mais il faut prévoir son assurance rapatriement.
— Mais c’est une secte ce truc ?
— Oui et le gourou est Florian qui s’en met plein les poches et profite des fidèles. D’ailleurs regarde il y a des fidèles qui reviennent pour la deuxième ou troisième fois au départ de 2018. Mais rassures-toi on aura un week-end préparatoire et je pourrais me rendre compte du degré de sectarisme qui régit le groupe. A mon avis ce n’est pas pire que la secte du Tour de France. La question est plutôt quel degré de compétitivité il faut avoir, faut-il des sponsors pour pouvoir bénéficier d’un véhicule solaire digne de cette compétition, faut-il être jeune et en pleine forme physique ?
— Et comment tu vas gérer ton alimentation, c’est moi qui prépare tous les repas et qui fais les courses ?
— Effectivement… va falloir que tu viennes avec moi alors ! Tu es prête à faire deux cent kilomètres par jour ?
— Et comment on va vivre cette séparation ?
— Bonne question ! Tu me rejoins à Almati, avant l’entrée en Chine ? Il n’y a pas besoin d’avoir de visa, un passeport est suffisant.

Voilà le genre d’échange initial. Le fameux cycle d’acceptation en quelque sorte. Au final, ma femme a suivi et participé à toutes les phases de la préparation. Elle m’a accompagné aux différents rendez-vous importants qui ont jalonné la préparation du voyage.

Ma femme qui a su parler de mon projet à Patrick Gouttenoire, artisan soudeur, qui a été mon premier fan, et qui m’a soutenu dès l’annonce de mon inscription, sans faille tout le long du chemin.

Ma femme qui a su supporter une invitée Suntripeuse, avec qui j’avais noué des relations d’échanges pour la préparation commune au Sun Trip et qui s’est avérée un tantinet envahissante, voir impérieuse.

Ma femme qui m’a accompagné aux rencontres de professionnels au tempérament bien marqué comme Céline Trousseau de la boutique Cyclociel de Villeurbanne, de Christian Touzé, concepteur de la remorque en carbone, la CTZ 100 litres, qu’on a rencontré à Vaumeilh près de Sisteron, de Guillaume Devot de Declic-Eco, grand installateur des véhicules solaires du Sun Trip, qu’on a rencontré à Saint Mitre les Remparts.

Ma femme avec qui on a testé le partage d’hébergement entre cyclistes à l’aide de l’organisation Warmshowers.

Et le voyage en Italie, près de Turin, à la rencontre de Solbian pour l’équipement en panneaux solaires.

Je me suis même fendu d’une vidéo en anglais pour expliquer mon besoin à Tom Nostrant, créateur de la Click-Stand, la canne télescopique qu’on utilise en complément ou remplacement de la béquille d’origine qui est souvent trop petite et trop légère pour supporter un vélo solaire.

Bref, même si ma femme préfère de loin des véhicules à quatre roues motrices, qu’elle a le permis de conduire bus, elle a su me laisser vivre cette aventure qui allait un peu chambouler notre quotidien.

Et nos trois enfants : Sylvain, Lucie et Aurélie ont suivi l’exemple de leur maman et les aventures solaires de près. J’ai été soutenu par ma famille du début à la fin. J’ai eu des moments de doutes pendant le parcours et j’ai pu les appeler au téléphone et j’ai toujours été encouragé.

Maintenant que le voyage est bien passé, Christel, tu en penses quoi de l’aventure Sun Trip ?

— Je suis fière de toi mon Chéri !

Orange, collègues, je pars ?

Lyon Tour Part-Dieu mes collègues testent Silky One
Lyon, Tour Part-Dieu, mes collègues testent Silky One

Je suis informaticien chez Orange, je passe mes journées à coder des applications informatiques de gestion en back, front ou mobile comme on dit en ce moment. On travaille sur un plateau et la vie de chacun transpire un peu sur chacun. Si en plus on aime bien parler de soi, alors vos collègues suivent un peu votre vie. C’est ainsi que mes collègues ont vite été au courant de mon inscription puis de ma préparation au Sun Trip.

Mais il fallait avant tout prévenir ma hiérarchie et les ressources humaines du besoin de m’absenter trois mois consécutifs de mi-juin à mi-septembre. Pouvais-je m’absenter du travail pendant trois mois sans y perdre de plumes ? La réponse dans une grande entreprise comme Orange est plutôt oui. S’absenter trois mois est assez facile si vous n’êtes pas indispensable, reste à le prévoir suffisamment à l’avance pour prévenir le ou les managers hiérarchiques, la direction des ressources humaines dont vous dépendez.

Comment pouvoir poser environ soixante jours de congés ? Plusieurs possibilités, soit avoir mis de côté des jours de congés non consommés les années précédentes sur un compte épargne temps si votre entreprise le permet, soit déposer un congé sans solde.

Avec un congé sans solde on y perd des plumes financières. Pour ma part j’avais prévu un truc, un voyage avec ma femme, une aventure quelconque avant d’être trop vieux… depuis deux ou trois ans. En ajoutant les congés de l’année en cours en 2018 et les congés de mon compte épargne temps, j’ai pu déposer les trois mois nécessaires pour le voyage et quelques jours en plus pour amortir le retour au travail et passer un moment en famille après la longue séparation.

L’organisation du Sun Trip prévoyait cent jours maximum pour rejoindre la ville finale en Chine, sous peine de ne pas pouvoir rapatrier le vélo. L’aventure est un aller simple, le retour de notre corps se fait à notre convenance et notre charge, seul le vélo est pris en charge par un retour en conteneur sur le train des nouvelles routes de la soie. Je voulais à tout prix être en deçà de cette limite max des cent jours. J’ai regardé le score obtenu par le premier arrivé à Astana en 2013, Raf Van Hulle, qui était également arrivé deuxième en 2015. Je m’étais dit que vu le niveau sportif du vainqueur, bien plus entraîné que moi, et vu l’évolution des panneaux solaires et des batteries, je pouvais envisager d’être au niveau de 2013, soit deux cent kilomètres par jour en moyenne. Sur une prévision de parcours de 12 000 km et cinq jours de surplus pour aléas casse, douane, intempéries, maladie… Je prévoyais ainsi soixante-cinq jours, ce qui me laissait du temps pour récupérer et retrouver la famille avant de repartir au boulot. Étrangement c’est exactement le nombre de jours que je mettrais pour atteindre Canton.

Pour ne pas y perdre de plumes au niveau retour au travail, dans le service qu’on quitte momentanément, en théorie il ne faut pas dépasser trois mois, sinon on pourrait très bien vous proposer un autre service. Et au bout d’un an d’absence c’est carrément plus contraignant en théorie, puisque qu’on pourrait vous proposer un autre poste sur la zone géographique. En pratique, le service informatique dans lequel je travaille n’aurait pas posé de problème. Mon manager de proximité, mon n+2 et n+3 une fois mis au courant de mon projet un peu fou m’ont accordé sans difficulté l’autorisation d’absence… à condition de finir les différents travaux en cours avant le départ et de passer les informations pour la maintenance des rares applications dont j’avais la charge non partagée. Un des avantages de travailler en équipe sur un développement informatique et de partager les informations est cette possibilité de prendre du repos sans compromettre la bonne marche du projet.

J’ai perdu un peu de plumes de tranquillité au fur et à mesure qu’approchait la date du départ. Je devais finir trois applications, une que je maintenais seul, développée en front AngularJs et backend Nodejs, une deuxième en backend Java et mobile Android et iOS qui devait évoluer au niveau infrastructure pour suivre les évolutions de sécurité autour des échanges https. Et une troisième, une nouvelle application mobile avec backend Java et Php, qu’on développait à quatre. Une nouvelle application mobile, à destination de nos clients en boutique, qui devait être livrée rapidement pour participer à un concours interne, la Prime Zone Cup… Ce fut un peu stressant, des journées un peu longues mais au final le timing a été respecté. Et j’ai eu la grande surprise, de recevoir un SMS sur mon vélo pendant le trajet Lyon - Guangzhou du succès de la participation au concours interne Orange. On était dans les trois premiers et on avait gagné la Prime Zone Cup 2018 ! Un cadeau individuel sous forme de voyage d’étude ou de matériel informatique d’une valeur de 3 000 € chacun ! Et c’est ainsi qu’au retour de Chine, j’ai pu demander un Mac Book Pro avec lequel j’ai en particulier, écrit ce livre.

Quelques plumes sur une éventuelle promotion ? Il n’y avait rien dans le tuyau mais dans le cas contraire il faut faire un choix, profiter de la vie dans l’entreprise ou en dehors ? Et quelques plumes sur la prime individuelle du deuxième semestre 2018, oui ce sera le cas, mais l’incidence est minime.

Il pourrait y avoir également la plume de l’ambiance au boulot des collègues qu’on abandonne pour un temps avant ou après le départ. Le relationnel au travail est quelque chose de subtil et délicat, surtout quand vous travaillez sur un plateau de vingt personnes où la vie intime est facilement partagée ou envisagée. Un rien peut vous faire passer du côté du gars qu’il faut éviter. Ce voyage a été plutôt l’occasion d’être perçu positivement. Le côté fou et remise en question a plutôt été un élément positif sur le relationnel, même si j’ai franchement saoulé mes collègues avec ma préparation. Il était rare à la cantine le midi que je n’aborde pas un élément du voyage. Au retour, le travail reprend vite et il faut savoir revenir et montrer qu’on n’a rien perdu en savoir-faire, quitte à passer plus d’heures au début pour remonter au créneau d’un nouveau projet qui nécessite de reprendre la connaissance du fonctionnel et de la technique employée.

Pendant la période de préparation, J’ai eu plus de soutien de mes collègues que je ne m’y attendais. J’ai été épaulé sur l’organisation du voyage, car autour de moi il y a des voyageurs de longue date : cyclistes, motards, marcheurs qui ont arpenté la terre bien plus que je ne le ferais jamais et dans des lieux inhabituels. Leurs conseils, les éléments factuels pour préparer le voyage et leurs encouragements m’ont été d’une aide appréciable et d’un grand secours. Il s’agit de la survie en voyage, d’abord, et de la facilité à réaliser le voyage. La préparation est importante car il faut penser du petit pansement jusqu’aux papiers d’identité. La projection mentale du voyage dans son ensemble qu’on peut se faire par les récits qu’on vous raconte, qu’on lit ou qu’on découvre sur Internet est importante pour voir ce qui manque encore à la préparation mentale et physique.

Sans mes collègues j’aurais été moins bien préparé

Coucou les amis, devinez quoi !

Ophélie Brissaud à l’élevage d’Ofée un peu avant le départ pour l’aventure
Ophélie Brissaud à l’élevage d’Ofée, un peu avant le départ pour l’aventure

août 2017… juin 2018

— Vous savez quoi, je vais partir en Chine avec d’autres folles et fous à vélo solaire !

D’abord la surprise :

— Sérieusement ?

Puis l’incrédulité :

— Mais tu pars un an ? Avec Christel ?

Personne n’a vraiment été surpris que j’entame ce voyage. Il semblait me coller comme un gant, à la vue extérieure que les ami-e-s portent sur moi.

Il est vrai que j’ai fréquenté un peu le milieu du cheval via mes enfants. Un monde qui comprend la passion.

Et c’est ainsi que j’ai reçu des encouragements de toute part et du soutien.

J’ai été surpris de l’intérêt général suscité. La culture du vélo et de l’aventure en France est plus importante que je ne le pensais

Benoit Pfister teste l’assise de Silky One lors d’une invitation avant départ
Benoit Pfister teste l’assise de Silky One lors d’une invitation avant départ

Et moi, sûr de moi ?

Juillet 2017

— Maintenant que j’ai dit à tout le monde que j’allais partir à Canton à vélo solaire… je n’ai plus le choix ou c’est la honte à vie !

J’ai envisagé le voyage sur une impulsion qui venait probablement de loin.

Raconter à tout le monde qu’on va faire le voyage c’est une façon de se persuader qu’on va le faire, cela devient concret à partir du moment où on l’enisage à voix haute et pas dans un semi-rêve le soir dans son lit.

Je passerais par des périodes de doutes sur ma capacité à mener à bien la préparation et le voyage. Mais les doutes c’est ma vie. Je doutais d’avoir un boulot stable, je doutais d’avoir une famille et d’être assez responsable, je doutais d’avoir un jour une maison…

Le doute n’empêche pas d’agir, il apporte par contre quelques nuits agitées !

Je peux écrire que j’ai fait le voyage Chamonix-Canton en soixante-cinq jours de vélo solaire… Mais parfois je doute encore de l’avoir fait, je suis obligé de regarder mes photos, et là oui cela me revient, les rencontres, les routes ! Peut-être une raison de plus d’écrire ce livre, garder une trace avant d’oublier.

Les préparatifs

S’attaquer aux préparatifs revient à gérer un mini projet. Découper en tâches et classer par ordre de priorité et de dépendances. Pour cela, j’ai l’habitude d’utiliser un Kanban que je recommande depuis des années à savoir Trello. L’outil permet d’organiser facilement des fiches de notes par thème. Un thème étant représenté par une colonne. Et chaque fiche, une note dans laquelle on peut y inscrire quantité d’informations et une ou plusieurs listes à cocher. Super pratique avec sa version web et mobile qui se synchronisent très rapidement et peut être relu même sans réseau, pratique donc pour consulter pendant son voyage.

Gérer les préparatifs comme un mini projet !

Lorsqu’on prépare un voyage-aventure tous les trente-cinq ans, forcément il faut tout redécouvrir. Je comprends mieux que certains repartent régulièrement en voyage, cela permet de reprendre où on en était et de faire mieux la fois suivante.

Les bonnes questions

— Tu passes par la Turquie ?
— Tu roules avec quoi ? Il pèse combien ton véhicule ?
— Tu emmènes des outils pour réparer ?
— Tu dors comment ?
— Tu emmènes la nourriture avec toi ?
— Il te faut des visas ? Et si tu as un accident tu fais comment ?
— Tu n’as pas peur de chopper une maladie ou de te faire mordre par un chien ?
— Tu paies comment ?
— Tu prends un forfait mobile international ou une carte SIM à chaque pays ?
— Tu es sûr d’être capable physiquement ?
— Tu tiens un blog, tu as des sponsors ?
— Tu prends un GPS, tu as une balise pour qu’on te suive ?
— Tu vas visiter un peu ?
— T’es sûr de pouvoir parler anglais partout ?
— Tu parles Chinois ?
— Franchement c’est pas possible que tu y arrives !

Le passage par Kiev

— Tu prends la route du nord ou la route du sud ?

Kiev sous la pluie le 2 juillet 2018
Kiev sous la pluie le 2 juillet 2018

Entre le parcours par le nord ou le parcours par le sud j’ai vite fait le choix.

Je ne me voyais pas passer par la Turquie, j’avais peur des tunnels mal éclairés, l’accident de 2013 ne jouant pas en faveur de ce parcours.

Et puis la route la plus rapide c’est par le nord. Lorsqu’on veut aller vite et qu’on ne part pas pour visiter l’historique route de la soie, alors on prend par le nord. Ce fut d’ailleurs le choix d’un grand nombre de Suntripeurs.

Pour rappel la Terre est un globe et la ligne droite d’un plan Google Maps n’est pas le plus court chemin. Toutefois on peut retrouver la vision du globe de la Terre avec Google Maps sur ordinateur en réalisant un long zoom arrière jusqu’à voir la planète sphérique.

Et pour commencer je vous invite à tester votre logiciel de cartographie préféré, Google Maps ou autre, et de tenter d’établir une route entre Lyon et Canon (Guangzhou si on veut être à la page).

Pas de chance, les frontières chinoises sont fermées pour Google Maps et autres maps !

Et là je ne pensais qu’au trajet en voiture, alors le parcours à vélo…

Il faut donc au minimum découper le trajet en deux parties.

Lyon-Khorgos au Kazakhstan
Lyon-Khorgos au Kazakhstan
Khorgos-Guangzhou en Chine
Khorgos-Guangzhou en Chine

Voici un élément indispensable à préparer. Vous pourrez vous faire une idée plus précise au chapitre du voyage à partir de mon parcours réel.

Il est pratique et réconfortant de préparer son parcours à l’avance avec d’éventuelles options. Mais dans le détail il est clairement impossible de prévoir à l’avance chaque étape. Est-ce qu’on va faire 100, 200, 300 km par jour, tous les jours ? Impossible de prévoir.

Le parcours dans le détail n’a jamais été finalisé. Il a fallu s’adapter pendant le voyage

Je vous invite plutôt à prévoir les principaux points de passages, villes, fleuves (ou montagne si on est fan de montage comme Michael Polak) et surtout point de passage aux frontières. Typiquement, le point de passage pour entrer en Chine à vélo a été un point en discussion un bout de temps avant de s’affirmer comme le passage à prendre, et ainsi Korghos s’est imposé. A partir de là, si on fait de même pour les passages aux frontières de l’Ukraine qui a des zones de guerre avec la Russie et de même avec le Kazakhstan, on se retrouve à des choix restreints de passage. Mais entre ces points des choix sont possibles, sauf au Kazakhstan où on se retrouve avec une route unique pour rejoindre Almaty.

Une fois qu’on a fixé ces points de passage aux frontières, il est important d’estimer une plage de dates de passage aux frontières où le visa est obligatoire. Je pense en particulier à la Russie. Et pour cela il faut estimer au mieux le nombre de km qu’on pense parcourir au minimum et au maximum par jour afin d’estimer la plage de jours où on va passer la frontière qui demande le visa tamponné à la bonne date.

Pour la Russie, si vous arrivez au poste frontière plus tôt que votre date d’entrée… il faudra attendre la fameuse date indiquée ! Et pour la sortie c’est pire encore, il faut sortir avant la date de sortie indiquée sur le visa sinon vous serez envoyé en prison en attente de votre jugement et vous ne pourrez plus revenir en Russie avant cinq ans. C’est l’expérience de Romàn Neauport qui parle, il a passé deux jours emprisonné en attente de son procès qui s’est tenu avec une professeure d’anglais, laquelle a servi de traductrice !

Pour la Russie prenez un visa de trente jours, même si quinze jours vous semblent large !

Romàn a testé pour vous le visa de quinze jours. Et il ne pourra refaire le Sun Trip qu’à partir de 2023, s’il veut traverser la Russie ! Il a écopé de cinq ans d’interdiction d’entrée en territoire russe.

La météo a été la cause du retard. Le début de parcours a surpris l’ensemble des Suntripeurs. La pluie et le froid pendant plusieurs jours d’affilés nous ont obligé à revoir à la baisse nos distances journalières et donc la date d’entrée en Russie. Et c’est ainsi qu’on peut se retrouver à la sortie de la Russie avec un jour de retard par rapport à la date de son visa. Plutôt que de vous laisser sortir en vous invitant à ne pas recommencer une telle erreur, il semblerait que la règle de vous garder quelques jours en prison soit la norme. C’est ainsi qu’avec Bernard et Yann Cauquil on a retrouvé Romàn sur la route à l’entrée du Kazakhstan alors qu’il était bien devant nous.

Pour obtenir un visa russe à Lyon, je suis passé par %5Bhttp://www.lyonvisa.com%5D(Lyon visa. Dans leurs locaux, il y a un appareil photos instantanées, une photo est nécessaire pour le visa russe, elle doit être différente de la photo du passeport, alors si vous pensiez réutiliser celle de votre passeport tout neuf, c’est raté ! J’ai d’abord pré-rempli mes informations par Internet sur le site de Lyon visa en suivant leur tutoriel puis je suis passé les voir. En vingt minutes les formalités étaient terminées et quelques semaines après je suis venu rechercher le visa.

Le parcours c’est donc des points de détails des passages de frontières, et des points à grosse maille, une liste de pays, puis une liste de villes et après on affine si on passe par la rivière qui permet d’envisager un dénivelé minimum, ou par la montage si on est fan de grimpette comme Michael Polak.

Comment préparer ses parcours GPX ? Je pourrais proposer plusieurs sites mais je pense qu’il est préférable de continuer à chercher car je n’ai trouvé aucun site qui puisse être une référence unique. Par contre en 2018 je déconseille fortement Google Maps pour vélo pour créer son parcours. A la rigueur on peut l’utiliser en version voiture, mais en version vélo c’est le meilleur moyen de se retrouver dans des passages impossibles à franchir.

La plupart d’entre nous avons utilisé OsmAnd sur un mobile Android pour afficher le parcours de la journée. Les cartes sont à télécharger à l’avance vu la taille et sont utilisables hors ligne. A noter qu’il existe une extension qui permet de voir également les dénivelés… mais attention les dénivelés ne sont pas complètement fiables et il faut vraiment zoomer pour voir les différences de dénivelés sinon on se fait vite avoir à croire qu’il n’y en a pas ! C’est John et les frères Colle qui m’ont fait découvrir cette option sur OsmAnd les derniers jours du voyage. Les prévisions sur les dénivelés de la journée sont comme les prévisions météo en France ! A prendre avec une marge d’erreur. C’est ainsi que les jeunes m’annonçaient du plat… que j’ai trouvé plutôt vallonné !

J’avais racheté un Garmin d’occasion, mais la petite taille de l’écran et le manque de liberté sur le choix des cartes hors Europe m’ont fait préférer le smartphone. Mais attention au choix du smartphone. Je me suis porté sur un Samsung Galaxy S8, je n’ai pas été déçu. Il doit être robuste et visible par forte luminosité, tenir aussi le plus possible à l’eau.

Silky One

juillet 2017

— Tu achètes où ton vélo solaire ?
— Je prends l’option mécano version grand adolescent (option C) et j’appelle mon prochain compagnon de voyage : Silky One comme The Silk Road (la route de la soie) et One comme le premier (on ne sait jamais, il pourrait y en avoir un deuxième).

Silky One - version solaire
Silky One - version solaire

En attendant que Decathlon sorte un modèle solaire, les pistes sont les suivantes.

L’option A : l’achat d’un vélo solaire d’occasion. Pourquoi pas s’il n’a pas trop souffert. Mais vu le nombre de vélos solaires l’offre est limitée.

L’option B : l’achat (ou location ?) d’une remorque Sun Travel, qui est d’abord une remorque pour le transport de son bivouac. Mais elle est la plupart du temps achetée avec des panneaux solaires posés par-dessus. La remorque peut également être équipée d’un moteur pour la propulsion du cycliste (remorque dite pousse-au-cul), de sa batterie et du dispositif de pilotage de l’ensemble. Une petite publicité en passant pour Guillaume Devot et son entreprise Déclic-Eco qui a été la référence et le pilier technique pour bon nombre de Suntripeurs de l’aventure 2018 et des précédentes. Sans lui j’en serais encore à me demander comment monter mon vélo solaire. L’avantage de la Sun Travel : on ne change pas ses habitudes de vélo, on peut garder celui dont on dispose s’il est assez résistant pour l’aventure Lyon-Canton.

L’option C : on monte son vélo solaire à partir d’éléments existants. Le champ des possibles devient plus grand. Quel type de vélo ? Remorque ou pas ? Nombre de panneaux solaires ? Quel type de moteur ? Quel type de batterie ?

L’option D : on fabrique carrément son vélo et tout ce qui va autour pour devenir un vélo solaire ! Pour l’option D je pense entre autre à Bernard Cauquil, celui que je qualifie de Géo Trouvetou, qui vous invente un nouveau vélo par mois (j’exagère à peine !).

Pour le vélo, je voulais m’inspirer justement du vélo de Bernard Cauquil, celui qu’il avait conçu pour gagner le Sun Trip 2015, même si je me doutais que le vélo n’était qu’une partie de l’équation quant à son score. Je n’avais par contre pas tout compris à ses astuces, mais j’avais gardé l’idée principale du vélo couché à deux roues avec panneaux photovoltaïques sur le toit, malgré un grand nombre de vélo à trois roues qu’on rencontre lors des Sun Trip (on dit trike dans le milieu).

Christel week-end test d’un trike
Christel week-end test d’un trike

Je disposais déjà d’un vélo couché M5 20x20 eco que je n’utilisais pas beaucoup mais que j’aimais bien pour la légèreté et l’aérodynamisme. J’ai cherché sur Lyon à tester d’autres modèles plus endurants et tant qu’à faire j’ai également testé un trike. Sur Lyon, il y a Céline Trousseau de Cyclociel, notre passionnée lyonnaise de ce type d’engins couchés. Je n’ai pas aimé mon week-end de test du trike. Céline m’a dirigé sur deux marques de vélo couché et j’ai préféré la marque Azub.

Céline de Cyclociel spécialiste vélos couchés et trikes
Céline de Cyclociel, spécialiste vélos couchés et trikes

Au départ j’étais parti sur une commande d’un 26 pouces sur les deux roues malgré l’avertissement de Céline pour une préférence à utiliser une roue avant de 20 pouces pour poser plus facilement les pieds au sol vu ma taille d’1m75 et la garde au sol assez haute de l’Azub par rapport aux autres modèles de vélos couchés.

Elle m’a appris que son contact chez Azub, Honza Galla, avait participé au Sun Trip 2013 avec son ami et collègue Karel Sebela. Ils avaient rencontré quelques difficultés, une morsure de chien entre autres et des problèmes techniques mais avaient atteint l’objectif d’Astana en 4e position. J’ai échangé des informations avec Honza qui m’a également déconseillé le 26 pouces roue avant. J’ai écouté les conseils et passé à l’Azub Six 26x20. J’aurai l’occasion de les rencontrer lors du voyage, dans leur nouvel espace atelier-boutique en République Tchèque. Ils réaliseront une superbe vidéo que j’arbore fièrement sur mon site J’me Recycle

Pour le choix de la remorque et de la motorisation, j’ai d’abord suivi les étapes du Sun Trip Tour 2017 et surtout les directs Facebook tenus par Anick Marie Bouchard. Elle a eu la bonne idée d’interroger les Suntripeurs sur leur matériel, leurs impressions… et c’est ainsi que j’ai pris la décision d’utiliser une remorque Christian Touzé et de faire appel à Déclic-Eco pour la motorisation.

En attendant la fabrication de l’Azub Six, j’ai pris contact avec Christian Touzé pour sa célèbre remorque. La remorque se ferme à clé, elle est de ce fait assez rassurante lorsqu’on doit quitter son vélo pour aller faire des courses, ou passer la nuit dans un hôtel. La fermeture est vraiment étanche. Le triangle en acier qui relie la remorque au vélo peut être ajusté au vélo en forçant doucement l’écartement.

Avec Christel on est allé lui rendre visite à Vaumeilh, près de Sisteron pour prendre livraison de la remorque.

La remorque CTZ 100 litres et son créateur Christian Touzé
La remorque CTZ 100 litres et son créateur Christian Touzé

24 novembre 2017

L’Azub Six a été livré depuis la République Tchèque chez Guillaume, à Saint Mitre les remparts pour qu’il subisse l’opération ajout moteur, batteries, Cycle Analyst, contrôleur, câblage et adaptation pour continuer à accrocher la remorque CTZ. Et quand Guillaume a donné le go, encore une fois Christel m’a accompagné pour récupérer Silky One. Il a fallu acheter en urgence un porte vélo avec rail pour fixer Silky One qui a une belle largeur et un poids non négligeable armé de son moteur et de sa batterie.

Guillaume Devot le 24 novembre 2017 récupération de Silky One électrifié
Guillaume Devot le 24 novembre 2017, récupération de Silky One électrifié

Je ne m’attendais toutefois pas à devoir trouver moi-même un coffre de rangement pour les deux batteries de 11 Ah. Après plusieurs recherches j’ai trouvé sur Aliexpress un boîtier électrique hermétique de la bonne taille. Je mettrais de la mousse entre la batterie et le boîtier et enfournerais les deux boîtiers dans une sacoche étanche Ortlieb. La sacoche sera tenue accrochée sous le siège à l’aide de deux sangles ROK straps, que je trouve vraiment pratique pour attacher et détacher rapidement.

Quelle quantité de panneaux peut-on emmener ? Le règlement indique 2,5 m2 au maximum en roulant (le double à l’arrêt si on veut déplier des panneaux). Ce qui laisse la possibilité d’avoir deux panneaux au dessus du cycliste d’un vélo droit ou couché et deux panneaux au-dessus d’une remorque.

Comme je voulais tester le solaire je suis parti sur le maximum autorisé quitte à ne pas avoir la combinaison poids/surface la plus appropriée. J’ai d’abord pensé pouvoir bénéficier du savoir-faire proche de chez moi en fabrication de panneaux solaires. Par des concours de circonstance cela ne s’est pas fait et on m’a indiqué Solbian, fabricant Italien, comme fabriquant fiable… mais cher.

Zoom sur les panneaux photovoltaïques Solbian
Zoom sur les panneaux photovoltaïques Solbian

Je m’étais tout de même gardé un peu de travail. Le raccordement des panneaux solaires. Pour cela un petit schéma est nécessaire pour mieux comprendre. Il y aura plus de travail que prévu, je n’avais pas bien anticipé lors de la commande des panneaux solaires. La sortie des fils par le haut, qui m’avait été vantée comme plus résistante, était en fait une erreur. La sortie par en dessous aurait été plus pratique. J’ai dû percer à l’intérieur des petits boîtiers noirs, couper les câbles, souder à la place des câbles souples, remettre du gel et finir avec des prises Anderson. Je me fabriquerai également deux prises multiples Anderson pour mettre en parallèle l’arrivée des panneaux.

Le schéma électrique
Le schéma électrique

Pour le cadre, ma femme a pensé qu’on pourrait demander à Patrick Gouttenoire de Saint Bonnet Mure, notre ami soudeur professionnel. Il a été emballé par l’idée et a trouvé rapidement une solution à base de tubes carrés creux en acier de petite section. Il a privilégié l’acier à l’aluminium pour être plus sûr de pouvoir réparer en cas de casse. Le soudeur acier ne manquera pas sur la route Lyon-Canton, pour l’aluminium c’est moins sûr. J’aurai l’occasion de rencontrer un soudeur en Russie pour une réparation indispensable et un autre en Chine pour une petite intervention. Effectivement on rencontre des soudeurs aciers tout le long de la route des camionneurs, car ils en ont bien besoin vu les kilomètres qu’ils parcourent.

Cadre de Silky One réalisé par Patrick Gouttenoire de PG Soudure
Cadre de Silky One réalisé par Patrick Gouttenoire de PG Soudure

Un vélo couché comme Silky One surprend encore beaucoup de personnes car il n’est pas si fréquent d’en rencontrer. C’est un Azub Six avec sa roue arrière de 26 pouces et sa roue avant de 20 pouces.

J’ai l’habitude de dire que c’est un vélo semi-couché car son assise est assez haute pour un vélo couché. Il y a des avantages et des inconvénients comme toujours.

Au rayon des avantages, je peux indiquer qu’il est plus visible sur route de part sa hauteur. Si on ajoute la couleur orange, le cadre de support des photovoltaïques et les panneaux on est encore plus visible. Lorsque je m’arrête près d’un automobiliste on peut échanger un regard à quasiment la même hauteur, tout dépend du modèle de voiture évidemment. Sur les autoroutes empruntées en Chine, je pouvais voir au-dessus de la barrière de sécurité, ce qui n’était pas le cas avec le trike de mon prédécesseur, Herman, que je n’ai jamais réussi à rattraper. L’assise est plus confortable pour mes bras qu’un vélo tout terrain ou un vélo de route qui me pose problème au bout d’une heure de route, avec Silky One je pouvais rouler huit heures avec de faibles souffrances. Le dos est porté sur toute la longueur et un repose tête permet également de se relaxer encore plus. Et la visibilité est excellente, je pouvais voir devant moi assez loin et avec les deux rétroviseurs je pouvais surveiller l’arrivée des véhicules.

Au rayon des inconvénients, le vélo est plus lourd qu’un vélo traditionnel et comme il est plus rare il est également plus cher. Lorsqu’on ajoute deux panneaux solaires et le cadre pour les supporter on déséquilibre le vélo, ce qui nécessite de prévoir une canne de support qui vient renforcer, en fait plutôt remplacer, la béquille d’origine. La béquille Click-Stand, fabriquée aux USA est la bienvenue même si parfois son côté souple était légèrement limite, une deuxième peut être envisagée. J’aurais d’ailleurs dû en prendre une deuxième car j’ai perdu la canne en Russie lorsque le cadre en acier s’était cassé sur un des deux montants et que j’avais changé de place l’attache de la canne sur le vélo. Pour le voyage il faut prévoir deux tailles de pneumatiques et de chambres à air. Je n’avais pas emmené de pneumatiques de rechange et pas assez de chambres à air. J’ai dû apprendre à trouver les magasins de vélo en Chine… ça peut prendre un peu de temps si on n’est pas du coin !

Pour les détails techniques du vélo, je vous laisse visiter l’excellent site d’Azub. Le site présente un configurateur qui permet d’enrichir le modèle de base par de nombreuses options qui rendront le vélo plus performant et également plus cher. Un compromis est à trouver entre robustesse et ses limites financières. Pour ma part j’ai changé quelques options pour disposer d’un meilleur confort d’assise, de freins à disques et de rayons plus résistants. Je suis resté classique avec des freins à câble et pas à huile, trois plateaux à l’avant et neuf pignons à l’arrière.

Silky One n’a présenté aucun problème mécanique. J’ai pu parcourir 15 000 km (12 000 du parcours + 3 000 d’entraînement) avec la même transmission. J’aurais pu réaliser un changement en neuf avant le départ ou faire un remplacement à Almaty probablement pour plus de sécurité. Il n’y a que les trois derniers jours où j’ai rencontré quelques pignons qui sautaient. Je pourrais repartir au Sun Trip 2020 avec le même vélo sans problème, il faudrait juste faire un remplacement des éléments consommables de la transmission et changer les câbles de freins et de changement de vitesse par sécurité.

L’Azub Six est un excellent vélo, et pour le Sun Trip 2020 il y aura plusieurs concurrents avec ce modèle !

J’ai toutefois eu des problèmes de pneumatiques, j’ai trop souvent crevé sur les routes des camionneurs. Les échardes métalliques issues de leurs pneus explosés entraient comme dans du beurre. Et quasiment toujours sur la roue la plus difficile à changer, celle qui porte le moteur, la roue arrière. Pendant la phase de remplacement de chambre à air, je ne chargeais pas avec le photovoltaïque et je perdais facilement une demi-heure de roulage. Lorsqu’on crève trois fois dans la journée ça fait mal aux km et au moral. Mon conseil, prévoir un pneumatique de remplacement et plusieurs chambres à air linéaires qui évitent de retirer la roue tout en changeant la chambre à air facilement. Je vous invite à rechercher linéaire sur le site Increvable.com.

Usure des pneus de camion jusqu’à l’explosion
Usure des pneus de camion jusqu’à l’explosion

Pour l’éclairage, je suis resté sur ce que j’utilise au quotidien dans mon vélotaf, des lumières clignotantes rouges pour l’arrière et lumières blanches fixes pour l’avant. Toutes avec une petite batterie qui peut tenir plusieurs heures et rechargeable en 5V. Elles étaient attachées par des scratchs ou des élastiques à Silky One. J’avais même une lumière clignotante arrière qui se manipulait par une télécommande que j’avais fixée sur le guidon. Cela me permettait de déclencher la lumière au début des tunnels sans avoir à m’arrêter. Mais il fallait bien compter les clics sur la télécommande car il manquait un indicateur du type de clignotement mis en place ou si on était revenu à l’arrêt ! Le boîtier servait également d’alarme. Pratique la nuit lorsqu’on bivouaque juste à côté… s’il n’y a pas de vent, sinon l’alarme se déclenche trop souvent et comme on est obligé de l’arrêter… elle ne sert plus à rien.

Testez bien vos lumières en soirée avant le départ. Soyez sûr qu’on vous voit bien et que vous pouvez tenir plusieurs heures. N’oubliez pas de placer des bandes réfléchissantes un peu partout sur le vélo, arrière, côtés…

Où dormir

Aude Lévy notre première rencontre Warmshowers
Aude Lévy, notre première rencontre Warmshowers

Dormir chez l’habitant qu’on a prévenu à l’avance est une option pour partager son voyage et rencontrer du monde. Par contre il nécessite de préparer le rendez-vous, passer du temps avec les personnes, ne pas arriver trop tard et faire des détours.

On peut également dormir chez l’habitant en forçant un peu l’hospitalité… pas ma tasse de thé même si avec du culot on peut apparemment beaucoup.

Ou bien dormir chez l’habitant qui vous invite, là c’est dans mes cordes, et si j’ai quelque chose à donner en échange je préfère. En général je laisse l’équivalent de ce que j’aurais dépensé dans un hôtel. Même si les personnes refusent pour cause d’hospitalité on arrive toujours à laisser de l’argent sur un coin de table, car offrir une bouteille de vin ou autre produit français ce n’est pas vraiment envisageable lorsqu’on veut rouler léger.

J’avais toutefois emmené sur les conseils de Thibaut Despoulain, un collègue de travail qui a beaucoup voyagé, une mini-carte de visite réalisée sur le site de Moo. Sur le recto, il y avait une photo de ma famille, très pratique pour montrer qu’on n’est pas un sauvage sans vie familiale, ou une photo de Silky One. Et sur le verso, mon nom et l’adresse du site web. Une centaine de cartes, si on ne distribue pas à tous les vents est suffisant et tient très peu de place. Si vous pensez être juste, prenez deux cent exemplaires.

Je vous invite à partir avec vos petites cartes de visite personnalisées. Un vrai petit souvenir de votre passage. Celles données par le Sun Trip sont bien aussi, je les utiliserai également jusqu’à épuisement, elles sont d’une taille habituelle soit deux fois plus grandes.

Mini-cartes de visite de voyage
Mini-cartes de visite de voyage

Que ce soit chez l’habitant ou en bivouac, il faudra emmener son duvet. J’avais en plus un petit oreiller gonflable que j’ai bien apprécié. Pour le matelas sous duvet j’ai pris une version matelas gonflable hyper léger. A la fin du voyage, le matelas fuyait un peu.

Pour l’extérieur, il faut prévoir une tente. J’ai pris une tente deux places sur les conseils d’un cycliste invétéré du voyage seul dans les pays russophones et au-delà qu’est Jean-Marc Bourdaret, un collègue de travail.

J’ai découvert le Vieux Campeur grâce au Sun Trip (et plein d’autres trucs aussi !)

Y’a quoi dans la remorque ?

— C’est la batterie que tu as dans la remorque ?
— Euh, non ! C’est le bivouac, pour me vêtir, dormir, réparer.

On m’a posé plusieurs fois cette question de la batterie dans la remorque. En fait, la taille a bien réduit, et la batterie (ou plutôt les deux batteries de 11 Ah chacune) sont placées sous mes fesses. Encombrement minimum mais poids maximum avec 6,6 kg. D’où l’intérêt pour le centre de gravité de les placer dessous… et pas dans la remorque.

Tout le bivouac devait tenir dans la remorque de cent litres et être le plus léger possible. Les deux sacoches Ortlieb que j’avais accrochées sur le vélo devaient servir uniquement pour l’indispensable à avoir sous la main, les papiers, les vêtements de pluie, la nourriture de la journée. Arrivé en Pologne, je renverrais par la poste une sacoche avec quelques éléments inutiles, comme les gadgets électroniques que je pensais devoir utiliser pour transformer mon mobile en ordinateur portable.

J’avais une tente deux places Huba Huba, accompagnée de son protège sol. Deux places permet de faire quelques mouvements de gymnastique, et pour rentrer toutes ses affaires. La tente peut être installée sans piquets et se monte et démonte assez rapidement après un peu de pratique. Le matelas gonflable était léger et tiendra presque jusqu’à la fin sans trop se dégonfler dans la nuit. La phase de gonflage ne prenait pas trop de temps. J’avais pris la forme affinée, j’aurais préféré une version plus large. Je dors la plupart du temps sur le côté. J’ai des os de hanche qui ressortent, avec ce modèle je ne sentais pas le sol. L’oreiller gonflable était confortable également, il avait une poche dans laquelle je pouvais glisser mon portable ou des objets que je voulais garder sous surveillance pendant les nuits où je partageais la chambre. Le duvet sera suffisant si on ne passe pas par des montagnes. Le sac à viande, je m’en servirai parfois comme sac de couchage.

Bivouac pour le couchage
Bivouac pour le couchage

La sacoche à outils, des premiers soins pour le vélo, est à avoir sous la main… En l’occurrence sous mes fesses, juste à côté des batteries. On y trouve le kit démonte pneu, une version Décathlon robuste, les rustines, l’huile pour la transmission, un chiffon, les clés Allen, la prise multiple, tournevis de différents formats, clés plates les plus utilisées sur le vélo. Pour contenir le tout, J’ai utilisé une sacoche à pharmacie en plastique transparent à fermeture éclair. Très résistante et pratique, je l’utilise encore à fin 2019.

Pour le petit cadenas, je l’ai quelques fois utilisé, mais ce n’est pas facile à mettre en place, sans se salir.

Sacoche d’outils indispensables à avoir sous la main
Sacoche d’outils indispensables, à avoir sous la main

Il y a de la mécanique vélo, il y a des câblages électriques et un peu d’électronique. De quoi emmener une grosse trousse à outils, surtout qu’on doit être le plus autonome possible.

— Je fais comment pour savoir ce qu’il faut emmener ? D’habitude je vais voir le mécanicien pour l’entretien et les réparations !

Embêtant, ça ! Le gars il veut aller au bout de la Chine et il ne sait même pas bricoler son vélo ?

Incroyable mais quasi vrai. Pour être un peu moins idiot sur la mécanique, je me suis inscrit à La P’tite Rustine de Bron, un atelier d’apprentissage à la réparation de son vélo et j’y suis passé plusieurs fois mais pas tant que ça. J’ai reçu l’aide que je désirais, Cyrielle a su m’apporter quelques notions de base. En cours de route, Bernard me montrera comment régler les freins à disque.

Les choix sont souvent contradictoires entre tout emmener au cas où et être le plus léger possible !

Pour la partie électrique, comme j’avais mis en place le câblage électrique des panneaux solaires de Silky One je m’étais auto-formé… avec les erreurs de débutant.

J’ai un peu surdimensionné les plaquettes de freins à disque mais je referai la même erreur, trop peur de manquer de frein. Par contre j’aurais dû emmener des pneus de rechange et beaucoup beaucoup plus de chambres à air ! J’ai emmené un petit voltmètre qui a servi pour vérifier les connexions des panneaux solaires. J’ai eu quelques serrages à reprendre. J’avais même emmené un petit fer à souder au cas où les câbles qui partent des panneaux se dessouderaient. Je constaterai au retour de Silky One à la maison que ce sera le cas pour un panneau. Est-ce dans le transport du retour qu’il s’est dessoudé ? Je pense que oui mais je n’en suis pas complètement persuadé.

Pendant le voyage, vérifier régulièrement vos connexions à la batterie et aux panneaux. Posez-vous la question suivante pendant la période d’entraînement : comment puis-je être sûr que toutes les batteries (si vous en avez deux en parallèle) et tous les panneaux fonctionnent bien ?

Le matériel supplémentaire dans le coffre
Le matériel supplémentaire dans le coffre

Pour les branchements électriques pour recharger son téléphone et autres petits appareils, il n’est pas nécessaire d’emporter un adaptateur chinois ou autre.

Pour les vêtements j’avais pris le plus léger possible mais tout de même en quantité suffisante en ajoutant des couches en cas de baisse de température. J’ai découvert l’existence de la laine de Mérinos en parlant autour de moi du voyage. Depuis j’en suis fan. Elle me permet de réduire considérablement mes odeurs corporelles qui suivent l’effort du pédalage. J’avais jusque-là utilisé des vêtements en coton ou nylon. Avec de tels vêtements ma femme me demandait de passer rapidement sous la douche au retour de mon aller-retour au travail. Alors qu’avec des maillots en Mérinos je peux faire le voyage plusieurs jours. J’ai dépensé sans compter (clic d’œil à Jurassic Park) pour les chaussettes, les slips, les maillots en Mérinos. Je prendrai la carte client fidèle Au Vieux Campeur. Elle sera rapidement remboursée !

La trousse à pharmacie sera élaborée à partir des cadeaux reçus. Je devrais drastiquement réduire le volume. Si j’avais écouté ma femme j’aurais pu faire soigneur pendant le voyage ! De la trousse constituée, qu’on peut voir sur la photo ci-dessous, je n’utiliserai quasiment rien. Les crèmes solaires, crème contre les frottement, les poudres contre la diarrhée et le thermomètre un jour de faiblesse. Avec ma couverture de panneaux j’aurais pu réduire le nombre de crèmes solaires. J’ai découvert pour ce voyage, la crème qu’on met aux endroits sujets à brûlure pour cause de frottement. J’ai l’impression que c’était efficace et que j’aurais dû en emmener plus, principalement pour les orteils pour réduire les frottements avec les chaussettes.

Trousse à pharmacie
Trousse à pharmacie

Vous avez dit visas ?

— Il faut beaucoup de visas pour faire le voyage ?

Le trajet par le nord, n’a nécessité qu’un passeport et deux visas. Les Français n’ont pas besoin de visa pour la Kazakhstan. Toutes les nations n’ont pas cette chance de pouvoir voyager à travers le monde aussi facilement. Je pense en particulier aux Suntripeurs marocains Youssef El Haouass et Mohamed Said Jbari.

Pour le visa russe, je suis passé par Lyon visa pour un visa de trente jours. Rappelez-vous l’anecdote de Romàn.

L’équipe de Sun Trip a fait le même travail d’intermédiaire que Lyon visa avec le visa Chinois. Et comme l’opération s’est déroulée à Lyon à deux pas du lieu de mon travail, j’ai été le premier à recevoir le sésame pour la Chine à la sortie de Florian du consulat chinois. Pour l’anecdote, le visa Chinois a été placé à la page huit du passeport. Sachant que le chiffre huit est un chiffre porte-bonheur en Chine, je ne pense pas que ce soit un hasard.

Pour les assurances, je suis parti avec celle qui accompagne la carte du Vieux Campeur plus celle prise chez mon assureur habituel.

Visa Chinois
Visa Chinois

Monnaie et CB

— Tu es parti avec de la monnaie de chaque pays ?
— Non, mais si des amis peuvent vous en fournir alors pourquoi pas.

D’abord repérer les pays où on pourra utiliser des € et la carte bancaire.

Pour la Russie, le Kazakhstan et la Chine, préparer quelques billets en monnaie locales en prenant des devises auprès de votre banque, histoire de pouvoir faire dans l’ordre que vous voulez l’acquisition de la carte SIM et le retrait d’argent au distributeur une fois arrivé dans la première ville après le passage de frontière.

Pour 2018 la ville à traverser entre le Kazakhstan et la Chine était Korghos.

J’ai pu payer en Euros mon premier soir en Ukraine, heureusement car l’établissement n’acceptait pas la carte bancaire et je n’avais pas de monnaie locale. Ne vous attendez pas à payer avec votre carte bleue les hébergements ou les restaurants en Russie, au Kazakhstan et en Chine. La monnaie sera à récupérer aux distributeurs des pays traversés. Vous pouvez également demander des devises à votre banque avant de partir et les emmener avec vous.

N’hésitez pas à doubler votre carte bancaire. Une carte Visa est préférable.

Pour la Chine, j’ai eu la mauvaise surprise de me voir avaler une carte bancaire, et pas pour cause de fausse manipulation. L’histoire s’est bien terminée mais j’ai perdu quelques heures. J’étais rassuré de savoir compter sur une autre carte bancaire au cas où.

Pour la Chine il y a une application mobile indispensable à utiliser sur place, WeChat. Cette application permet pour un Chinois de pouvoir payer quasiment partout dans le pays à l’aide d’un QRCode dont dispose chaque commerçant. J’ai tenté d’obtenir cette option, mais il faut soit un numéro de carte d’identité chinoise, soit un compte bancaire chinois. J’ai tenté via HSBC d’ouvrir un compte bancaire. HSBC France m’a renvoyé vers HSBC anglophone… j’attends toujours leur réponse. Mais si une ouverture se faisait, je pense que cela vaudrait le coup d’être libéré de passer trop souvent aux distributeurs chinois ou d’emmener un paquet de billets chinois. Surtout que le retrait ne fonctionnera pas forcément à tous les distributeurs.

Pièces et billets rapportés
Pièces et billets rapportés

La santé, les vaccins

— Tu n’es pas assez préparé pour ce type d’aventure, ton cœur risque de lâcher !
— Franchement t’as peur des petites bêtes ? Ça va être quoi avec les chiens alors ?

Effectivement la santé préoccupe également assez rapidement. Une fiche pour les vaccins à réaliser, une fiche pour les médicaments à emmener. Attention : ni trop peu, ni trop car on a vite fait d’avoir du volume et du poids. Cette dernière phrase est vraie pour tout, pour le vélo, les bagages, son corps. Comme on veut prévoir un peu tout, bobos, diarrhée, maux de tête, brûlures, produits anti-moustiques (pour la petite histoire : je n’en ai rencontré que deux dans les hôtels en Chine. C’est à mon retour à Lyon que j’ai été bouffé par des dizaines de méchants moustiques tigres en allant jardiner !).

On s’imagine douze mille kilomètres sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois. L’accident est statistiquement envisageable. Il faut prévoir une fiche assurance, c’est d’ailleurs demandé par l’organisation du Sun Trip. Une assurance qui couvre sur la distance multi-pays et sur la durée. Pour ma part j’avais utilisé l’assurance liée à ma carte nouvellement acquise au Vieux Campeur. Le Vieux Campeur où j’ai été me fournir en matériel de bivouac et de vêtements techniques… pour la première fois de ma vie, moi qui suis plutôt fidèle, j’ai été voir ailleurs que chez Décathlon. Au final je ferais un mixte entre ces deux enseignes. Et puis j’ai également voulu une deuxième assurance prise auprès de la Macif. Bien faire attention à la durée qui souvent est limitée, d’ailleurs c’est bien le problème avec les assurances, il y a toujours des limites qu’on n’espère jamais découvrir.

L’assurance rapatriement réglée, il faut également envisager l’incident qui sera probablement du voyage. Un thème réparation à ouvrir. Une fiche sur les outils à emmener. Une fiche sur les pièces de rechange à prévoir. J’ai personnellement regretté de ne pas avoir emmené un pneu avant et arrière de rechange, j’ai perdu du temps à trouver ces deux pneus en Chine. Le poids des pneus, aujourd’hui je le compenserais par le réchaud à essence que j’avais emmené et qui ne m’a pas tant servi que ça ! Même si se préparer un thé, une soupe chaude, un plat de pâtes reste assez confortable.

Ne traînez pas pour les vaccins. En début d’année c’est probablement la bonne période. On subit de plus en plus des problèmes d’approvisionnement en vaccins en France.

Je prendrais mes précautions en avançant une visite chez le dentiste (et j’ai bien fait car il y avait une carie cachée en profondeur) et chez mon ophtalmologiste (la double peine du myope vieillissant qui doit avoir une correction pour voir la route et les trous d’un pneu crevé).

Test d’effort à Edouard Herriot
Test d’effort à Edouard Herriot

Entraînement physique

— Bonjour, je viens pour un bilan diététique, je voudrais me rendre en Chine à vélo
— Je vais prendre votre poids, quelques mesures et vos habitudes alimentaires et sportives

Une fois l’opération faite

— Bon à mon avis, avec vos habitudes et vos 88 kg vous ne ferez pas 5 km !
— Ah ! Je peux faire quelque chose ?
— Oui, manger beaucoup de protéines, réduire les lipides, les glucides et faire du muscle

Bon vous l’aurez compris, je ne suis pas sorti très content de l’entretien… en traversant la salle de musculation où la dame pratiquait. Et on me l’avait recommandée ! Comme quoi il y a toujours quelqu’un pour vous apprécier.

Pour le poids (88 kg porte-bonheur au moment de l’entraînement), je finirai à 77 kg à Canton et j’avais bien mangé tout le long du voyage.

— Sinon à part du vélo, tu fais quoi d’autre pour t’entraîner ?

Regardez la vidéo humoristique de Grégory Lewyllie dans laquelle il dit que son entraînement est basé sur les efforts physiques pour retaper sa maison… On comprend qu’il préfère prendre la route. Pour moi le chantier permanent bricolage à la maison n’est pas du même niveau mais tout aussi existant. En complément et pour détendre les muscles, je me rends régulièrement à la piscine communale de Saint Laurent de Mure où je ne ressors pas à moins de mille mètres parcourus.

Pour préparer le Sun Trip j’ai ajouté des sorties à vélo les week-ends pour tester mes limites et apprendre à utiliser la remorque, le vélo couché électrique puis le vélo couché électro-solaire avec remorque solaire.

Il est important de vérifier qu’on est capable de rouler le nombre d’heures suffisant pour atteindre ses objectifs de distance. Si on part sur 200 km par jour, avec l’idée d’un 20 km / heure en moyenne il faut tenir dix heures par jour sur le vélo. Si on peut rouler plus vite et plus longtemps alors on pourra battre mes soixante-cinq jours. C’est exactement ce qu’ont réalisé ceux qui sont arrivés avant moi. Pour information, c’est quarante-cinq jours pour Raf Van Hulle, soit une belle performance. Je dois avouer que j’aurais bien voulu rouler à ses côtés une journée ou deux pour sentir son rythme et sa façon d’organiser sa journée. Raf est probablement de bons conseils vu que ceux-ci ont bien servi à Herman qui est arrivé pour son premier Sun Trip en 5e position. Il avait été conseillé par Raf ! Il faut juste trouver le moyen de communiquer avec lui.

Pour l’entraînement, il faut s’aménager des journées, des week-ends ou des congés pour voir si on sait encore monter/démonter une tente dans un temps raisonnable, se lever tôt et se coucher tard. Pour ma part je savais que me lever tôt serait un problème, il l’a été tout au long du voyage. Partir à sept heures dès l’ouverture de l’horaire officiel a été une vraie difficulté pour moi, informaticien qui a plutôt l’habitude de commencer à peine à se lever à sept heures. Et le soir de cogitation entraîne parfois le sommeil à prendre son temps à s’épanouir et c’est souvent au petit matin qu’on a envie d’en profiter… Je pense que le Sun Trip est plutôt fait pour les lèves-tôt qui peuvent s’endormir facilement le soir venu.

Pour l’entraînement j’ajouterais la préparation mentale à la zénitude et la souplesse. Je n’étais pas vraiment zen et souple sur ce voyage. La zénitude il en faut pour gérer la séparation, la solitude. Je crois avoir réussi à être zen les deux dernières semaines du voyage. Avant ça, c’est surtout l’arrivée du soir où mon côté zen du pédalage de la journée s’effritait. Je me posais trop de questions du genre où vais-je dormir, quel sera mon trajet du lendemain, que dois-je publier ? Le voyage en solitaire m’a fait sortir de ma zone de confort et de mes assurances habituelles de trouver une douche, une chambre, un repas chaud sans avoir d’effort à faire. Je le savais, mais entre le savoir et le vivre… il m’a fallu du temps pour m’acclimater et me rassurer. Tout au long du voyage le smartphone m’a été d’un grand secours pour rester en contact avec ma famille… que j’ai probablement un peu trop sollicitée, surtout Christel, ma femme qui n’a pas beaucoup plus dormi que moi vu que je la contactais souvent avec quelques heures de décalage… sur une tranche horaire ou d’habitude elle dort tranquillement.

Et la souplesse pour délasser son corps des tensions musculaires et des positions du vélo qui restent identiques une bonne partie de la journée. La souplesse que je me forçais à pratiquer, un peu, mais certainement pas suffisamment. Les exercices d’assouplissement c’est comme parler les langues étrangères, un truc que j’aurais toujours du mal à faire. Au retour, pas immédiatement, mais les mois suivants, je peux dire que mon corps à un peu reçu. La colonne vertébrale et la zone basse du coccyx par exemple. La position particulière de l’Azub Six, mi-assise mi-couchée m’occasionnait des douleurs vers le coccyx que j’arrivais à supporter sur une journée de 8h de vélo. Après, cela devenait plus prégnant. Si je devais refaire ce type de périple je prendrais le temps de faire un siège à ma morphologie, du sur-mesure comme l’a fait un Suntripeur.

Pour la petite histoire, j’ai voulu tester une belle montée pendant une sortie d’un week-end, le 5 et 6 mai 2018, voir mes limites. Je n’ai pas été déçu avec la montée pour rejoindre le relais du Mont du Chat, vers le Bourget du Lac. J’aurais dû m’alerter du pourquoi le moteur s’arrêtait à certains moments. Si j’avais posé la question à Guillaume les jours suivants, je n’aurais probablement pas été mordu pendant le prologue ! Bref, une journée qui n’en finit pas et le retour qui va me faire rentrer à la nuit. Comme j’avais déjà roulé la nuit, je ne voyais pas l’intérêt de refaire une séance. J’ai appelé mon Uber familial pour transporter Silky One et moi. Mais comment transporter un si grand attelage ? Pourquoi pas une remorque à cheval alors. Oui mais un van deux places alors ! J’ai pu tester les virages et les dos d’âne depuis un van, ça secoue.

Christel et Silvain pour faire taxi van pour Silky One et moi
Christel et Silvain pour faire taxi van pour Silky One et moi

Le week-end de préparation

10 février 2018

Le Sun Trip propose un week-end de préparation quelques mois avant le départ. C’est l’occasion de découvrir les autres folles et fous qui espèrent partager la même aventure. Ateliers techniques, aspects culturels, aspects administratifs seront déclinés en français et en anglais. Chacun choisira sa langue préférée.

Silky One était prêt et la route pour s’y rendre me donnait l’occasion d’un entraînement supplémentaire. Je n’ai pas hésité à affronter la pluie, le froid. Au retour il y aura même un moment de grêle. Dix minutes, pour me rendre compte que je n’avais rien pour couvrir les panneaux solaires… et le temps de trouver un abri la grêle s’était arrêtée.

Le temps passera trop vite.

Week-end de préparation au Sun Trip photo Sun Trip
Week-end de préparation au Sun Trip, © photo Sun Trip

Lucas

— Faire un voyage qui sort de l’ordinaire c’est parfois l’occasion d’aider une cause

Quelqu’un m’avait mis cette idée en tête. Pourquoi ne pas faire profiter des regards qui se tourneraient vers moi pour passer un message à destination de la cause Vaincre la Mucoviscidose avec l’https://association-gregorylemarchal.org/[association Grégory Lemarchal] (AGL)

Je me sens concerné par cette cause. Lucas fait partie de ma famille. Il vit à Saint-Chamond et se bat journellement face à cette maladie, la mucoviscidose. Une maladie autant imprononçable qu’insupportable. On espère vaincre la maladie un jour prochain afin que tous les Lucas puissent poursuivre leurs doux rêves.

Mon appel aux dons a reçu un écho. Je vous en remercie du fond du cœur.

Lucas toujours avec un grand sourire et plein de vie
Lucas toujours avec un grand sourire et plein de vie

J’me Recycle

— On va te suivre comment ?
— sur mon compte Facebook et le site du Sun Trip
— Je n’ai pas de compte Facebook, je vais rater quelque chose ?
— Mince alors, oui c’est possible !

Communiquer ou pas sur son expédition ? Telle est la question. Et si oui, doit-on communiquer avant et/ou pendant et/ou après le voyage ?

J’ai un collègue qui passe depuis plusieurs années, au moins deux mois par an à visiter le monde à vélo ou autrement. Il ne communique absolument pas, il garde tout pour lui et fait quelques photos pour sa mère. Il a été source de renseignements lors de ma préparation, mais en même temps on n’abordait pas le voyage de la même façon ni avec les mêmes moyens techniques. Moi c’était la vitesse et les routes principales avec soirées à l’hôtel et lui les parcours exotiques, les moins peuplés et les bivouacs très sauvages.

On peut très bien ne pas communiquer mais l’organisation du Sun Trip nous invite fortement à prévoir un temps de communication. C’est un moyen de toucher du monde et d’être suivi sur son trajet. Sachant qu’il n’y a pas de voiture-balai, ni d’hélicoptère et pas plus de drone à nous suivre lors du trajet quotidien, quelques photos, vidéos, petites phrases sur Twitter, Facebook ou Instagram sont les bienvenues.

J’ai l’habitude de dire que mes objectifs c’étaient un tiers course, un tiers rencontre, un tiers communication

Pour ma part, j’avais envie de partager. La question était plutôt quoi, comment et jusqu’où aller.

Le quoi dépend principalement du public qu’on vise et du message qu’on voudrait faire passer. J’avais envie de partager avec tous ceux qui pouvaient être intéressés par un vélo solaire et une expédition vers la Chine avec un tel vélo. Et pendant le voyage montrer mes réussites, mes galères et mes rencontres.

Pour le comment je me suis inspiré de ce qu’avait fait Bernard Cauquil qui sera mon fil conducteur tant sur le vélo que sur la communication et j’ai contacté Jacky Demirdjian, un oncle de la famille. Son grand plaisir est d’écrire en tant que journaliste sur les évènements sportifs autour de Saint-Étienne. Il m’a mis en relation pour bénéficier d’un article dans le Progrès et d’un petit reportage sur France 3, la célébrité pour moi !

Et j’ai créé l’association J’me Recycle le 1er août 2017 et un compte en relation sur Facebook, Twitter et Instagram (pour ces deux derniers c’était plus au cas où j’en aurais besoin). Le site web, hébergé chez O.V.H., demande une montée en apprentissage pour utiliser l’outil Wordpress. Plus de temps qu’avec la publication d’un article sur Facebook. Je pense qu’avoir un site, cela permet d’être vu du monde entier (en théorie), car nombre de gens n’ont pas de compte sur Facebook. Et puis il faut savoir que si par hasard un Chinois tente de suivre votre aventure, il ne pourra pas aller sur Facebook, Twitter ou Instagram, c’est juste interdit pour lui.

Pour communiquer en Chine comme on le fait dans le reste du monde avec Facebook, il faut utiliser l’application WeChat

Pour le logo j’ai demandé à mon collègue, Alexandre Driss, notre designer de l’équipe. Il m’a pondu un cœur parcouru de dents de pignons et d’un vélo qui le parcours. J’adore ce logo.

J’ai un autre collègue qui m’a réalisé ce même logo avec sa petite imprimante 3D chinoise. Un beau travail de précision en multi-couleur… alors que l’imprimante ne chauffe qu’un fil à la fois.

Denis Belmont avec son impression 3D du logo J’me Recycle
Denis Belmont avec son impression 3D du logo J’me Recycle

J’ai fixé le logo sur le devant du vélo, comme un grigri. Il a tenu jusqu’à l’arrivée.

L’idéal si on veut toucher le plus de monde serait d’écrire son histoire, avec photo et vidéos au meilleur moment et le diffuser sur différents canaux de communication avec une petite traduction dans différentes langues. Au minimum votre langue maternelle pour vos amis et l’anglais pour être lu dans le monde entier (si vous êtes anglais ou écrivez en anglais vous aurez davantage de rayonnement sans avoir de traduction à faire). Si en plus la traduction pouvait être réalisée en chinois, en russe et dans toutes les langues des pays que vous allez traverser ce serait vraiment sympathique pour les autochtones à qui vous aurez donné envie de vous suivre un peu.

J’ai testé la traduction automatique, j’ai pris un abonnement supplémentaire sur le site Wordpress pour cela. Mais une traduction automatique faite par un robot… le résultat n’est toujours pas à la hauteur des attentes, j’ai demandé à ma prof de chinois et un collègue chinois de Pékin de me dire si la traduction était compréhensible et la réponse a été : on arrive à comprendre de quoi cela parle mais ce n’est pas terrible ! Et en Chine, le temps d’affichage du site hébergé en Europe était assez lent !

J’ai pu écrire quelques articles sur le site web avant et après le voyage, mais pas pendant !

Pour écrire des articles rien ne vaut un bon petit clavier et un ordinateur sur lequel on peut récupérer ses photos et vidéos et les retoucher ne serait-ce que superficiellement.

Je n’avais pas emmené d’ordinateur avec moi, c’est pour cela que je n’ai jamais écrit d’article sur le site web pendant le voyage et que j’ai utilisé Facebook et WeChat.

Je suis partagé sur la réponse à apporter si on me demande :

Un ordinateur ou pas ?

Dans les pour je peux citer : un ordinateur permettra un confort de naviguer sur Internet, écrire ses articles, retoucher ses photos et vidéos, détailler son parcours du lendemain et exporter son fichier GPX.

Dans les contre, il y a principalement le poids et l’espace occupé dans les bagages. Il faut également qu’il tienne les 12 000 km et donc soit assez solide et bien emballé.

J’avais tenté une approche intermédiaire à partir du mobile Samsung Galaxy S8. J’avais espéré utiliser un kit prévu pour relier le mobile à un téléviseur. Il suffisait d’ajouter un petit clavier et une petite souris Bluetooth pour avoir un quasi environnement bureautique de voyage. Ça n’a jamais marché. Soit parce qu’il n’y avait pas de téléviseur à l’hôtel, soit qu’il n’était pas accessible.

J’ai regretté le confort de l’ordinateur lorsque je devais rédiger un article que je voulais détailler et lorsque je voulais approfondir le trajet du lendemain.

La communication passe par l’écrit et le visuel. Pour le visuel je suis parti sur du léger, le mobile Samsung S8 qui m’a servi d’appareil photo et vidéo et une caméra Go Pro pour le suivi de la route au quotidien. J’ai principalement utilisé le Samsung pour la publication du soir. C’était beaucoup plus pratique lorsqu’on n’a que le mobile pour publier les photos et les vidéos sur Facebook et WeChat. Et WeChat car en Chine je publiais deux fois, une fois sur Facebook où je détaillais les informations et une fois sur WeChat en plus succinct pour ceux qui me suivaient en Chine.

Pour le jusqu’où aller je m’étais posé la question du drone. J’avais fait un essai avec un drone de prêt, un drone un peu trop gros en l’occurrence pour ce type de voyage. Mais j’avais peur de perdre trop de temps à prendre des vidéos et du travail de reprise de la vidéo après coup. J’avais également une petite inquiétude sur le passage de douane ou pendant des prises de vues en Chine ou en Russie. Je ne voulais pas passer pour un espion. Et j’avais tort, Jack Butler qui avait emporté un drone, a réussi à faire de belles prises de vues de panorama et de quelques cyclistes qu’il a pu rencontrer. De même l’organisation du Sun Trip a pu également réaliser quelques vidéos avec drones sur les points de rencontre, au départ, à Almati et près de Canton.

Un drone que vous savez manipuler et qui ne serait pas trop imposant est tout à fait envisageable

Pour la communication d’après voyage si vous pensez faire un montage vidéo, il vous faudra pas mal de séquences vidéos. Prévoyez de quoi stocker ce média qui occupe de plus en plus de place. Mais dans le même temps les supports de stockage prennent de moins en moins de place. J’avais prévu une petite boite de carte micro SD, ça occupe un tout petit espace et pèse très peu.

Pour la petite histoire, il y a trente-cinq ans lors de mon trajet Sucy-en-Brie - Hollande aller-retour à vélo, il n’y avait pas de téléphone portable. Je voulais communiquer tout de même sur mon trajet. J’avais une bonne amie, Muriel Mielczarek, avec qui j’ai échangé… par courrier papier via le service de la poste restante. J’anticipais de quelques jours l’endroit où je me rendrais et où elle pourrait laisser une lettre en disponibilité à la poste de la ville choisie. Incroyable mais ça marchait. A cette époque je parcourais cinquante kilomètres par jour au maximum avec un vélo ordinaire. Et trente cinq ans plus tard, on peut répondre à des dizaines de personnes en direct. Elle me suit encore, j’espère que son regard de professeure de lettres ne jugera pas trop sévèrement mes écrits d’aujourd’hui. Depuis le collège, malgré des périodes à vide, on continue à garder un certain contact. Relation plutôt rare il me semble.

Logo J’me Recycle création Alexandre Driss
Logo J’me Recycle, création Alexandre Driss

Les Sponsors

— Tu as eu Orange comme sponsor ?
— Euh, je n’ai pas su vendre le Sun Trip et Orange à part le Tour de France n’est pas très vélo. Par contre…

24 avril 2018

J’ai rendez-vous pour 9h avec le patron de Starterre, Jean-Louis Brissaud, pour un éventuel sponsoring. Je me pose la question de pourquoi moi. Je sais bien que le relationnel a joué, mais quand même. Je n’ai jamais fait d’épreuve avant, je ne serais probablement pas le premier à arriver à Canton. Jean-Louis aime bien le vélo et il est comme ça, il partage. L’entrevue se fera au pas de course… et je repartirais avec mon premier gros chèque pour l’association J’me Recycle.

La rencontre chez Starterre
La rencontre chez Starterre

Journée faste, même jour mais à 11h, j’ai rendez-vous avec le patron de C2AI, Gilles Marchand, pour un autre éventuel sponsoring. Je me pose moins de questions, je me sens presque une star (je déconne là !). Gilles me sponsorise pour des raisons personnelles et le photovoltaïque est un des nombreux aspects technologiques dont s’occupe son entreprise.

La rencontre avec C2AI
La rencontre avec C2AI

Le patron de PG Soudure, Patrick Gouttenoire en plus de me fabriquer les cadres pour supporter les panneaux et de peindre la remorque, me sponsorisera comme une grande entreprise. Fidèle depuis le premier jour, sans son aide j’en serais encore à me fabriquer un cadre !

Patrick Gouttenoire toujours en pleine action
Patrick Gouttenoire toujours en pleine action

Certains sponsors discutent directement avec l’équipe du Sun Trip. La répartition des logos sur les candidats se fait en secret mais Florian nous a dit qu’une entreprise lyonnaise va plutôt sponsoriser un Lyonnais, qu’une entreprise ambitieuse qui veut voir son logo en tête va choisir un champion…

C’est ainsi que j’ai pu porter les couleurs d’ EDF Auvergne-Rhône-Alpes et de Bel Air Camp. Comme EDF est également dans le photovoltaïque avec son entreprise Photowatt, j’ai placé le logo d’un côté de la remorque et Solbian de l’autre.

J’ai même bénéficié de sponsors hors de France !

Honza Galla, de chez Azub, en République Tchèque, qui m’a offert des options supplémentaires à Silky One.

Solbian, en Italie, qui m’a fait une ristourne importante sur l’achat des panneaux.

Tom Nostrant de Click-Stand, de l’état de Washington aux USA, qui m’a offert une canne télescopique sur mesure. Il me voyait arriver premier…

Christel fera un gros travail autour de chez nous pour faire entrer des devises en € ou en nature (biscuits, compotes…). Les commerçants, les amis l’écouteront avec attention et intérêt.

Tout le monde m’a encouragé à aller au plus loin sans mettre de pression sur l’objectif de Canton. Merci à vous toutes et tous. J’ai pensé à vous tout le long du voyage.

C’est quoi ton 06 ?

Avant toute chose, sachez que le mobile est indispensable c’est comme l’argent, le passeport, les lunettes et la santé.

Jusqu’en Chine j’avais gardé mon numéro habituel de mobile. J’avais la chance d’avoir un sponsor presque malgré lui. A partir de la Chine, j’ai pris une carte SIM locale (indispensable). Je jonglais avec la carte SIM chinoise et française, en changeant la carte car je n’avais pas le double accès, j’avais préféré l’option extension mémoire.

Ne faites pas comme moi, prenez un mobile de secours, j’ai eu quelques frayeurs lorsqu’à plusieurs reprises j’ai eu un écran noir. Parfois juste pour un bête réglage de luminosité lorsque je passais du niveau le plus bas de la nuit, au soleil du matin, je ne retrouvais plus rien sur l’écran et il fallait déplacer le curseur de la lumière au petit bonheur. Mais parfois pour cause d’humidité trop importante, la recharge électrique ne s’effectuait pas et je voyais les barrettes d’énergie fondre !

Mon mobile était et est toujours au moment où j’écris, le Galaxy Samsung S8 que j’ai pu acheter grâce aux dons reçus sur la cagnotte Leetchi.

Une petite batterie portable pour brancher son mobile pendant la nuit, surtout si on communique à fond dans sa tente le soir, n’est pas un luxe. Et au retour dans l’avion ne la placer pas dans le bagage en soute, elle risque d’être confisquée (j’ai testé pour vous).

Le mobile permet de rester en contact via les applications d’échange en deux à deux, petit groupe privé ou grande diffusion à l’aide Whatsapp, Facebook… partout sur la planète… ou presque ! En Chine il y a un blocage volontaire de nombreuses applications dont ces dernières font partie. Alors le VPN devient l’incontournable logiciel supplémentaire à ajouter… avant d’entrer en Chine, ce sera bien plus simple. Ils sont parfois payants comme celui que j’avais utilisé.

Le contact par géolocalisation est également une fonction appréciée par votre famille. Le GPS intégré à votre mobile permet de vous positionner en complément du boîtier GPS fourni par l’organisation. La géolocalisation s’inscrit sur vos photos, super pratique pour se rappeler où la photo a été prise. On peut également avec WeChat s’envoyer les coordonnées GPS du lieu où on se trouve.

Attention au format des coordonnées GPS. Le format anglo-saxon fonctionne mieux que le format français.

Lorsque je me suis rapproché de Jack, je lui demandais de m’envoyer sa position GPS via WeChat. J’ai mis du temps à comprendre pourquoi je ne trouvais pas le logement qu’il m’avait indiqué ! En fait, il avait son mobile en version anglaise et moi en version française. Le format est différent pour les coordonnées, et la transcription est incorrecte par les logiciels.

Comparaison : un lieu dans Xi’An, 34.2590616,108.6870206 (format anglais) = 34,2590616,108,6870206 (format français).

Lorsque j’ai basculé mon mobile en version langue anglaise, la géolocalisation est devenue correcte !

Pour le maintenir en position paysage ou portrait j’ai utilisé une coque Quad Lock et sa fixation vissée. J’arrivais avec l’habitude à changer la position du mobile, le décrocher et le raccrocher même si cela reste toujours un peu délicat. Une fois fixé, plus rien de bouge, même en cas de route défoncée.

En Chine, le numéro ne commencera ni par un 06, ni par un 07. J’ai le numéro encore collé sur une étiquette à l’intérieur de la coque du téléphone. Je le gardais sous la main car aux contrôles de police le numéro est systématiquement demandé. Par curiosité je vous l’indique, c’était le 18609051297.

L’endroit à Khorgos où j’ai obtenu ma carte SIM chinoise
L’endroit à Khorgos où j’ai obtenu ma carte SIM chinoise

Culture

— Tu vas visiter un peu ?
— Non en fait ! Rien de prévu, je vais plutôt faire la route des camionneurs et rouler comme un cycliste fou jusqu’à Canton. Et si je trouve des trucs sympa à voir sur la route ou autour de l’hébergement ce sera bien.

Je ne peux pas dire que je sois très cultivé, j’ai fait des études surtout techniques. J’aime lire par période, mais surtout des policiers. Les langues étrangères je ne maîtrise pas, j’ai toujours du mal avec l’anglais courant alors que je suis informaticien et confronté chaque jour à l’anglais écrit, mais spécialisé en informatique. L’histoire et la géographie on n’en parle même pas, un vernis.

J’ai tenté toutefois quelques efforts pour ce voyage. Je me suis inscrit à un cours de Chinois le samedi matin et j’ai demandé conseil de lecture à la bibliothécaire de Saint Laurent de Mure pour m’imprégner un peu par avance de la Chine.

La passion de la professeure et la bonne ambiance du groupe ne m’a pas fait devenir meilleur en langue étrangère, mais j’avais moins d’appréhension à entrer en Chine, qui me semblait plus compréhensible. Il n’y a pas que le langage qui est important, la culture, les habitudes sont autant d’informations essentielles pour aborder un pays, même si je voulais garder un esprit ouvert, un minimum d’informations me semblent indiquées pour éviter les impairs. Par exemple en Chine on n’offre pas de fleurs si on vous invite à manger, les fleurs c’est pour les deuils ! Savoir que le huit est un chiffre porte-bonheur. Il n’est pas rare d’avoir un code d’accès au Wi-Fi composé de huit chiffres huit, chaque étage d’un hôtel commence par un huit, par exemple la chambre numérotée 101 en France sera numérotée 8201 en Chine (en plus du huit il faut savoir que le niveau 1 en Chine est le rez-de-chaussée en France). Arrivé en Chine, c’était comme si je n’avais pas suivi de cours, mais cela m’avait rassuré. La prononciation de Je suis français (prononcer wo fa guoua) n’était probablement pas correcte mais suffisante apparemment, dire mon âge, cinquante-trois ans, (prononcer wou shi san niane), permettait aussi de répondre aux questions courantes d’où viens-tu, quel âge as-tu ? Les mêmes questions qu’on vous posera au Kazakhstan mais là je n’avais pas préparé et j’ai déjà oublié. Ne vous inquiétez pas on va tellement vous poser la question que vous saurez quand on vous la pose. Et l’autre question qui suit c’est où vas-tu ?.

Je vous invite sur WeChat, à écrire votre nom translittéré en chinois, à côté de votre nom en écriture latine. Pour moi cela donnait : sū qí luó lǎng - Laurent Souchet (note: j’ai retiré les caractères chinois suite à un problème de génération au format pdf par l’outillage du site LeanPub).

Mon nom translittéré en chinois me sera utile lors des rencontres et des inscriptions à l’hôtel. Avec un nom compréhensible par un Chinois, on existe plus concrètement. A noter l’inversion, nom-prénom en Chine plutôt que prénom-nom.

Des rares lectures d’imprégnations, je retiens deux romans que j’ai bien aimés : Jeux mortels à Pékin de Peter May (un thriller) et Le Lecteur de Cadavres d’Antonio Garrido. Des intrigues en Chine, rien de mieux pour se préparer !

Cours de mahjong au cours de Chinois du samedi matin
Cours de mahjong au cours de Chinois du samedi matin

J’arrive - J’arrive pas ?

J’ai organisé un petit jeu entre amis afin de voir comment on percevait la réussite de mon projet. Un simple formulaire réalisé avec Google et c’est parti.

Le concours consistait à choisir une option dans une liste de possibilités :

  • ☐ J’abandonne avant le départ

  • ☐ J’abandonne en Europe

  • ☐ J’abandonne au Kazakhstan

  • ☐ J’abandonne en Chine

  • ☐ Je termine le parcours entre 90 et 100 jours

  • ☐ Je termine le parcours entre 80 et 90 jours

  • ☐ Je termine le parcours entre 70 et 80 jours

  • ☐ Je termine le parcours entre 60 et 70 jours

  • ☐ Je termine le parcours entre 40 et 50 jours

Pour aider les joueurs dans leur choix, j’ai annoncé mon objectif de 200 km par jour. Sachant qu’il était prévu environ 12 000 km pour atteindre Canton, le calcul était assez simple 12 000 / 200 = 60 jours. J’avais précisé que je pensais ajouter cinq jours pour les temps de réparation, repos et passage de frontières. Il y en avait plus que prévu qui me voyaient terminer. Quelques-un ont pariés sur mon abandon. Vers la fin du voyage, j’ai eu un joueur qui me demandait de ralentir pour gagner le lot ! J’ai pris des petits cadeaux à l’aéroport de Canton pour les heureux gagnants.

Le Prologue

Place des Terreaux à Lyon le jour du départ Cathy et Eric
Place des Terreaux à Lyon, le jour du départ, Cathy et Eric

Le prologue pour 2018 a démarré à Lyon, place des Terreaux, le 15 juin 2018.

Hormis moi qui habite sur Lyon, les autres Suntripeurs étaient hébergés en bivouac sur la pelouse du domaine Saint Joseph à Sainte-Foy-lès-Lyon, ils arrivaient à leur rythme soit en voiture, soit à vélo.

Pour certains c’était notre première rencontre, l’occasion de rencontrer la troupe d’Albi avec qui j’avais échangé par téléphone lors de la préparation, Cathy et Didier Pozzobon en tête. Et la deuxième fois pour ceux que j’avais rencontrés lors du week-end de préparation.

Je ne me sentais pas très à l’aise, fallait-il adopter un comportement de concurrent, chacun pour soi ou au contraire tenter d’intégrer un petit groupe ?

Je dis petit groupe, car le groupe en entier - tel qu’on était en partant de Lyon - est trop impressionnant et limite dangereux avec risque de collision entre Suntripeurs.

— Et les gars on a l’impression de voir les machines volantes avec Satanas et Diabolo !
— Et ce véhicule on ne dirait pas qu’il est fait pour tourner un nouvel épisode de Mad Max ?

Oui, on m’a déjà fait cette réflexion sur l’envol de Silky One. Déjà qu’avancer c’est parfois un peu laborieux, alors voler !

Pour la petite histoire, lors de ma recherche d’informations pour le choix du vélo, j’avais demandé de l’aide à mon beau-frère qui travaille chez Safran aux USA. Un de ses collègues m’a proposé une piste pour alléger le vélo solaire. Placer un ou des mini ballons de type météo, rempli d’hélium/hydrogène entre le vélo et les panneaux. Et ajouter un système pour régler la hauteur.

Si j’avais tenté cette voie on se rapprochait du vélo volant… comme dans le film d’animation Là-Haut. J’ai décliné l’idée.

J’ai découvert en écrivant le chapitre sur les sponsors une vidéo du départ de Lyon, réalisée par l’équipe de communication de Starterre. Vous y verrez tous les vélos solaires au départ de Lyon.

Quelques étapes de chauffe

On passera cinq jours à faire de petites étapes de chauffe. Partager avec les autres Suntripeurs et faire les derniers réglages.

16 juin 2018 participants anciens ou nouveau regroupés à Chambéry
16 juin 2018, participants anciens ou nouveau, regroupés à Chambéry

L’étape à Chambéry permettra de faire une belle photo des Suntripeurs précédents, des amateurs de vélos solaires en général et de la cuvée 2018.

Lors d’un rassemblement promotionnel du côté de Chambéry, je me suis vu pris à parti par une personne sur l’aspect non écologique du vélo solaire. Un peu pris à froid et pour ne pas entrer dans des débats sans fin je lui ai répondu que pour moi ce n’était pas un critère, que j’avais pris un vélo confortable pour me faire plaisir et tenter d’aller plus loin, plus vite. Je l’ai ainsi calmé mais il m’a indiqué que le site du Suntrip mettait en avant cet aspect écologique du voyage.

Regard bienveillant — Ton Silky One est un véhicule écologique
— Oui, tu as raison. J’aime penser que si, au lieu d’aspirer (pour un aspirateur de 1000 Watts) pendant une heure dans sa maison (ou sa voiture), on mettait dans une batterie l’équivalent de cette énergie, on pourrait parcourir cent à deux cent km à vélo électrique.

Regard contrariant — Ton Silky One est un véhicule non écologique, ce n’est pas un vélo
— Oui, tu as en partie raison. Il nécessite plus d’énergie à la fabrication qu’un vélo traditionnel. Mais il reste tout de même un vélo car j’apporte mon énergie musculaire tout le temps ou presque (pour les démarrages j’aime me faire aider de l’assistance alors que je n’ai pas encore appuyé sur les pédales, cela permet de décrocher des ronds-points et des feux tricolores avec plus de sécurité).

Écologique pour les uns, pas écologique pour les autres. Je ne m’y intéressais pas trop mais la question me restait en tête. J’aurai tout loisir d’y repenser pendant le trajet. Et cela commencera par mon premier hébergement chez mes hôtes Warmshowers près de Bern chez Reto et Ursina. Le regard porté par Reto sur Silky One était bienveillant mais je voyais bien qu’il était plutôt du genre à rester le plus écologique possible. Le vélo pendant les vacances avec sa femme et ses deux très jeunes enfants continuera pour lui à se faire sans assistance électrique. Même si sa compagne semblait se poser la question sur ses expériences précédentes où grimper avec un enfant et bivouac ne semblait pas forcément une partie de plaisir.

Au final, on reproche au vélo électrique d’être polluant, plus qu’un vélo traditionnel. Oui on peut faire le tour de la terre avec un vélo traditionnel, mais on peut le faire également à cheval ou à pied et ce sera encore plus écologique probablement. Ou on peut faire le tour de la terre en voiture, en camion, en bateau, en avion. La plupart des critiqueurs ont raison mais la comparaison avec tous ces moyens de transport n’est jamais faite, pourquoi ? A mon avis, on est en période transitoire où on doit trier le vrai du faux. On sait bien que la meilleure écologie serait celle où il n’y a plus d’humanité comme dans la fameuse histoire ou une planète lointaine dit à la Terre qu’elle lui trouve mauvaise mine. Et la Terre de répondre, oui j’ai attrapé l’humanité… mais je vais mieux, j’ai éradiqué le virus.

A mon avis, la vrai question à se poser tient plus dans l’impact carbone et/ou autre qu’on est en droit de disposer dans sa vie. Avec un suivi de ses impacts, si on sait quantifier l’ensemble des activités humaines suivant un chiffrage partagé, on pourra en fonction de ses choix personnels, à loisir tout griller dans un voyage unique en avion (ou dix ou vingt je n’en sais rien), ou cent voyages à vélo solaire et mille à vélo traditionnel.

Il ne faut pas qu’on se trompe de cible. Je serais curieux d’avoir un avis du GIEC sur l’impact du Suntrip face aux enjeux humanitaires et par conséquent l’avis de Greta Thunberg… Ce serait cool qu’après avoir traversé l’Atlantique à la voile par deux fois, elle vienne participer au Suntrip.

Chamonix, la dernière étape du prologue. Chamonix sera le lieu de dernières communications avant le départ. A noter qu’on a pris le funiculaire pour réaliser quelques belles photos en hauteur avec vue sur les monts enneigés et lumineux. La photo de présentation du Sun Trip a été faite là-haut.

Partenaire particulier cherche partenaire…

J’ai fait un bout de route avec Daniel Jenni, le seul Suisse inscrit. D’un caractère fort sympathique, il nous fera à tous une bonne surprise. Son vélo qui semblait fragile et dont personne n’aurait parié qu’il irait jusqu’au bout, arrivera en soixante-dix sept jours à Canton et en mode solaire.

Cette petite étape m’a permis de voir un type de conduite différent. J’allais doucement en montée et en descente et lui à fond dans les deux cas. De même pour Eric Morel et Stéphane Bertrand qui s’éclataient à foncer en montée et descente, que je n’ai évidemment pas vus mais bien entendu raconter leur exploit le soir au lieu de rassemblement. J’étais impressionné de leur complicité. Ils finiront troisième et quatrième…

Pour mon cas, j’étais heureux d’avoir une route jusqu’à Canton sans trop de dénivelé, dès la première descente de Chamonix j’ai dû griller une plaquette de frein (J’imagine trop la chute en descente !).

Daniel lors du prologue
Daniel lors du prologue

Si j’étais si lent en montée et en descente fallait-il que j’imagine faire la route avec une ou un Suntripeur moins rapide ? Comme notre doyenne, Françoise Denel ?

Après avoir partagé un repas et tenté de partager une route en commun, j’ai vite compris que son fort caractère et son incompressible besoin de parler ne collerait pas avec moi. Elle trouvera son alter ego sur la route et sur un canal WeChat (qu’on devra quasiment leur consacrer) avec Michael Polak.

Françoise Christel Anne
Françoise, Christel, Anne

Pour la culture et les visites j’aurais dû faire la route avec le groupe composé de Cathy & Didier Pozzobon, François Médalle, Gilles Coural ou les frères Viguier. Mais ce n’était pas mon but, je voulais sans être forcément dans les premiers, avancer rapidement.

Finalement à la fin du prologue, je ne serais pas surpris d’envisager la route en solitaire dès le départ de Chamonix. Même si ma femme tentait de me persuader que partir à plusieurs ce serait mieux, je ne pouvais pas me résoudre à affronter cette épreuve autrement qu’en solitaire. On verra par la suite que je ferai un bout de route avec d’autres Suntripeurs… avec plaisir.

Le prologue est une étape importante pour s’assurer de ses motivations avant le départ et de terminer quelques derniers réglages de son engin.

Pendant le prologue ma hantise des chiens se verra confirmée, je serai mordu à l’arrêt par un malinois qui considérait que j’étais chez lui (maison sans barrière) et qui d’après les propriétaires avait eu peur de Silky One ! Malgré une morsure d’avertissement qui me laissera de petites marques, je ne porterai pas plainte après avoir revu les propriétaires dans la soirée avec l’aide de Thomas Pollet de l’organisation qui fera le chauffeur. Les excuses réelles des propriétaires étant dans ma décision. Pour la petite histoire cela s’est passé à Les Déserts, presque un clin d’œil pour la suite du voyage.

Alors forcément je n’étais pas plus rassuré que ça pour le reste du parcours. J’aurai l’occasion à plusieurs reprises jusqu’à la Chine de faire fissa en utilisant l’accélérateur pour m’en sortir. Trente-cinq à l’heure n’est pas de trop pour les distancer et pendant un bon moment !

Ceci dit, cet épisode m’aura permis de découvrir que si je m’étais arrêté c’est parce que le contrôleur avait dit stop au moteur pour cause de surchauffe ! Après un petit réglage sur le Cycle Analyst par Guillaume (augmentation de la température d’arrêt), je n’ai plus rencontré ce type d’arrêt impromptu !

Apprenez à régler votre Cycle Analyst, au moins votre valeur de température de coupure. Ce n’est pas compliqué, mais il faut l’avoir fait au moins une fois.

Pendant un dernier échange technique j’ai appris qu’il y avait risque d’endommager un élément électrique par surcharge d’arrivée de courant. Ce phénomène peut se produire lorsqu’on cumule le courant provenant des panneaux solaires par beau temps, et le freinage régénératif lors d’une belle descente. Conditions qui étaient réunies à la sortie de Chamonix ! Une minute top chrono avant le départ officiel, Guillaume, pour m’éviter ce problème, m’a changé le paramètre du Cycle Analyst pour que je sois maître de l’arrivée du courant au moment du freinage.

Ce qui voulait dire qu’au freinage je pouvais par la double manipulation, action des freins et accélération, récupérer de l’énergie de régénération. Il faut être attentif et ne pas relâcher les freins avant la manette d’accélération sinon on passe en mode accélération… en descente possiblement !

J’avoue que je ne trouve pas cela très pratique et optimum. J’aurais et je voudrais encore actuellement, un système qui sache optimiser la récupération solaire et de freinage sans que je me casse la tête et sans faire de manipulation autre que freiner !

La dernière nuit en gîte avant le départ en solitaire a été pour chacun un moment de recueillement, se poser une dernière fois la question, le voyage mérite-t-il la peine qu’on risque d’avoir ? J’ai pu échanger avec Dirk Huyghe qui revenait pour une nouvelle édition. A un moment je lui confie que je ne sais pas vraiment pourquoi je tente ce voyage, sa réponse me surprend lorsqu’il me confie à son tour qu’il ne le sait pas vraiment non plus et conclu par ce doit être la recherche de l’aventure.

Christel et Laurent un dernier baiser à Chamonix
Christel et Laurent, un dernier baiser à Chamonix

19 juin 2018

Christel viendra me faire un dernier baiser sur la place du départ. Elle passera quelques jours en camping-car avec sa sœur et son mari dans le coin de l’Europe. Je crois qu’elle s’attendait à un éventuel appel au secours de ma part.

Le prochain baiser attendra soixante-sept jours !

Un baiser tous les soixante-sept jours… c’est long l’attente !

Et il y aura une surprise à mon retour !

Le voyage

— Il n’a pas duré longtemps ton voyage !
— C’est vrai quand je compare au temps qu’il m’a fallu pour préparer le voyage. C’est la magie du vélo électro-solaire qui permet d’aller à vitesse raisonnable tout en allant assez vite.

10 juillet au Kazakhstan
10 juillet au Kazakhstan

J’aime bien présenter une vision synthétique du voyage. Une trame que je pense commune à chaque voyageur du Suntrip, sachant pertinemment qu’il y a une infinité de détails liés au hasard de la météo et des rencontres.

Nous sommes partis de l’ouest de l’Europe, d’une zone confortable où l’eau courante est accessible simplement à tous les robinets, la nourriture abondante. Pour aller vers des zones où le confort de la vie moderne se réduit au fur et à mesure. On a le temps de s’adapter, l’évolution se fait au fil des kilomètres. Le cas typique se sont les toilettes où à l’ouest de l’Europe on tire la chasse d’eau avec de l’eau potable pour passer ensuite au trou dans la cabane ou dans l’abri en béton à côté de l’arrêt de bus au Kazakhstan, puis finir dans le champ car la cabane au fond du jardin n’a même pas été construite ! On revient ensuite progressivement ou par à-coups à plus de confort pour finir dans le grand confort qu’on connaissait au départ.

La cabane au fond du jardin au Kazakhstan
La cabane au fond du jardin au Kazakhstan

Je me souviens d’hébergement du soir, où on me faisait visiter la chambre en pensant que je ne pourrais pas y passer la nuit, que le confort serait en deçà de ce que je pourrais supporter. Mais après quelques bivouacs isolés pas toujours rassurants, des douches-toilettes tout en un, de la bassine d’eau pour se laver… on devient moins difficile, surtout si le prix est raisonnable et l’accueil sympathique.

Pendant une grande partie de mon voyage, je n’ai pas été très zen quand arrivait le soir. Je me posais trop de questions sur comment dormir, quoi manger, comment bien me reposer et préparer le lendemain. Jusqu’aux deux dernières semaines où je n’avais plus cette appréhension. Je savais que je pourrais dormir n’importe où, que je trouverais toujours un endroit, un refuge devant une maison, un hôtel, un poste de police.

En journée je n’avais pas de problème, je faisais mon bout de chemin un kilomètre après l’autre ou plutôt dix kilomètres après dix kilomètres, l’œil rivé à mes instruments de navigation, mes rétroviseurs lorsqu’il y avait du trafic, la route et le paysage.

— Mais tu devais t’ennuyer au Kazakhstan ou en Chine sur des paysages identiques, des reliefs plats ?
— Non quasiment jamais ! Les moments de calmes ce sont les moments propices à la réflexion.

A chaque moment la route offre son lot de micro relief à surveiller, le souffle de chaleur ou de vent n’est pas le même, ton état d’esprit est changeant. Il est bien arrivé quelquefois de lancer ma liste de diffusion des morceaux de musique que j’avais concoctée. Mais cette liste était assez courte et je ne la mettais pas en boucle. Il y a les pauses, les photos à prendre, les selfies à faire lorsqu’on t’arrête sur la route, un peu de communication à suivre.

Franchement pas le temps de s’ennuyer. Pour preuve, un truc qui me chiffonnait avant le départ. J’avais interrogé un voyageur habitué des voyages en solitaire sur comment il vivait ses pulsions sexuelles pendant ces voyages. Comme je n’avais pas vraiment reçu une réponse compréhensible j’allais devoir découvrir ce qu’il en serait pour moi. Je pensais devoir y consacrer au moins un rouleau de Sopalin mais à ma grande surprise ce ne sera qu’une moitié de Kleenex qui sera nécessaire et plutôt sur la fin du voyage lorsque la vie ordinaire allait revenir prochainement. Je n’explique rien si ce n’est qu’il n’y avait pas tellement de place à l’ennui. Mais côté pulsions sexuelles, elles se faisaient sentir également vers la fin du voyage. Peut-être que je me serais laissé séduire par une gentille fille qui m’aurait dragué… Mais non je n’aurais pas à rougir au retour à la maison, pas de divorce à envisager, ni de nouvelle vie de couple dans un nouveau pays à l’horizon. Ce ne sera pas le cas pour tous les Suntripeurs, l’un se verra quitter par sa femme et l’autre trouvera une compagne. La roue tourne aussi en dehors du vélo.

Sur Lyon, j’avais une capacité à m’emporter auprès des automobilistes, un truc qui ne me quittera pas vraiment mais qui se réduira au cours du voyage pour s’amplifier à l’arrivée des grandes villes en Chine, avec leur lot d’automobilistes qui sont capables de vous faire des queues de poisson, de débouler sans crier gare. J’en arriverai même à retenir mes freins pour heurter en douceur l’arrière d’une voiture qui s’était brusquement mise devant moi. Il s’en est suivi une discussion assez emportée… de ma part. Désolé si j’ai laissé quelques mauvais souvenirs des cyclistes à vélo solaire à quelques endroits ! Mais la Chine c’est comme les USA, les villes s’étalent, les espaces sont grands. Je me demande comment ils faisaient avant avec le vélo.

Car effectivement et cela me désole, je n’ai pas vu beaucoup de cyclistes en Chine. Quelques cyclistes sportifs ou voyageurs et quelques rares biclous. Par contre pleins de scooters électriques principalement et de voitures. Je suis bien conscient que si on dispose de belles routes pour circuler à vélo, c’est quelles ont été financées pour faire circuler les camions et les voitures. Sans ces derniers véhicules je pense qu’il n’y aurait pas de route assez pratique pour nos vélos et qu’il faudrait plutôt revenir au cheval. Dans les grandes villes il y a des contre-allées qui sont parfois un peu encombrées mais qui ont le mérite d’exister, une voie pour les deux-roues principalement mais où les voitures peuvent circuler.

Scooter en usage fréquent en Chine photo du 11 août 2018
Scooter en usage fréquent en Chine, photo du 11 août 2018

Le parcours réel

— Tu es passé par la Turquie ?
— Tu as pris le route de la soie ?
— Non en fait comme c’était un peu une course j’ai pris au plus court, par le nord, par une nouvelle route de la soie

Pour aller plus vite, la route par le nord, cela va de soi

Si le lien fonctionne toujours, voici le parcours que j’ai emprunté. J’ai créé cette carte sur My Maps à mon retour à partir des points GPS enregistrés dans les photos que j’avais prises avec mon mobile. Ce parcours reste une bonne trame pour un début de recherche de son propre parcours et des bivouacs possibles.

Parcours avec les hébergements
Parcours avec les hébergements

Comme un enfant rivé sur sa console vidéo, j’étais rivé sur mon mobile Samsung Galaxy S8 et les deux Cycle Analyst. Sur le mobile j’ai tellement utilisé OsmAnd pour suivre le parcours GPS que l’écran est maintenant marqué des caractères du logiciel. Lorsque l’écran affiche une image claire, on voit en gris l’écran principal utilisé sur OsmAnd !

Les yeux et les oreilles toujours en surveillance. Je n’arrêtais pas de changer la valeur du potentiomètre pour régler la puissance électrique. Avec le potentiomètre on peut être très fin sur les réglages, 10 W, 20 W… Je pense avoir passé trop de temps à vouloir optimiser, en même temps cela occupe.

A mon retour j’ai opté pour la version numérique du réglage d’assistance électrique, ce qui permet d’utiliser la version solaire du Cycle Analyst et ainsi de n’avoir qu’un appareil au lieu de deux. La version numérique réduit l’envie de jongler avec le réglage fin car il fonctionne par palier, qui sont réduits en nombre. Après un petit temps d’adaptation à utiliser deux boutons + et - à la place de tourner la molette du potentiomètre, je trouve que c’est un progrès, une simplification de manipulation même si on y perd en finesse de réglage de watts.

A propos du logiciel de navigation OsmAnd, il était comme une boussole qui me rassurait, constamment allumé. J’ai vu qu’on pouvait s’en passer une partie du temps en comparant avec Romàn. Il allumait son téléphone de temps en temps pour vérifier la route. Il est vrai qu’il y a de nombreuses lignes droites et qu’il n’est pas obligatoire de suivre sa progression km par km ! Romàn avait son doudou, le mouton en peluche, moi c’était mon téléphone.

La navigation via le mobile un peu trop accro j’étais
La navigation via le mobile, un peu trop accro j’étais

A noter qu’il m’est arrivé plusieurs fois de me tromper de route après un rond-point, soit parce que le GPS avait un petit temps d’adaptation, soit que je ne lisais pas bien le plan ou les deux.

Après les ronds-points importants qui peuvent vous faire partir dans une mauvaise direction, vérifiez bien votre cap quitte à rallumer votre mobile GPS !

Je me suis mis à utiliser Baidu Maps assez rapidement pour vérifier les routes que j’avais préenregistrées sur OsmAnd. L’avantage de Baidu Maps, la qualité puisque c’est le Google Maps local. L’inconvénient c’est qu’il est tout en chinois ! Mais c’est une carte à la Google Maps et après quelques essais on arrive facilement à indiquer une ville ou les mots clés hôtel ou un magasin de vélo puis suivre une route vers un des points indiqués sur la carte. Par contre il faut pouvoir indiquer en caractères chinois, donc utiliser une application de traduction et faire un copier-coller.

Préparer avant de partir une liste de mots clés traduit en chinois (ou autres langues) et la garder sous la main. La garder au format numérique dans une fiche Trello par exemple permet de faire un copier-coller pour effectuer des recherches dans Baidu Maps.

Baidu Maps m’a aidé plusieurs fois. On peut également s’en sortir avec Google Maps mais attention a bien avoir son VPN actif. Donc en cas d’arrêt du VPN ne comptez plus sur Google Maps ! Un plan B avec Baidu Maps n’est pas dénué d’intérêt. Mais ne lui faites pas complètement confiance non plus, tout comme Google Maps il arrive que la route qu’il va indiquer soit franchement impraticable ou pas à jour.

Pour le dernier jour, tout près d’arriver à Canton, la route indiqué par nos GPS respectifs aux quatre cyclistes que nous étions, était infranchissable pour cause de travaux ! Le détour n’a pas été facile à trouver et j’ai apprécié que dans le groupe Camille ait su trouver la route détournée alors que la pluie et l’orage arrivaient.

Les chiffres du voyage en synthèse

Cycle Analyst une photo du 3 août 2018
Cycle Analyst, une photo du 3 août 2018

Plusieurs fois on m’a demandé des données synthétiques du voyage.

J’ai réalisé ce travail à partir des mesures que j’ai relevées sur le Cycle Analyst de consommation. La Databox prévue pour relever les informations, que j’ai emmené malgré tout jusqu’au bout, n’a pas fonctionné correctement (faut avouer que je n’ai pas cherché à savoir si elle fonctionnait ou pas).

Il y a des limites à ma synthèse. Par exemple lorsqu’on me demande si j’ai fait beaucoup de bivouac et combien de fois j’étais hébergé chez l’habitant. Là je ne sais pas comptabiliser à l’unité près car parfois on est en bivouac devant la maison de l’habitant, donc pas vraiment chez l’habitant mais on échange tout de même avec l’habitant sans trop envahir son intimité. Alors c’est un bivouac ou un hébergement chez l’habitant ou une autre catégorie ? J’ai compté en bivouac cette pause du soir.

Pour les données électro-solaire et km parcourus j’ai manqué de rigueur. Parfois je commençais à pédaler le lendemain matin sans avoir pris les valeurs et sans avoir remis le compteur à zéro pour la journée. Donc pour les valeurs journalières il ne faut pas être pointilleux et regarder les chiffres des moyennes comme un guide. Pour plus de précision sur la capacité à produire de l’électricité, le travail fait à partir des Databox fournies par Justin de Grin Technologies est la référence. Mais je suis assez fier de mes données qui peuvent à mon avis donner une idée. J’espère bien que vous ferez mieux, tant en km par jour qu’en production électrique journalière.

Si mes données relevées du Cycle Analyst de consommation vous intéressent télécharger le tableau Excel sur le site J’me Recycle.

Synthèse du parcours
Synthèse du parcours

Le parcours en partant de Chamonix a duré 65 jours, pour 12 650 km parcourus. Sur le site du Suntrip il est indiqué 64 jours, sous-entendu et quelques heures, d’où le beau panneau avec 64 indiqué dessus. Pour la photo cela me va bien, je suis né en 1964 alors un 64 pour rappel c’est bien. Je suis arrivé 6e à Canton, en même temps que Jack, Auguste et Camille.

Avec plus de 2 000 km parcouru pendant ma phase de préparation et le prologue du Sun Trip, la chaîne d’origine, pignons et plateaux ont tenu 15 000 km.

Un remplacement de toute la partie transmission sera nécessaire au retour à Lyon, galets de dérailleur compris.

Les dix pays traversés correspondent à la France, la Suisse, l’Allemagne, l’Autriche, la république Tchèque, la Pologne, l’Ukraine, la Russie, le Kazakhstan et la Chine. En Europe il arrive qu’on passe d’un pays à l’autre sans s’en rendre compte ! Pour les photos de frontière c’est un peu embêtant. Et puis on peut entrer sortir d’un pays pour entrer à nouveau dans le pays vu l’intrication historique des zones frontières.

Synthèse hébergement
Synthèse hébergement

En Europe, j’ai commencé par un hébergement chez l’habitant, en utilisant le réseau Warmshowers. Si on veut rencontrer des gens passionnés de vélo et passer du temps à parler de son voyage et faire des détours pour trouver l’hébergement, y’a pas mieux ! Ce n’est par contre pas idéal pour aller vite. Trop de contraintes, j’ai après ce premier soir arrêté d’envisager d’utiliser ce réseau. De même pour le réseau couchsurfing que j’avais envisagé un temps après avoir lu le livre de la Suntrotteuse rédigé par Anick-Marie Bouchard, une des premières aventurières du Sun Trip.

Hébergement en famille d’accueil Warmshowers du côté de Köniz
Hébergement en famille d’accueil Warmshowers du côté de Köniz

Même punition pour les campings en Europe, c’est pratique si on n’a pas trop de détour à faire pour le trouver ! Il est préférable de prendre un hébergement en bordure de route ou juste un peu à l’écart. J’ai fait l’erreur de débutant les premiers jours. En fait j’ai voulu gagner du temps en sous-traitant la recherche de l’hébergement à ma femme que je contactais vers les seize heures en lui indiquant dans combien de km environ je voulais trouver un bivouac. C’est ainsi que je me suis retrouvé dans des campings un peu éloignés, des AirBnB et des hôtels. Au fur et à mesure mes demandes étaient plus précises, plus chiantes également et j’ai fini par gérer de plus en plus par moi-même à partir de l’Ukraine.

Trouver un bivouac dans les champs peut être moins problématique que de trouver un logement, sauf en Europe où l’agglomération est présente partout, puis en Chine après les zones de désert. C’est un compromis et un choix à faire. Je sais que Daniel Jenni est fan des bivouacs, qu’il préfère une source d’eau en pleine nature à une douche d’hôtel.

Le bivouac sera de toute façon indispensable, il faut donc le prévoir.

Pour ma part, j’ai préféré les pauses dans les hôtels même si parfois au dort aussi mal qu’en bivouac au bord des routes. L’hôtel permet de rencontrer un minimum la civilisation locale autrement qu’à travers des vitres de camions ou voitures. La douche, laver son linge à l’évier, la prise de courant pour mon mobile et le Wi-Fi pendant mes phases de communication c’était quand même plus confortable. Et puis traverser un pays sans rien dépenser en hébergement alors qu’on a les moyens de payer c’est presque mesquin.

Il n’y aucune obligation à parcourir la Chine à moindre coût sous prétexte qu’on est à vélo… alors qu’on a un vélo de luxe.

Les hébergements chez l’habitant ce sont en fait, le premier soir le contact Warmshowers, un autre au Kazakhstan dans une petite ville où il n’y avait pas d’hôtel et le bivouac impossible. Un autre au premier soir en Chine où j’ai été accueilli par le mouvement d’une main qui m’invitait à venir dormir et manger, c’est dingue comme c’est facile de se comprendre par de simples gestes. Et à ce moment précis j’étais sur l’autoroute, la batterie quasiment à plat et je ne savais pas que j’aurais pu bivouaquer un peu plus loin après le lac. J’ai accepté l’invitation, j’ai pu partager un moment de convivialité avec ce que je pensais être des Ouïghours qui vivent au bord de l’autoroute. Ou plutôt l’autoroute est passée à côté de leur logement, je ne sais. Il faut savoir s’adapter aux conditions sanitaires, l’eau et les toilettes à la version perdue à la campagne, mais accueil chaleureux. Plus tard, j’ai été hébergé également dans les locaux de la police quand je ne trouvais pas d’hôtel. Si au nord de la Chine on se trouve en état de guerre avec un barrage routier tous les 50 km ou presque, gardez à l’esprit que les policiers sont vos amis, surtout avec le petit texte écrit en chinois que nous avait fourni Angélique. Même s’ils ne peuvent pas vous héberger, ils peuvent vous faciliter la recherche d’un toit pour la nuit.

Il a été super utile le texte en chinois, russe et anglais, de présentation du Sun Trip pour nous aider à être pris au sérieux et recevoir de l’aide.

Pour les bivouacs j’avais prévu une tente autoportante, qui ne nécessitait pas d’enfoncer des piquets pour tenir. C’est ainsi que j’ai pu bivouaquer en posant la tente sur une couche de béton, à des aires d’autoroute ou devant la maison d’une famille kazakhe ou chinoise.

Lorsque j’indique hôtel, il faut bien voir qu’il y a un énorme écart entre l’hébergement dans une petite pièce à plusieurs lits partagés et robinet unique qui sert pour la cuisine, le linge et se laver succinctement dans un restoroute et l’hôtel de luxe chinois à 45 € avec copieux petit déjeuner (je vous laisse calculer en monnaie chinoise). Donc par hôtel, il y a l’hôtel tel qu’on le pense en France et hôtel avec juste des murs et un toit, des personnes, un repas, un lit, un trou ou un champ pour les petits besoins.

Pour les hôtels en Chine, j’ai entendu dire qu’on devait aller dans les hôtels pour étrangers. En fait je pense qu’il y a un peu plus de subtilité que ça et une petite astuce à connaître.

— Tu penses à quoi quand tu parles de subtilité ?

Par subtilité je pense à la fois où je me suis retrouvé dans un restoroute où la vie était très concentrée. La chef de cette peuplade m’a indiqué qu’elle ne pouvait pas recevoir d’étrangers, traduction faite par l’intermédiaire de la femme de mon contact en Chine, François Iffouzar, via WeChat, mais j’ai senti que c’était plutôt autre chose, comme avoir peur d’être espionné. C’est ce soir-là, sur l’insistance de la matrone, que j’ai appris à frapper à la porte des policiers de la ville pour demander l’hébergement avec l’aide de notre sésame écrit en chinois… avec succès. Les policiers que j’ai croisés vivent dans des bâtiments modestes, une enceinte en général est présente autour du ou des bâtiments.

Hébergement pour policiers de ville
Hébergement pour policiers de ville

Pour trouver un hôtel en Chine, j’ai longtemps eu du mal à reconnaître les caractères chinois qui indiquaient que c’était bien un lieu d’hébergement. La géolocalisation est parfois capricieuse sur les derniers mètres… ou alors je ne suis pas doué. Il y a des hôtels avec écrit hotel dans le nom, là évidemment pas de doute. Alors le première chose que je demandais en entrant dans le hall.

— Bonjour, est-ce bien un hôtel ici ?

J’avais quelques mots, phrases clés que j’avais gardé sur le téléphone pour ces occasions. Et je me souviens d’un hôtel où l’hôtesse m’a clairement annoncé que ce n’était pas un hôtel ! Alors que j’étais persuadé que c’en était un car j’avais bien révisé les caractères pour m’en assurer. Le doute me revenait donc sur ma capacité à mémoriser les quelques caractères chinois. J’ai demandé dans la rue à des passants de m’indiquer un hôtel… Une passante m’a fait signe vers l’hôtel que je venais de quitter. Je ne voulais pas passer pour un idiot, j’ai réussi à lui dire qu’on m’avait indiqué que ce n’en était pas un ! On y est retourné ensemble, elle voulait me montrer que c’était bien un hôtel. Et là le discours était différent, il n’y avait plus de place !!! Bref, j’ai compris que je ne correspondais pas au standing de l’hôtel, ce qui a été validé par un haussement de sourcils de mon accompagnatrice sans le dire clairement. Elle m’a trouvé un hôtel juste un peu plus loin.

Mon accompagnatrice et son enfant pour trouver un hôtel à Yongchang
Mon accompagnatrice et son enfant pour trouver un hôtel à Yongchang

— Et par astuce tu penses à quoi ?

Je pense à l’histoire des hôtels pour touristes. En fait ce n’est pas vraiment obligatoire. Il faut juste savoir que le personnel doit remplir une fiche qui contient à peu près trois colonnes. Le nom, l’identification de votre carte d’identité et éventuellement votre numéro de téléphone.

Et c’est là qu’il y a une différence entre hôtel pour touriste ou pas. La capacité à comprendre et traduire vos informations car pour la plupart des Chinois nos lettres latines sont un vrai charabia. J’ai testé pour vous qu’en leur fournissant ces informations clairement on peut entrer dans un nombre plus grand d’hôtels. Pour le nom, il vous faut traduire votre prénom-nom en nom-prénom chinois. Mon nom sur WeChat avec comme première partie la version chinoise suivie de la version latine. Il me suffisait de montrer mon WeChat pour que la personne puisse reprendre le nom chinois et l’inscrire dans la colonne de son carnet. De même pour l’identification, comme on n’a pas de carte d’identité chinoise certains sont perdus, il suffit de montrer vos numéros de passeport à reporter. Et pour le numéro de téléphone, vu que la plupart des contrôles policiers vous le demande, le mieux est d’avoir le numéro sous la main. Un numéro chinois me semble indispensable, une carte SIM est à acheter de préférence dès l’entrée en Chine à Korghos.

Faites traduire vos prénom-nom en chinois et inscrivez-le sur votre WeChat, les Chinois sauront ainsi comment vous appeler. Notez que l’ordre en Chine est Nom-Prénom

Un hôtel à Da Jing Zhen
Un hôtel à Da Jing Zhen
Synthèse des kilomètres par jour
Synthèse des kilomètres par jour

— Laurent, va falloir que tu reviennes pour tenter les trois cents !
— Hum, va falloir que j’y réfléchisse !

OK, mon maximum me laissera sur ma faim, j’aurais bien voulu atteindre les 300 km en une journée voire 288 pour avoir de beaux chiffres porte-bonheur !

Pour les km par jour, il faut bien comprendre que dedans on y trouve les erreurs de route, les détours pour cause de travaux ou d’intempérie et les tourne en rond avant de trouver la bonne adresse !

Si je prends la plus petite journée de 94 km, peut-être que ce jour-là j’ai dû chercher un pneu dans une grande ville, faire des détours et qu’au final je n’ai avancé sur l’objectif de Canton que de 70 km. Une journée comme celle-là est vraiment frustrante quand on est pressé d’arriver ou qu’on voudrait bien rejoindre le Suntripeur qui est quelques centaines de km devant vous. Je pense en l’occurrence à Herman que j’avais l’espoir de rejoindre au début de la Chine. Puis à la fin les jeunes qui m’ont remis un coup de pêche car ils ne m’ont pas fait de cadeau du type on décélère pour t’attendre. Au contraire j’ai eu l’impression qu’ils faisaient tout pour que je n’y arrive pas. C’est de bonne guerre, c’était le Sun Trip de tête et en plus j’étais un peu vieux et pas très speaking english.

Pour la moyenne de 200 km par jour je me suis trompé de 5 km sur mes ambitions, va vraiment falloir que j’y retourne ?

Le nombre d’heures de vélo par jour
Le nombre d’heures de vélo par jour

Cinq heures de vélo sur les plus petites journées c’est typique d’une journée avec problème. Cela a été le cas lorsque ma carte bleue a été avalée par le distributeur et qu’avec de l’aide et du temps, la situation s’est débloquée. Ou une journée où il faut chercher un pneu dans la ville…

Dix heures de vélo pour les plus longues journées, ceci m’est arrivé rarement. Le 12e jour du côté de Rivne où j’ai été au bout de la batterie avec une tension à 39 V à l’arrivée. Arrivé sans assistance électrique donc, dans un hôtel assez louche tenu par des Kazakhs russophones. La sélection de l’hôtel avait été trop optimiste probablement. Une journée à 258 km. Dix heures également au 29e jour, avec une arrivée à Kyzylorda une ville immense qui mériterait une visite où j’ai eu du mal à trouver l’hébergement. Et ma dernière journée à 10h39 de roulage sera le 62e jour qui finira sur la nuit, tout ça pour rattraper les jeunes qui étaient devant moi : Jack, Auguste et Camille.

La rencontre avec Jack Auguste et Camille
La rencontre avec Jack, Auguste et Camille

En général, 8 heures de vélo par jour je supportais assez bien, avec quelques pauses et quelques étirements. Mais 10 heures par jour était un maximum un peu douloureux au niveau du bas de la colonne vertébrale, du côté du coccyx.

Pour la course, il est autorisé de rouler le jour dès 7h du matin avec un couvre-feu un peu souple de 21h. Un peu souple dans la mesure où on peut continuer si les conditions météorologiques ou le lieu d’arrêt l’exigent. Le départ du lendemain sera retardé d’autant.

De là à finir tous les jours à 22h parce que vous ne partez pas avant 8h tous les matins… à vous de voir si cela passe auprès de l’organisation.

En pure théorie on pourrait rouler 14h par jour ! Si vous ne communiquez pas trop, que vous êtes capable de bivouaquer n’importe où et que vous mangez rapidement et dormez facilement. Je dirais qu’au mieux vous pourrez rouler 12h par jour. Si c’est votre cas, avec un moyenne de 25 km par heure, comparé à celui qui roule 8h, vous aurez parcouru 100 km de plus sur la journée.

Ma moyenne est de 23 km/h sur l’ensemble du parcours avec un minimum à 17 km/h et un maximum à 31 km/h.

Pour dépasser le record des 45 jours de Raf Van Hulle, il vous faudra rouler au moins 12h par jour à 25 km de moyenne par heure… ou rouler plus vite et moins longtemps !

J’ai entendu parler de vélomobiles sur le Sun Trip 2020. Feront-ils la différence ? Ne seront-ils pas perturbés par l’état des routes ou le vent ? J’ai hâte de suivre le ST2020.

Synthèse Wh par km
Synthèse Wh par km

— Laurent tu fais comment s’il n’y a pas de soleil ?
— Je pédale car je suis dans le trip autonomie solaire, quitte à être un brin masochiste !

On me demande souvent comment je fais s’il n’y a pas de soleil ou si pendant plusieurs jours la météo est à la pluie. La réponse pourrait être que je recharge les batteries sur la prise de courant, ce qui franchement serait le plus intelligent d’un point de vue économie d’efforts. Mais quand on a pris le parti de tenter l’aventure en autonomie alors on va jusqu’au bout du tenable.

La pire journée de rechargement solaire, avec 141 Wh est arrivé au 44e jour, le même jour où j’ai parcouru le moins de km dans la journée, les 94 km de mon tableau. La zone vers Hami avait subi depuis quelques jours un temps très pluvieux et venté. La route G312/G30 ayant subi des dégâts, c’est ainsi que Herman et moi avons, chacun à notre tour, dû emprunter le contournement nord et passer sur la G7. Une autoroute moderne mais en mode abandonnée car aucune aire d’autoroute n’était ouverte, même les autochtones étaient surpris. Pour faire ses besoins, on s’est retrouvé derrière le bâtiment ! Mais pour faire le plein alimentaire et une pause boisson… c’est là qu’on apprécie d’avoir quelqu’un qui vous offre à boire et à manger, surtout si on a été un peu léger sur le stock d’aliments !

Nourriture offerte sur la G7 - ça tombait bien
Nourriture offerte sur la G7 - ça tombait bien

— Laurent tu parcours combien avec ta batterie de 22 Ah en 48 V ?

C’est variable évidemment. Pour répondre simplement à cette question, je dis que je parcours 100 km la journée sans la batterie et 200 km avec. Mais tout dépendra de la météo, du relief, du type d’environnement ville ou campagne et de la forme physique du moment.

Il faut rouler pour connaître ses propres valeurs. On peut utiliser les Wh / km. Plus le chiffre est bas moins la batterie est sollicitée et donc en principe pour une même quantité d’énergie on doit parcourir plus de km.

Ma meilleure valeur (entre parenthèse en fait) est de 1,4 Wh / km. Cela représente une journée où j’ai dû faire plus d’efforts. C’est la fameuse 42e journée, la journée où j’ai le moins parcouru de distance, avec 94 km. Si le chiffre des Wh / km se réduit parce que votre forme physique s’améliore, c’est bien ! Mais il se pourrait que ce soit juste parce que vous économisez la batterie !

Crevaison au 42e jour
Crevaison au 42e jour
Synthèse Wh par jour
Synthèse Wh par jour

Un autre compteur de consommation électrique est l’affichage des Wh total du trajet journalier. Dans ce nombre il y a la production solaire et la recharge par régénération lors du freinage en descente.

Le nombre le plus petit de 141 Wh voudrait indiquer que j’ai quasiment divisé par 10 ma consommation par rapport à la moyenne. Extraordinaire, n’est-il pas ? Au regard du tableau je vois que c’est encore ce fameux 42e jour !

Au regard de tous ces éléments je peux dire que ce devait être une météo désastreuse pour la recharge électrique ou bien que le système électrique était en défaut.

Comme je n’ai pas eu de gros problèmes électriques ce devait être une météo exécrable d’un point de vue solaire !

Je viens de regarder mes photos du 30 juillet 2018 et c’est le jour où je suis passé chez la coiffeuse, que j’ai crevé et il y avait une couverture nuageuse épaisse. Dans la soirée il a plu beaucoup !

Pour le maximum à 2356 Wh, c’est une excellente journée de production, avec en plus un taux de régénération proche de 9% (dans la mesure où je peux me fier à ce chiffre !). C’était la 29e journée, le 17 juillet 2018, et j’ai parcouru 258 km. Une belle journée de roulage.

Un selfie du 17 juillet 2018
Un selfie du 17 juillet 2018

Pour les puristes, il manque les compteurs d’affichage des Ampères (A) et Ampère-heure (Ah). Désolé mais je n’y voyais pas d’intérêt.

Quant aux pourcentages affichés de régénération, je n’ai pas trouvé ces valeurs très fiables. Même si je retire le max de 55%, il reste encore plusieurs valeurs à plus de 20%. Très étrange, donc une moyenne à prendre avec des pincettes.

Même si en moyenne la régénération n’apporte que 5%, c’est toujours bon à prendre !

La géographie

Un cours de géographie en grand, c’est ça aussi le Sun Trip.

L’Europe est toute petite comparée à nos voisins russes, kazakhs et chinois. Pour la Russie on ne s’en rend pas compte vu qu’on la traverse sur une petite portion, mais le Kazakhstan et la Chine on a bien le temps de s’en imprégner.

Et pourtant en trente-sept jours j’étais aux portes de la Chine du nord, à vélo !

Que le monde est petit et dépendant de l’eau

Dans les cours de géographie que j’ai dû suivre à l’école sans trop m’intéresser on nous parle des fleuves, des océans. Et c’est bien ça qui conditionne la vie et donc les grandes villes, les petites, les bourgades et les trous perdus.

Dans les steppes du Kazakhstan on peut trouver de l’eau dans des endroits que je croyais déserts. C’est ainsi que j’ai été surpris lorsque des Russes qui travaillent à Baïkonour qui m’avaient pris d’affection et m’avaient fait visiter la ville, m’ont également emmené voir leurs parents dans un endroit accessible uniquement en 4x4 et que j’aurais cru dénué de vie. Un point d’eau et pouf quelques maisons avec jardin potager et la piscine hors-sol ! Reste plus qu’à tirer une ligne électrique et voilà la civilisation.

Les parents vivant en pleine steppe à côté de Baïkonour
Les parents vivant en pleine steppe à côté de Baïkonour

L’eau source de vie. L’eau qu’on commence par ne plus boire au robinet mais en bouteille dès l’Ukraine ou avant je ne m’en souviens plus ! L’eau qu’il ne faut pas négliger pendant la traversée des zones désertiques.

En partant de Chamonix où j’avais grillé une plaquette de frein arrivé en bas tellement je n’aime pas les descentes, je n’étais pas friand d’aborder d’autres montagnes et donc mon parcours s’est contenté de suivre le plus possible les plats qu’offre la nature, suivre les cours d’eau.

Une frontière naturelle, tracée par la Volga, nous sépare nettement entre Europe verte et Asie désertique, c’est comme ça que j’ai ressenti la traversée de Saratov puis du pont de la Volga sur la E38. Un pont immense, plus de cinq minutes à vélo pour le traverser. Énorme !

J’ai constaté un nombre impressionnant de stations de lavage à Saratov. Le sable doit envahir le quotidien des autochtones.

Une laverie parmi tant d’autres à Saratov
Une laverie parmi tant d’autres à Saratov

La météo, attention aux surprises

La météo est à regarder de près. Les surprises peuvent arriver dès le départ, typiquement pendant l’été 2018 c’était la canicule en France et pluie et froid à l’est de l’Europe.

Chaque Suntripeur a eu sa météo. Pour les uns c’était plus de pluie, pour les autres plus de vent et pour les plus chanceux plus de vent de dos et de soleil.

Avoir une bonne application pour suivre la météo est un plus. En fonction de l’arrivée d’un vent violent ou d’une grosse pluie, ça vaut peut-être le coup de dépasser l’horaire des 21h pendant deux ou trois jours pour avancer sur une zone plus dégagée.

Prévoir la route qu’on va prendre et s’adapter en fonction des intempéries. Sur la Chine, le vent violent a fait reculer Eric Morel. Et la G312/G30 submergée après quelques jours de pluie à nécessité d’emprunter la G7 par Herman et moi.

La bifurcation de la G30 à la G7
La bifurcation de la G30 à la G7

D’après la traduction donnée par Angélique après contact via WeChat, il n’est pas dit qu’il est interdit d’emprunter la G30 mais juste qu’elle est impraticable, une invitation à prendre la G7 suit l’information. Donc rien d’imposé si on veut traverser à la nage ! J’aime bien ce côté on ne vous impose rien.

A noter que j’ai demandé cette confirmation à Angélique car aux pauses hôtel et restaurant précédentes j’avais franchement des sons de cloches différents d’une personne à l’autre.

Attention aux conseils du choix de la route qu’on peut vous donner.

Ne pas toujours se fier aux indications de route qu’une personne peut vous donner. Je ne me suis pas fait avoir sur ce coup-là mais pour des tronçons plus petits si !

— Tu as souffert de la chaleur ?

En fait moins que d’autres grâce aux panneaux au-dessus de ma tête qui évitent l’exposition directe au soleil. Par contre les orteils, qui en plus d’être écrasés sur les pédales, étaient enfermés dans les chaussures bien au chaud et exposés directement au soleil ! Des fourmis apparaîtront de plus en plus au fur et à mesure. Il me faudra six mois pour voir disparaître ce fourmillement diffus dans les gros orteils après le retour.

J’ai mis de la crème solaire sur le visage mais peu en fait sur l’ensemble du voyage. J’avais par contre un maillot de corps bleu et un autre noir pour alterner, en mérinos et manches longue pour me protéger autant du froid que du chaud.

— Tu avais combien de litres d’eau avec toi ?

Pour les grandes zones de chaleur du Kazakhstan et du nord de la Chine, économiser le poids sur l’eau est à mon avis une grave erreur (oui j’ai des noms !). Et faire confiance à la réelle aide qu’on reçoit sur la route serait être très optimiste.

Emmener 6-7 litres n’est pas de trop dans les zones à risque.

Pour m’abreuver régulièrement, j’avais une poche à eau de 2 litres depuis laquelle j’aspirais régulièrement à l’aide du tuyau, et souvent ! Je n’ai quasiment jamais souffert de la soif, même si je buvais pas mal lors des pauses.

Je suis informaticien et accro au café, c’est étonnant de voir que j’ai pu faire le Sun Trip quasiment sans café. Par contre en deux mois, j’ai bu plus de Coca-Cola que les cinquante précédentes années de ma vie ! Un plaisir simple et sucré. Et après avoir fréquenté les Cauquil, un peu plus de bières que d’ordinaire, sauf dans les zones musulmanes où la bière n’est pas présente.

Pour le nord de la Chine, la bière sera à remplacer par un autre plaisir, préparez-vous.

— Et tu as eu froid ?

En fait oui, cela m’est arrivé au début du voyage avec la météo pluie et froid. J’avais pourtant quatre couches, deux maillots de corps en mérinos, un K-Way à plumes et un imperméable respirant Patagonia et des gants. Malgré cela au bout d’un moment le froid devient persistant. Dans ce cas, une pause dans un restaurant et manger une soupe chaude ou autres aliments chauds s’impose.

Pour les nuits, mon duvet léger avec parfois plusieurs couches de vêtements a été suffisant. Pour le passage par les montagnes de Chine comme le Sun Trip 2020 le prévoit, je pense qu’en bivouac mon duvet aurait été trop léger.

Les animaux

— Tu as rencontré beaucoup d’animaux ?

Pour les animaux, on a tous réalisé des photos de chameaux et chevaux sauvages. Ils sont proches, voire carrément sur la route dans certaines zones découvertes des steppes kazakhes.

En Ukraine on a également les animaux de bord de route qui s’alimentent en broutant et quelques animaux de basse-cour. Un peu comme en Corse. On voit également quelques chevaux attachés à un piquet.

Pour la petite histoire, une fois sur la voie de gauche se baladait une poule et ses poussins déjà de belle taille. Un camion arrive en face de moi, voit l’animal et réduit sa vitesse. La poule passe sur ma voie, le camion continue d’avancer et à un moment un des poussins virevolte en arrière ! J’ai entendu un ploc et c’était fini. Le camion est passé et la poule a cherché un temps son poussin… qui n’était plus qu’une tâche sur la route. Alors je me suis demandé si mon cerveau ferait ploc dans la même circonstance. Le ploc est resté un moment en mémoire !

Les chameaux et leurs odeurs qu’il faut découvrir sur place
Les chameaux et leurs odeurs qu’il faut découvrir sur place

Ma hantise principale c’était les chiens. Je crois que je dois avoir un truc qui les attire, la peur paraît-il, ou autre chose. Il y a des centaines de voiture qui passent et il suffit que tu te ramènes avec ton petit vélo pour qu’ils se mettent en furie. Mais qu’est-ce qu’on a bien pu leur faire ? On leur rappelle une chasse à courre des temps ancestraux ? Je n’avais que la vitesse pour les fuir, encore faut-il avoir la route qui s’y prête et qu’il ne soit pas trop près. Je n’avais pas de bombe au poivre ou cailloux ou bâton électrique. En Chine je n’ai pas eu de problèmes avec les chiens, soit ils étaient en liberté mais petits et non agressifs, soit ils étaient de taille plus importante mais tenus en laisse.

Préparez-vous à la confrontation avec un chien agressif… au moins

Au Kazakhstan à un moment j’ai eu droit comme d’autres à des traversées épisodiques de criquets (ou sauterelles). Ils traversaient la route en bondissant-volant-planant. J’ai dû mettre un foulard pour me protéger le visage car l’impact de l’insecte fouette légèrement sur la peau, mieux vaut se protéger les yeux également. Ce n’était pas une grosse nuée et je n’ai pas réussi à faire une vidéo ou une photo intéressante du phénomène. Mais c’est apparemment connu et les voitures savent que sur certains tronçons la couleur de leur voiture changera un peu en vert.

Pour les moustiques que je redoutais en soirée, je n’en ai rencontré que deux ! Et dans des chambres d’hôtel. Mon survêtement en filet anti-moustique n’aura pas servi durant tout le trajet. Par contre à mon retour fin août à Lyon et pendant plusieurs mois j’ai été assailli par les moustiques tigres et les autres pendant mes sorties au jardin !

La cavalcade sculptures du bord de route
La cavalcade, sculptures du bord de route

Des villes

Il est clair, que sans que ce soit un regret, je n’ai pas pris le temps pour les visites. Un autre voyage serait à faire au Kazakhstan, en prenant le temps de découvrir plus en profondeur. Le pays le mériterait.

Aktobe, une ville du Kazakhstan que j’ai trouvée belle, aérée. Un contact facile avec la population. J’ai trouvé des sourires et un bel accueil. J’ai reçu plusieurs invitations à partager un repas alors que je ne faisais que traverser la ville, une invitation lors d’une pause au supermarché local, équivalent à un Carrefour de chez nous, et une autre par un chauffeur qui m’avait demandé de discuter un peu. J’ai bien vu que je froissais par mes refus. J’ai tenté de justifier par la course que je poursuivais, je ne suis pas sûr d’avoir convaincu. C’est dans ces occasions que je sors ma petite carte de visite que je remets comme cadeau en donnant mes explications, avec plus ou moins de bonheur à la traduction.

Kyzylorda, une ville du Kazakhstan que j’ai trouvée immense, avec de belles statues modernes. La ville s’est développée à côté d’un grand fleuve dont je ne savais pas le nom (en regardant Google Maps à l’instant je peux écrire qu’il s’agissait du fleuve Syr-Daria, mais pour moi c’était juste un immense fleuve après des zones de désert), dans laquelle j’ai fait un crochet pour trouver un hôtel et où j’ai fini invité, grâce à un cycliste professionnel qui m’a pris en charge, passé un coup de fil auprès de ses relations pour me trouver un hôtel de luxe.

Almati, l’ancienne capitale du Kazakhstan (trop proche de la Chine probablement pour rester la capitale !). Je comparerais Almaty à Paris pour le comportement, une ville où tout le monde est pressé et où le conducteur est sûr de lui. J’ai testé pour vous depuis l’intérieur d’une voiture, sur le siège passager avant d’un taxi. J’ai bien mis la ceinture et serré les fesses.

D’abord pour la petite histoire, si vous devez prendre un taxi à Almaty, ne cherchez pas l’application mobile qui va bien. Il n’y en a pas… besoin. Sans application mobile, il n’y a pas d’évaluation possible du taxi que vous allez emprunter !

La règle en vigueur est de vous mettre en bordure de route et de tendre le bras que vous voulez vers le bas en le remontant un peu. Probablement que ce sera votre bras droit car vous regarderez venir la voiture. Un bras écarté du corps pour bien signifier que vous cherchez un taxi… que tout conducteur peut être. Reste plus qu’à indiquer l’endroit et négocier le prix… ou pas ! Si j’ai pris le taxi ce n’est pas suite à un problème mais suite à une invitation à manger un repas traditionnel kazakh en soirée. J’en parle au chapitre des rencontres.

Soyez vigilant à Almati

Pour le cycliste c’est une ville qui se démarque des précédentes par le côté vigilance accrue qu’il faut avoir. L’usage de l’accélérateur est un plus pour décoller rapidement.

Urumqi, au nord de la Chine, est une grande ville avec un trafic routier encore plus intense qu’à la ville kazakhe d’Almaty. Et le comportement des automobilistes plus qu’agressif, on se croirait entouré de voitures folles, où l’enjeu est de vous écraser à tout prix !

— Tu exagères Laurent !
— Je ne crois pas. Vous voulez vivre GTA Vice City, le jeu vidéo en vrai ? C’est un bon début pour commencer (j’imagine qu’il y a bien pire ailleurs… mais je n’ai pas été voir)

Vous l’aurez compris, je ne garde pas un bon souvenir de mon passage à Urumqi (prononcer OuRoumTchi ou un truc du genre) que j’ai dû écourter, juste pour continuer à respirer. Je me souviens d’avoir perdu le contrôle de mon itinéraire, OsmAnd ne savait plus indiquer correctement le chemin, les voies rapides sur plusieurs niveaux y étant probablement pour quelque chose. Plusieurs fois, je me suis arrêté sur le trottoir pour tenter de trouver mon chemin, et j’ai été entouré rapidement par les autochtones qui ne semblaient pas du tout intéressés par moi mais uniquement par Silky One. Le touchant dans tous les sens, discutant je ne sais quoi sur la technique… pour le reproduire ? A un moment j’ai demandé de l’aide à un policier qui tentait de faire un peu de contrôle de circulation. Après lui avoir indiqué la direction de Guangzhou (prononcer GouangDjo ou un truc du genre) et pas les villes intermédiaires que je ne devais pas prononcer correctement, il a pris son véhicule pour m’ouvrir la voie. Et même lui, il avait du mal à se faire respecter, les automobilistes ne le laissaient passer qu’avec hésitation… ou pas du tout !

Urumqi a failli me faire craquer. J’ai repris vie à la sortie de la ville, sur la route poussiéreuse des camionneurs

Une photo prise en passant à Aktobe, le 13 juillet 2018 image::resources/20180713_151700.jpg[Une photo prise en passant à Aktobe le 13 juillet 2018]

Une journée type

— Tu te levais à six heures pour partir dès sept heures (l’heure de départ autorisée) ?
— Euh ! Tu veux que je te raconte la journée théorique optimale ou une journée type que j’ai suivie ?

L’objectif est d’optimiser le temps de roulage de sept heures à vingt et une heures. En théorie on roule dès sept heures. Je sais que les jeunes sont partis sur cet objectif… jusqu’à la casse de leur tandem.

Je suis informaticien dans la vie et j’ai plutôt l’habitude d’être opérationnel vers neuf heures. Ce n’est pas une bonne préparation pour le Sun Trip. Pour le voyage je ferai des efforts mais l’habitude n’aidant pas, mon levé se fera vers les sept heures. Le réveil-smartphone ne sonnera pas souvent car je serai souvent levé avant la sonnerie, toujours sur le qui-vive sera ma tasse de thé pendant le voyage. Sommeil léger, levé assez facile, mais pas très rapide à m’échauffer. Il me faut un déjeuner avant d’être cycliste pour la journée. Un minimum de nutrition pour remplir mon estomac. Repas froid ou chaud ce n’est pas important mais un minimum consistant (j’apprécie la position du vélo couché, elle évite la compression du bide, on peut rouler le ventre plein). Bien ranger ses vêtements, ne rien oublier dans la salle de bain ou bien dans la tente. Le départ est retardé lorsqu’il faut plier la tente, l’oreiller et le matelas gonflables. La première pause toilette. Nettoyer les panneaux solaires avant de partir. Relever les valeurs du Cycle Analyst et le remettre à zéro, dans le cas assez fréquents où je ne l’avais pas fait le soir précédent. Être prêt pour moi demandait au minimum une heure trente.

Mes premiers pédalages commençaient vers les huit heures trente.

Une fois parti je peux rouler deux heures sans interruption sauf si pause pipi impérative. Pour la petite histoire, depuis que je suis petit je sais que j’ai un boyau trop long. Jeune j’avais des crises de maux de ventre, à rester plier en deux dans mon lit, lorsque plusieurs aliments étaient mélangés comme les haricots, les bonbons, la glace. En grandissant le boyau a trouvé de la place et ne m’a plus inquiété. Mais il empiète probablement sur ma vessie. La nuit je dois pisser deux, trois, voire quatre fois. Pour le bivouac et certains hébergements je gardais plusieurs petites bouteilles vides pour éviter de sortir à l’extérieur en pleine nuit. Il faut rester concentré sous peine de débordement !

Pendant la journée, je craignais de faire de nombreuses pauses. Ça ne sera pas le cas et pourtant je buvais à ma pipette très souvent et régulièrement. Je rencontrerai plus embêté que mois sur la route. Yann était en pause toutes les trente minutes !

Je tente de vous conter ma journée type mais en fait j’ai eu deux périodes, avant et après la rencontre avec les Cauquil. Pour le levé, pas de changement entre les deux périodes, mais sur le déroulement de la journée, si.

Avant la rencontre, j’étais en mode le moins de pauses possibles. Arrêt pipi, assouplissement, alimentation, prise de photo au plus court. Je tenais assez bien jusqu’en début de soirée où là je devais faire de plus en plus de pauses pour cause de fatigue et mal au coccyx. Je pense que je culpabilisais à ne pas rouler. Je voulais réaliser ma moyenne de deux cent kilomètres par jour et comme c’était mal parti avec la météo du début de l’Europe, je tentais de remonter la moyenne.

Puis est arrivé la rencontre avec Bernard et Yann. Je me suis calqué sur leur journée type. Ils roulaient plus vite, je dirais vers les trente-cinq kilomètres heure alors que j’étais plutôt dans les vingt-cinq. La différence se situe dans la durée des pauses qui étaient plus longue, où on prenait le temps de vraiment se reposer, pendant que les panneaux solaires rechargeaient les batteries. Pause éventuellement à dix heures, pause du midi et de seize heures. L’heure du goûter c’est également le moment de rechercher le logement du soir ou un lieu pour le bivouac. Puis le soir, un bon repas et un petit rituel, une bière… quand c’est possible. Je tenais mieux en soirée avec cette journée type.

Je pense que connaître la journée type de chaque Suntripeur serait enrichissant, surtout si on veut réaliser plus de kilomètres à la journée. J’aurais bien aimé rattraper Hermann pour passer un moment avec lui et voir comment était sa journée type.

Une fois l’hébergement trouvé il restait à se laver, manger, s’occuper de la lessive, du parcours du lendemain, communiquer sur sa journée.

Vers vingt-trois heures je retrouvais le confort des draps ou du duvet, souvent avec le mobile à la main à continuer la communication sur les réseaux sociaux.

Une journée type ne veut pas dire que toutes les journées sont égales, bien au contraire. Dans certains hôtels il faut tenir compte du temps de passage pour régler la chambre, on ne peut pas le faire le soir à l’avance. Il est souvent demandé une caution qui est restituée au départ après contrôle de la chambre. Tenir compte du temps d’ouverture de la cuisine pour les petits déjeuners compris dans l’hébergement. On trouve ce service dans les hôtels de luxe et la pause déjeuner mérite de perdre une demi-heure.

Silky One encore équipé de la canne Click-Stand
Silky One encore équipé de la canne Click-Stand

Rouler seul ou même à deux

Bernard et Yann Cauquil à l’entrée au Kazakhstan. Belle photo qui invite au voyage mais cherchez l’erreur
Bernard et Yann Cauquil à l’entrée au Kazakhstan. Belle photo qui invite au voyage, mais cherchez l’erreur

— Vous étiez en groupe pour aller jusqu’en Chine ?
— Un peu pendant le prologue entre Lyon et Chamonix, ensuite c’était chacun sa route, même si on a été nombreux à prendre quasiment la même route du nord.

Rouler seul ou même à deux ou même à X est une question qu’on doit se poser.

Je préférais rouler seul pour cause de caractère. Mais au bout d’un moment, rencontrer des Suntripeurs sur sa route et faire un bout de route ensemble reste dans les bons souvenirs.

Seul on va plus vite tant qu’on n’a pas de problème. Et seul on rencontre différemment les gens. Si j’ai pu visiter Baïkonour c’est que j’étais seul.

Yann et Bernard sur le côté qui secoue moins mais qui glisse et moi sur la route qui secoue fort
Yann et Bernard sur le côté qui secoue moins mais qui glisse, et moi sur la route qui secoue fort

Mais à plusieurs c’est franchement rassurant et on peut être complémentaire. L’un peut s’occuper de choisir la route, un autre de trouver l’hébergement et un troisième de choisir le menu du midi. J’ai voulu quitter les Cauquil en Russie car je me sentais pousser des ailes et juste quelques km après les avoir distancés… le montant du cadre avant, casse. J’ai apprécié le savoir-faire et la tranquillité de Bernard qui a fait tenir le cadre à l’aide d’un long cordage que j’avais dans la trousse de secours. Le temps de trouver un prochain soudeur. Le cordage a été remis après la soudure et il a tenu jusqu’à Canton.

Emmenez avec vous du cordage, ça peut vraiment dépanner en cas de pépin

Les cyclistes ne roulent pas de la même façon, encore plus avec la stratégie solaire. Certains préfèrent rouler à 40 km/h ou plus et faire de belles pauses pour recharger, c’est le cas d’Herman qui roulait à fond entre chaque pause. Romàn et les Cauquil avaient également une belle allure. Pour les suivre je devais augmenter l’assistance électrique par rapport à mes habitudes des jours précédents. Peut-être avais-je tort d’être à l’économie. On se donnait rendez-vous à un endroit donné. WeChat était notre meilleur ami d’échanges. Quand je repense aux frères Colle, qui roulaient en VTT ordinaire et allaient plus vite que Jack et moi à vélo solaire… incroyables de puissance et d’endurance.

Entrée du Kazakhstan la route avec Romàn Bernard et Yann
Entrée du Kazakhstan, la route avec Romàn, Bernard et Yann

Bref, chacun son rythme.

Rouler seul et parfois à plusieurs au hasard de l’aventure, c’est un bon compromis.

Évidemment le premier n’aura pas le choix ! Sauf à être en tandem !

Les rencontres

— Je t’ai suivi sur Facebook et j’ai vu que tu avais fait quelques rencontres sympathiques.
— Oui, en plus des incontournables selfies de la route, j’ai eu la chance d’être invité à passer la nuit chez l’habitant ou devant leur maison, de visiter l’enclave russe de Baïkonour au Kazakhstan, d’être assisté lors d’un problème de carte bleue… Je ne vous raconterai pas tout, ce serait trop long, mais des extraits devraient suffire à vous donner envie de voyager.

Je n’étais pas forcément parti pour faire des rencontres, j’étais plutôt parti pour faire mon voyage le plus rapidement possible, prendre des photos, communiquer. Mais je savais bien que les rencontres se feraient, on m’avait prévenu… mais je ne savais pas que j’aurais autant de rencontres sympathiques.

Quand j’étais jeune j’aimais rendre visite à mes grand-mères, oncles et tantes à vélo. J’aimais avoir une destination, un lieu d’arrivée, quelqu’un à rencontrer, parler un peu et revenir au point de départ. Pour l’entraînement j’avais le même besoin d’aller voir quelqu’un de mes relations. Pour le Sun Trip je me suis demandé si j’avais un ami ou de la famille en Chine pour reproduire ce schéma qui me fait kiffer. A ma connaissance pas de famille à l’horizon. A la rigueur mon beau-frère Daniel qui se rend de temps en temps en Chine pour le travail.

Au hasard d’une discussion avec des ami-e-s, on apprend (Christel et moi) que François de la Jum (c’est un jargon qu’on a pour dire La Jumenterie, club hippique où mes enfants et ma femme ont pratiqué le cheval) vit maintenant en Chine. J’ai contacté François par courriel, qui m’a appris qu’il vivait à cent kilomètres au nord de Canton, qu’il serait quasiment possible que j’y fasse un détour, qu’il m’invitait et même qu’il me proposait de l’aide par téléphone, si besoin, en Chine. Pour la petite histoire, François travaillait en France dans l’industrie de la chimie. L’entreprise a été rachetée par des capitaux chinois. Il a dû former du personnel chinois et après plusieurs voyages, il a vu s’ouvrir à lui une nouvelle vie en Chine. Il est maintenant responsable de l’usine, marié avec une jeune Chinoise et père d’une nouvelle fille.

J’avais donc quelqu’un à voir en Chine, un autochtone avec qui je pourrais parler français ! Trop cool, et je crois que j’étais le seul dans ce cas.

François sur Silky One
François sur Silky One

J’avais prévu deux autres rencontres. Celle dont j’ai parlé au chapitre des chiffres du voyage en synthèse, l’hébergement du premier soir chez un hôte Warshomers et Honza Galla de chez Azub en république Tchèque.

Les autres rencontres, c’est le hasard et les sourires qui en seront responsables.

Un véhicule solaire, un européen au volant, il y a de quoi susciter la curiosité. Une multitude de personnes, depuis leur véhicule, nous prendront en photo ou en vidéo. Un nombre impressionnant de personnes veulent qu’on s’arrête pour faire un selfie, des parents qui veulent voir leur enfant à côté de l’engin extraordinaire (alors que parfois le gamin n’en n’a rien à faire).

Au départ, on se sent un peu star ! On s’arrête pour le selfie, parfois on est gratifié d’un cadeau, une boisson, un fruit. Puis il arrive qu’on n’ait plus envie de s’arrêter, on veut juste avancer sur son parcours qu’on sait être encore long. Certains se font très insistants, s’arrêtant à plusieurs reprises devant vous sur le bord de la route. C’est parfois avec un peu de culpabilité que je ne me suis pas arrêté, d’autres fois c’est le contraire, je m’en suis voulu de m’être arrêté, ça compense moralement !

Si vous ne voulez pas rester bloqué un long moment, lorsque vous voyez débarquer un car de touristes chinois… fuyez !

Et sur les derniers jours, j’en avais franchement marre d’être pris pour cible avec leur mobile. J’avais envie de piquer la super nana qui était à côté du gars dans sa super voiture et de passer un peu de bon temps (parfois j’ai des flashs comme ça). Je crois qu’il était temps que j’arrive. Je comprends mieux maintenant le sentiment des gens connus et pourquoi ils se mettent à l’écart. Surtout que le comportement dans les grandes villes était différent. La recherche du contact n’était pas là, c’était juste la photo qui semblait intéresser la personne, la curiosité à partager et puis on passe à autre chose.

Le trajet en Chine peut sembler long, très long… trop long ?

Heureusement, j’ai fini par rencontrer François, enfin c’est plutôt François qui est venu à notre rencontre… avec son chauffeur ! En fait, François est toujours considéré comme Européen et à ce titre (jusqu’à nouvel ordre) il ne peut pas conduire tout seul une voiture en Chine. Comme responsable de l’usine en Chine, on lui fournit un chauffeur !

On a testé un truc à ne pas faire, manger une pizza chez Pizza Hut. François nous avait averti, cher et pas bon. Mais on avait tous les quatre (Jack, Auguste, Camille et moi) rêvé de manger une pizza le jour précédent. Pour dire que c’est cher, après la prise de commande, la serveuse est revenue… avec l’addition pour s’assurer qu’on avait bien compris le prix… avant de passer la commande pour de vrai. Et oui ce n’était pas du goût qu’on rêvait (on avait été prévenu).

Jack Auguste François son chauffeur la serveuse
Jack, Auguste, François, son chauffeur, la serveuse

Mais avant de boire le vin de François qu’il rapporte de France en Chine, j’aurais eu plusieurs occasions de garder des souvenirs forts de ce voyage.

La rencontre avec l’équipe Azub en République Tchèque

Un petit crochet pour le cycliste mais un grand pas pour la promotion vidéo. Honza et son collègue d’Azub ont réalisé une superbe vidéo de Silky One en pleine action. C’est la vidéo que j’ai mise en page d’accueil sur J’me Recycle.

C’était un passage éclair, le temps de voir leurs locaux tout neufs, de faire observer un peu Silky One de près par Honza et son œil expert… et de faire des prises de vidéos.

Honza m’a fait profité de son expérience technique.

— Laurent, tu n’entendrais pas un couic-couic depuis quelque temps ?
— Si justement, cela fait trois jours que je cherche d’où vient le bruit

A l’angle supérieur gauche au-dessus de ma tête, une fissure du cadre acier s’agrandissait… que je n’avais pas vue mais que j’entendais bien. Honza m’a installé un renfort riveté qui a tenu jusqu’à Canton… et on aurait pu faire la même opération aux trois autres angles.

Tout nouveau bruit qui apparaît pendant votre voyage doit vous alerter. Trouvez l’origine du bruit avant de continuer… ou priez

Sur un autre conseil, je suis reparti avec une nouvelle application mobile pour suivre la météo, application YR que je vous invite à tester.

Honza en pleine action de renforcement de Silky One le 25 juin 2018
Honza en pleine action de renforcement de Silky One, le 25 juin 2018

Les rencontres avec les cyclistes

Plusieurs fois je rencontrerais des cyclistes sur la route. Parfois ce ne sera qu’un coucou en se croisant, chacun voulant continuer sa route sans perte de temps. Sans être fréquent, on se rend compte qu’on n’est pas seul à arpenter la route à vélo. Et comme on utilise tous la même route principale, ou presque, le cycliste qu’on rencontre a parfois déjà abordé d’autres Suntripeurs ou en rencontrera à nouveau.

La première rencontre s’est effectuée à la frontière Pologne-Ukraine le 29 juin 2018. Une petite équipe de cyclistes se rendaient en Ukraine pour leur balade. On a franchi la frontière ensemble, par le passage piéton, car l’autre passage important par la route était interdit aux vélos même si le vélo est solaire. Le passage par les portes était limite.

La journée du 17 juillet sera une journée faste pour la rencontre de cyclistes, après une bonne période sans rencontre. Au matin, rencontre éclair d’un cycliste qui avait passé la nuit au même hôtel que moi. C’est au matin qu’on s’est croisé. Il avait déjà rencontré d’autres Suntripeurs et aura l’occasion d’en rencontrer d’autres.

Et le soir à Kyzylorda, je serais pris en charge par un champion de l’https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89quipe_cycliste_Astana[équipe cycliste Astana].

Ensuite il faudra que j’attende le 29 juillet, en Chine pour une nouvelle rencontre. J’étais resté sur l’idée qu’il y aurait pleins de cyclistes en Chine, mais ce n’est pas le cas. Dans les villes ce sont des scooters électriques qui remplacent les vélos. On se fait donc doubler par tout le monde dans les villes.

De temps en temps on croise des cyclistes sportifs hors de la ville. C’est ainsi que j’ai croisé le 5 août le père et son fils en balade à vélo. Le pouce levé est un grand classique, je le rencontrerai souvent, il remplace le V qu’on peut trouver ailleurs. On sent l’influence des réseaux sociaux.

Un cycliste bien protégé du soleil
Un cycliste bien protégé du soleil

La rencontre avec le soudeur russe

Pour supporter vos panneaux solaires, soit vous faites un cadre rigide et fixé au vélo, à la méthode Guillaume, soit vous faite un cadre souple qui peut bouger avec des silentblocs, des câbles, à la méthode Bernard.

J’étais parti sur la version souple avec silentblocs en dessous des montants… sauf que je n’avais pas mis de câble. En mode compression les silentblocs fonctionnaient bien, mais en mode extension l’étirement était trop important et risquaient de rompre. J’ai fait l’erreur de retirer les silentblocs à l’avant pour éviter les étirements. C’est pour cela que le montant avant à cassé le 9 juillet. J’ai eu la chance d’être sur la route de Bernard et Yann. Bernard m’a dépanné à l’aide du cordage que j’avais emmené en secours.

En soirée on a trouvé un soudeur local qui m’a pris en urgence. Ensuite j’ai remis en place les silentblocs à l’avant et le cordage. Le tout à tenu jusqu’à Canton.

Choisissez un cadre tout rigide ou un cadre tout souple. Ne mélangez pas les deux options, j’ai testé pour vous !

Soudure en Russie
Soudure en Russie

J’aurai l’occasion de faire intervenir un soudeur en Chine sur la remorque le 29 juillet. La soudure ne tiendra pas jusqu’à Canton mais n’aura pas d’incidence.

La rencontre avec la famille russe et la visite de Baïkonour

— Baïkonour, tiens ça me dit quelque chose. Il n’y aurait pas des fusées dans le coin ?

Je ne m’attendais pas à visiter la ville de Baïkonour. En fait je croyais que le site était fermé ! Quand je vous dis que je manque de culture !

Un soir du 13 juillet à Kramtau, une famille russe, Elena, son mari et leur fille, engagent la conversation via leur fille qui traduit anglais-russe autour de Silky One et du Sun Trip. Comme on avait le temps vu qu’on était au même hôtel, on en profite pour s’apprivoiser. On garde contact pour apparemment une rencontre du côté de Baïkonour où ils semblent vivre. Je n’y crois pas trop mais les kilomètres défilent et me voilà aux portes du rendez-vous le seize juillet… Et la rencontre a bien lieu.

Là c’est le grand jeu, je me sens presque une star. J’ai droit aux honneurs de rencontrer les grands-parents et de partager une soupe avec le patriarche. Je n’imaginais pas des habitations à l’endroit où on m’a conduit. C’était en dehors de Baïkonour et il fallait un 4x4 pour s’y rendre. Puis visite de Baïkonour, avec une petite astuce pour y entrer, car apparemment il faut réserver à l’avance et même comme ça ce n’est pas gagné d’avance. La visite sera un peu écourtée parce que je n’avais pas trop l’appétit de visiter un musée et que je commençais à fatiguer. On m’a montré des fusées et la statue de Youri Gagarine, grand héros russe du programme spatial soviétique. J’avais l’impression qu’on me prenait pour une sorte de héros des temps cyclistes… j’avais un peu honte d’inspirer autant de respect. Et l’apothéose, la famille m’a invité au restaurant.

Moi qui n’avais rien à offrir en retour que mon sourire. J’ai apprécié cet échange et j’espère qu’un jour j’aurai l’occasion de rendre le même accueil que j’ai reçu.

Baïkonour est donc toujours actif, même si on sent que la vie n’est plus aussi débordante. C’est une enclave russe où tous les distributeurs vous délivrent de la monnaie russe et pas kazakhe. D’ici quelques années, cette enclave devra être remise aux autorités kazakhes. Peut-être la cause de la tristesse que je ressentais, ou alors c’est le tempérament russe. Par contre la jeune fille débordait de vie.

Elena et sa fille lors de la visite privée à Baïkonour
Elena et sa fille lors de la visite privée à Baïkonour

L’hébergement Kazakhe et la douche à la louche

20 juillet 2018, du côté de Shakpakbaba

Petite ville de campagne, rien sur la carte qui ressemble à un hôtel. Des personnes qui vendent des fruits et légumes sur le bord de la route.

— Bonjour, je cherche un hôtel ou un endroit pour dormir

Un moment de réflexion court, un échange entre deux personnes et je reçois l’invitation à suivre l’hôte dans la maison à côté, sa maison. Je serai accueilli chaleureusement par l’ensemble de la famille, des petites-filles à la grand-mère. Sauf apparemment par le grand-père que j’entendais râler et qu’ils écarteront dans une pièce.

Maison accueillante, le jeune propriétaire de confession musulmane s’éclipsera en soirée pour un moment de prière. Malgré les difficultés de traduction j’apprendrai qu’il vient d’apprendre qu’il est père… d’un enfant qu’il ne peut pas aller voir, sa femme l’a quitté il y a peu… pour cause de belle-mère qui a monter sa femme contre lui. Ou le logiciel de traduction est très bon ou j’ai tout inventé ! Mais j’ai vraiment l’impression que c’était ça. Il m’offre couvert et gîte. La pièce dans laquelle je dormirai aurait pu accueillir une vingtaine de cyclistes ! Une pièce apparemment prévue pour offrir le gîte, un tapis au sol et le tour est joué.

A un moment je lui demande si je peux me laver. Là, grosse surprise, il m’emmène dehors, commence à casser une cagette pour démarrer un feu qui va chauffer une grosse bassine d’eau. Il me fait attendre le temps que la température monte. Puis me fait entrer dans le local, mal éclairé, les finitions laissant à désirer mais quel plaisir d’entrer dans cette pièce emplie de chaleur humide. Je me suis lavé à la louche avec une température d’eau qui m’a fait un bien immense. Je crois que c’est la meilleure douche que j’ai prise de tout le voyage. Improbable, rapide mais tellement appréciée. Incroyable.

La préparation du feu pour chauffer la bassine d’eau
La préparation du feu pour chauffer la bassine d’eau

Le repas traditionnel kazakhe à Almati

23 juillet 2018

— Quoi tu as mangé du cheval ?
— Chut, si mes filles l’apprennent elles vont me faire la tête !

Non, je n’étais pas perdu dans les steppes kazakhes, la faim au ventre et me suis jeté sur un cheval sauvage.

J’avais lâché la famille Cauquil pour continuer la route avec Romàn. Puis j’avais continué en solo sur la même route qu’avaient empruntée mes prédécesseurs, pendant que Romàn tentait une autre voie.

Et là surprise sur la route, les Cauquil qui me font une blague dont je garde un bon souvenir. Issatay et son neveu qui se font passer pour des Suntripeurs avec les maillots de Bernard et Yann. La surprise passée, ils m’invitent à les rejoindre à Almati pour partager un repas traditionnel… à base de viande de cheval.

Mais pourquoi les Cauquil étaient-ils en voiture et plus à vélo sur leur trike tandem ?

Pour une bête roue arrière, mais d’un modèle pas courant, dont les rayons cassaient les uns après les autres. L’équipée aurait pu repartir après réception d’une nouvelle roue commandée en livraison expresse… si la roue était arrivée dans les temps et pas un mois plus tard ! L’équipe Cauquil sera amenée à abandonner l’aventure aux portes de la Chine, d’où les quelques jours passés à Almati et l’invitation que j’ai reçue de partager un repas traditionnel organisé par un ami du Sun Trip, Issatay Birmanov.

Pour les rejoindre de l’hôtel (en dehors d’Almati, prêt à repartir le lendemain matin) à l’appartement, je devrai faire usage du taxi local, à savoir tendre le bras pour indiquer que je cherche un chauffeur (en fait c’est la personne de l’hôtel qui le fera à ma place car j’étais persuadé qu’il fallait appeler un taxi ou utiliser une application mobile. Comme je ne comprenais rien… elle est sortie dans la rue me montrer). Issatay avait tout prévu, l’écriture de l’adresse et le numéro pour l’appeler afin de discuter du prix… et ne pas me faire arnaquer.

Pour le retour à l’hôtel, le système E, comme entraide, apparemment en vigueur au Kazakhstan, sera mis en place. Pendant le repas une fuite d’un radiateur d’eau, importante, nous amènera à rencontrer le propriétaire du logement, après quelques bassines d’eau récupérées. Issatay arrivera à le persuader de me raccompagner à l’hôtel en échange du coup de main qu’on lui avait apporté.

Une soirée entre amis à Almaty Issatay à gauche de la photo
Une soirée entre amis à Almaty, Issatay à gauche de la photo

La rencontre Ouïghour à l’entrée en Chine

25 juillet 2018

— Ça se passe comment pour entrer en Chine ?
— Bien mais faut connaître

Quitter le Kazakhstan nécessite de passer plusieurs douanes, à tel point qu’on se demande quand cela va finir. Mais un contrôle des plus simples.

Côté frontière chinoise, là il y a un premier contrôle électronique qu’il ne faut pas oublier d’effectuer, même si personne n’est là pour vous le dire. Car sinon au contrôle de sortie suivant on vous demande de repasser au passage précédent.

Dans mon cas, j’ai perdu du temps sur la compréhension du système. A savoir laisser son véhicule dans un scanner géant. En fait un hangar suffisamment grand pour accueillir les plus longs poids lourds… ou un vélo comme Silky One, le scanner devant certainement se déplacer. Comme j’avais perdu ma canne pour tenir debout Silky One il a fallu trouver un moyen. Et c’est la bonne vieille brouette chinoise, carrée et lourde qui servira de support à Silky One.

La frontière passée, il est recommandé de prendre de la monnaie locale si on n’en pas à l’avance et obtenir une carte SIM. Là encore, je n’ai pas compris tout de suite le système. Apparemment les grands opérateurs officiels ne peuvent pas trop s’occuper des voyageurs comme nous. Ils passent par un intermédiaire… qui vient vous chercher pour aller dans son local via un taxi et qui vous renvoie par le même moyen une fois la transaction faite. J’attendais dans la boutique que quelqu’un s’occupe de moi, je n’avais pas compris qu’il fallait suivre l’intermédiaire en dehors de l’agence ! Deuxième perte de temps.

Le prochain bivouac était prévu vers le lac Sayram, en hauteur. Une autoroute toute neuve permet de l’atteindre via un pont impressionnant. La montée prend pas mal de temps, la batterie s’amenuise. Avec toutes les erreurs de compréhension que j’avais commises je me suis retrouvé en face du lac, toujours sur l’autoroute, à la nuit tombée et la batterie quasi vide.

C’est à ce moment d’inquiétude que j’ai vu une femme, au bord de l’autoroute, de sa maison en parpaing me faire deux signes, le signe de manger et le signe de dormir. J’ai hésité deux secondes et j’ai accepté l’invitation. La famille m’a offert le gîte et pour le couvert j’ai sorti mes ingrédients que j’ai tenté de partager et ils m’ont offert une soupe et un morceau de mouton fraîchement dépecé.

Leur habitation en bord d’autoroute parait une incongruité, la barrière est volontairement omise à leur niveau. Je verrai d’autres habitations disposées de la même façon. Tu vis sans eau courante, en bordure d’autoroute moderne. La famille respirait le bonheur. J’ai eu du mal à communiquer, mais j’ai senti une humanité sur les besoins primaires, une compréhension commune qui n’a pas besoin de mots.

Mon entrée en Chine commençait fort !

Famille d’hébergement à l’entrée en Chine
Famille d’hébergement à l’entrée en Chine

L’aide pour récupérer ma carte bleue

4 août 2018, Yumen en Chine, *un samedi*

— Merde, c’est quoi ce distributeur de billet qui me garde ma carte bleue ?

Je n’étais pas complètement bloqué, car j’avais une autre carte bleue en réserve. Mais je ne voulais pas laisser une carte dont je ne savais pas ce qu’elle deviendrait. J’ai fait appel à mon joker via WeChat, à savoir la femme de François, qui m’avait conseillé de ne faire confiance à personne. Mais à distance ce n’est pas simple, même si le partage vidéo fonctionnait suffisamment bien pour voir les informations affichées dans le local bancaire.

Après plusieurs tentatives d’explications aux personnes qui se rendaient aux distributeurs, je suis tombé sur une jeune fille accompagnée de ses parents, elle maîtrisait bien l’anglais, voire trop bien car à un moment elle m’a demandé si je connaissais l’anglais. Avec ses parents ils ont réussi à joindre le numéro de support… et à convaincre quelqu’un de passer débloquer la situation.

J’ai appris que c’était une sorte d’exploit car on était samedi, jour de fermeture de l’agence. Il aurait fallu attendre lundi dans un cas normal. Comme j’étais un cas anormal, l’équipe féminine de la banque a débarquée. La carte bancaire récupérée, on a fini en selfie bienveillant après m’avoir tout de même pris en copie mon passeport, au cas où.

La ville était grande, j’ai trouvé un autre distributeur (je suis joueur n’est-ce pas !) qui cette fois-ci m’a délivré les billets nécessaires à la poursuite du voyage.

Ma sauveuse la première à gauche et les banquières
Ma sauveuse, la première à gauche et les banquières

La nourriture

— Tu en as bien profité ?
— Tu as mangé des plats typiques ?
— Tu as emmené ta nourriture ?

Je suis plutôt du genre simple pour la nourriture. Un sandwich, des pâtes ou du riz, du fromage, un fruit ou deux, de l’eau gazeuse de préférence et voilà le tour est joué.

Je suis parti avec quelques boites de thon que je renouvelais sur la route dans les supérettes. Jusqu’en Russie j’en ai trouvé, ensuite non.

On m’avait offert des petits tubes contenant une pâte énergétique. Je m’en suis servi le soir lorsque j’avais un coup de mou, jusqu’à fin du stock. Je ne sais pas dire si c’est bon pour l’afflux d’énergie mais sur le plan psychologique cela aide. Ce n’est toutefois pas pratique, je le prenais d’une main en roulant, après j’avais les doigts de la main tout collant, et en général également la poche dans laquelle j’avais placé un sac pour servir de poubelle. Je ne conseille pas.

Pour les pâtes et le riz, j’aurai ma dose, jusqu’à saturation. Pour le sandwich et même le pain en général, il deviendra rare. Je n’arriverais pas à trouver du pain en Chine. Et c’est pourquoi lorsqu’au hasard d’une route j’ai découvert un coin accueillant qui fabriquait des équivalents panini. J’ai craqué et j’en ai pris deux portions. Il y avait en plus une ambiance conviviale, le rêve.

Equivalent panini accompagné de son bol de soupe sucrée un régal
Equivalent panini accompagné de son bol de soupe sucrée, un régal

Soixante-cinq jour de route, cela donne un nombre de repas assez important. Si on part sur trois repas à prendre en prenant son temps, plus deux pour les collations intermédiaires, on arrive à trois cent vingt cinq repas ! Il faut donc faire des pauses après avoir sélectionné l’endroit où on va commander à manger ou acheter et se faire à manger.

En Europe j’ai surtout acheté en supérette, thon, pain, fromage, fruits, fruits secs. Et un repas au restaurant en soirée si j’étais à l’hôtel. Puis faute de magasin alimentaire habituel, j’ai du retirer le thon, le fromage, le pain. Pour la boisson il en sera de même. J’abandonnerai rapidement le café au bénéfice du thé et surtout de la boisson gazeuse, d’abord de l’eau, puis du Coca ou du Pepsi. C’est assez marrant de constater que le marché est partagé entre deux marques.

Il faudra s’adapter à la nourriture trouvée. Les fruits me manqueront, le fromage aussi, et les gâteaux je ne vous dis même pas. J’ai fait l’expérience du gruyère sous forte chaleur… même dans la remorque c’est intenable. Le fromage pour être consommé doit être préparé autrement. J’ai découvert le fromage kazakhe lorsqu’Isatay m’en a offert avant mon départ pour la Chine. Cela ressemble par la forme à de grosses cacahuètes. C’est dur car asséché, et très salé. J’en ai gardé pendant dix jours. Je mangeais un ou deux morceaux par jour. C’est comme ça qu’on peut avoir du fromage. Si j’avais su j’aurais constitué un stock au Kazakhstan… encore faut-il savoir que cela existe et où le trouver.

Les seuls fromages qui tiennent par 40°
Les seuls fromages qui tiennent par 40°

Je mangerai des biscuits russes le temps de la traversée de la Russie et une partie du Kazakhstan, en me rappelant les paroles de Jean-Marc qui me disait que c’était son péché mignon. Pas cher, sucré, à portée de main… enfin non, à portée des poches si on a des poches sur le maillot.

J’en profite pour rappeler aux organisateurs du Sun Trip que lorsqu’on nous demande si on veut des poches devant ou derrière pour le maillot. Qu’on répond devant, car à vélo couché c’est franchement plus pratique ! Ce serait bien d’honorer la commande ! J’aurais perdu moins de biscuits sur la route à tenter de me fabriquer une poche avec un sac plastique.

Suntripeurs, prévoyez un récipient pratique à atteindre pour récupérer des aliments de type raisins secs, cacahuètes, biscuits pendant que vous roulez… même si la route secoue fort.

Pour l’eau j’avais bien anticipé avec ma poche à eau de deux litres et demi, fixée derrière mon siège. Je pouvais boire facilement. Je pourrais améliorer l’attache, le scratch en hauteur marche bien tant que la route ne secoue pas trop. L’eau reçoit les rayons du soleil et chauffe rapidement. Pour garder un peu de fraîcheur j’avais fabriqué une housse à partir de ma chiffonnette de nettoyage des panneaux photovoltaïques. Un soir j’ai cousu les deux bords pour en faire une housse que je trempais dans l’eau au départ de l’hôtel et que je mettais autour de la poche à eau. Je perdrais la housse proche de la fin du voyage, encore un truc que je perdrais sur la route.

Avant le départ, on m’avait posé la question de la bouteille pour filtrer l’eau. Clément Roussillon m’en avait offert une. J’ai hésité à la prendre pour cette raison. Mais elle est lourde et prend de la place. Comme j’ai trouvé de l’eau en bouteille tout le temps je ne regrette pas l’avoir laissée à la maison. J’avais par contre emmené avec moi des cachets pour traiter l’eau… que je n’utiliserai pas, mais c’est léger et ne prend pas de place.

Pour les restaurants, j’ai pris l’habitude de demander toujours la même chose. Un plat de pâtes avec des œufs. Une fois que j’avais obtenu ce plat, j’en avais gardé une photo pour montrer au restaurant suivant. Ou bien suivant les plats qui étaient présents (on ne trouve pas des pâtes de partout), je prenais ce qu’il y avait après avoir fait le tour des tables et pris une photo d’un plat qui me plaisait… parce que dire ce qu’on veut en regardant le tableau ou la carte, tout écrit en cyrillique ou en sinogrammes. Là tu te dis que tu aurais dû mieux travailler tes cours !

Une carte difficile à lire pour un Français non converti aux sinogrammes
Une carte difficile à lire pour un Français non converti aux sinogrammes

Je n’ai sauté aucun repas. J’ai parfois mangé un peu trop, parfois pas assez équilibré. Je pense en particulier aux nouilles sèches précuites qu’on trouve dans une grande boite qui sert de récipient. C’est typiquement ce qu’on trouve le long des autoroutes dans les magasins des aires de repos. On remplit le récipient d’eau chaude. Il y a des distributeurs d’eau chaude un peu partout en Chine. Un Chinois avec sa bouteille thermos pleine d’eau chaude fait partie du paysage, comme nous avec une baguette de pain.

Je pense avoir mangé une fois du chameau sans le savoir, mais vu l’odeur du truc qui me rappelait celle des rencontres avec quelques chameaux je crois bien que c’en était ! Pour le mouton, qui par malheur s’est retrouvé un soir dans mon assiette… là je n’ai pas pu !

Avec les jeunes, qui sont végétariens (au minimum), je découvrirai le savoir-faire chinois en guise de préparation de tofu et légumes. Chaque légume étant accompagné d’une sauce différente. Je crois que ces jeunes gens engagés porteront un coup à ma façon de manger à mon retour dans la vie habituelle. Je ne mange depuis presque plus de viande… mais encore un peu de thon en boite et du saucisson. Chacun ses limites. J’en connais un qui craquait avec plusieurs boites d’Oréo chinois par jour.

Boite d’Oréo que j’avais promise à Jack s’il me permettait de le rattraper !
Boite d’Oréo que j’avais promise à Jack, s’il me permettait de le rattraper !

Je pourrais encore mettre de nombreuses photos, mais je n’en ferai rien. Je retiens que les repas sont abordables, que les prendre auprès des restaurants à ciel ouvert sur la route permet de gagner du temps et de rencontrer des autochtones plutôt accueillants et curieux. Au Kazakhstan, un chauffeur ira jusqu’à me payer mon repas du soir.

Pour les fruits il faudra parfois trouver un marchand ambulant pour pouvoir en acheter.

Stop, contrôle !

— Vos papiers s’il vous plaît ! (message parlé en anglais ou juste compris par la gestuelle)

Le rapport aux forces de police, en plus du passage aux frontières, sera inévitable en Chine et plus particulièrement dans la zone nord jusqu’à Urumqi pour situer une fin de contrôles fréquents.

Pour la petite histoire, les douaniers sont parfois accompagnés de douanières curieuses des Suntripeurs et fort sympathiques. Si cela peut vous aider à moins appréhender les postes frontières… Il n’en reste pas moins qu’il est préférable d’éviter la prise de photos, j’ai testé pour vous !

Dès l’entrée dans la ville de Khorgos, en Chine, une fois passé la surprise de la modernité de la ville, ce qui surprend c’est l’omniprésence militaire et policière. Véhicules blindés, voitures de police un peu partout, accès aux pompes à essence barricadées, les camions font la queue et passent les uns après les autres après contrôle du véhicule. Cela va jusqu’aux entrées dans les hôtels où on doit, comme dans les aéroports, passer ses affaires sur le tapis du scanner. Une personne de l’hôtel, vous scanne avec son appareil portatif. Il porte un gilet pare-balles, qu’il retirera une fois sa période sécurité passée pour le repasser au remplaçant. J’imagine que les employés doivent passer une formation pour avoir ce rôle.

Sur la route un contrôle tous les cinquante kilomètres n’est pas anormal. La durée d’arrêt pour vérifier vos informations d’où on vient, où l’on va, est très variable… et très élastique. Un coup d’œil dans le meilleur des cas jusqu’à plusieurs heures dans le pire. Les policiers sont courtois et vous offrent à boire lorsque l’attente de la validation s’éternise.

On vous demande de garer votre véhicule solaire ? Mieux vaut exposer ses panneaux au soleil, histoire de ne pas tout perdre sur la journée de pédalage. Je n’aurais pas la chance de profiter de ces moments pour recharger suite à la perte de ma canne télescopique en Russie, car il me faut m’appuyer sur un poteau ou un mur et qu’en général il y a toujours une zone d’ombre à proximité.

Un policier avec qui j’ai continué à échanger via WeChat
Un policier avec qui j’ai continué à échanger via WeChat

La tenue policière n’est pas ce qu’on préfère rencontrer sur la route, car souvent source de ralentissement. Encore plus s’il vous arrive une histoire comme la mienne. Un soir, à l’hôtel, au retour du restaurant, l’hôtelière m’annonce que des amis à moi (c’est ce que le traducteur affiche) veulent me voir. Je remonte dans la chambre, me demandant quels Suntripeurs pouvaient m’avoir rattrapé, Romàn peut-être si sa balise GPS ne fonctionnait plus et que sur la carte l’indication était fausse, ou tout un groupe, ou quelqu’un de l’organisation ? En fait non, on m’a fait descendre pour rencontrer ces fameux amis qui n’étaient autre qu’un groupe impressionnant de policiers. Un policier du groupe me demande s’il peut accéder à mon smartphone. Je ne vois pas pourquoi mais je pense tout de suite à l’application pour lancer le VPN, elle n’est pas active sur le moment et est présente dans un groupe d’applications, donc pas visible au premier regard. Est-ce cela qu’il cherche ? Je déverrouille avec le doigt ou je n’ai rien à faire, je ne sais plus, car sur la route, pour éviter de ressaisir le code j’ai pris l’habitude de retirer la sécurité. Je la remets en général lorsque j’arrive à un logement. Je prends cette précaution de sécurité car j’ai plusieurs fois oublié mon téléphone. Sur le vélo lorsque j’allais faire des courses, sur le bureau ou la table de nuit lorsque je sortais pour les courses. En général je m’en rendais compte rapidement et retournais illico récupérer mon indispensable compagnon électronique.

Check-list avant de sortir se balader : avoir sur soi papiers d’identité, argent, smartphone verrouillé et mémorisation de la localisation du lieu pour le retour.

Le policier veut en fait voir les photos. Il commence à regarder les premières puis fait défiler l’historique. Il repasse le voyage en sens inverse, voit ma vie en France… heureusement que je n’ai pas ce smartphone depuis cinquante ans sinon il remontait à ma petite enfance ! Apparemment il n’a rien trouvé et passe l’appareil à un autre policier qui, lui, semble regarder les applications installées… et il y a en a beaucoup. Il zappe et me rend l’appareil avec un message du genre « Désolé du dérangement, bonne continuation. »

J’en parlerai à François qui me dira que pour lui c’était juste pour la frime.

Ce qui me surprendra le plus ? Le comportement de l’hôtelière. Lorsque j’arrive, elle est toute contente d’avoir un client, étranger en plus cela met un peu de piquant. Puis arrivent les policiers et là je deviens le vilain terroriste potentiel, l’égard que j’avais disparaît du coup, pour revenir au sourire un peu hypocrite lorsque je redeviens le gentil touriste au départ des policiers. Comportement peut-être naturel, mais accompagné d’une étrange curiosité, elle regardait les photos en même temps que le policier et personne ne lui a demandé d’aller voir ailleurs (ce n’est pas l’envie qui me manquait, mais dans ce contexte tendu j’ai préféré faire profil bas !).

J’apprendrai à me frotter aux policiers et je n’aurai pas de scrupule à leur demander de l’aide, pour soit être hébergé aux abords de leurs locaux ou carrément dans leurs locaux, soit pour m’aider à trouver un logement dans une zone sans hôtel. J’ai pu trouver plus facilement un soudeur en Chine lorsque j’étais accompagné d’un policier. Ils vivent dans des logements simples, toilettes à la turque. Après contrôle d’identité, de qui j’étais et ce que je faisais je recevais de l’aide.

Le policier chinois peut être votre ami

J’en ai plusieurs avec qui j’ai gardé contact pendant tout le trajet, des échanges via WeChat. L’application permet la traduction français-chinois. Il est à noter que la traduction anglais-chinois est meilleure.

Agents d’autoroute qui m’ont accueilli pour la nuit dans leurs locaux
Agents d’autoroute qui m’ont accueilli pour la nuit dans leurs locaux

Sentiment de peurs

— Laurent, est-ce que tu as eu peur ?

Vous avez déjà été dans une forêt la nuit ? Tout seul ? La peur qui nait uniquement des idées que l’on se fait ? Un petit bruit et c’est la fin du monde ? C’est ce que j’appelle la peur du petit enfant.

Une autre peur vient parfois après une expérience malheureuse, une chute par exemple. La peur survient dans les moments où on sent ou pressent que le même malheur va se reproduire.

C’est deux types de peurs je les ai eues.

La première lorsque le soir arrivait et que je me faisais peur tout seul à me demander si j’allais trouver un logement.

— Et si je ne trouve rien et que je dors au bord de la route, est-ce qu’il n’y aura pas quelques abrutis pour venir me chahuter ?

Avec mon véhicule tout en longueur qui n’est pas très maniable pour se faufiler au fin fond d’un bois (lorsqu’il y en a), il est difficile de passer inaperçu. C’est une peur de petit garçon basée comme celle que j’avais ressenti, en forêt, lors de mon unique chasse au dahu. La chasse à l’animal imaginaire (seul le chasseur n’est pas au courant qu’il n’existe pas) où un groupe d’ami-e-s a pris le temps en journée de vous faire croire en sa rareté et donc à l’argent possible à qui l’attrape. Pour cela il faut se rendre dans la forêt, la nuit, avec un sac en toile. L’animal adore le noir et devrait être attiré dans le piège, qu’il faudra refermer dès qu’il y entrera et c’est là qu’on compte sur vous. La peur imaginaire dans le noir, je connais et j’ai appris à m’en méfier, à tenter de la maîtriser par le raisonnement et la respiration contrôlée. Mais cela n’empêche pas au cerveau d’avoir des bouffées de peurs du même type qui se produisent en soirée sur une route perdue au fin fond du Kazakhstan.

L’autre peur, celle toute bête d’avoir une roue qui crève encore une fois. L’expérience malheureuse qui se répète plusieurs fois dans la journée ! Un peu de mou ressenti au niveau du pneu et c’était le doute sur la survenue d’une nouvelle crevaison. Après une crevaison il m’arrivait de m’arrêter plusieurs fois pour rien, avec la peur de constater que le pneu se dégonflait encore une fois. Cette petite peur qui peut faire rire devient bien plus grande lorsqu’il n’y a plus la place sur la route pour s’arrêter en cas de recrevaison.

Je me souviens d’un tronçon de route où j’ai serré les fesses et peut-être même fait une prière (ce qui n’est pas bon signe chez moi, je suis athée, influence Chrétienne par mes ancêtres). Imaginez le vélo solaire sur une route deux fois deux voies sans bande d’arrêt d’urgence. Pas très confortable mais jouable, en cas d’arrêt les véhicules pourront continuer à doubler. Mais voilà que pour cause de travaux, la route passe à deux voies double sens. Le trafic est intense avec de nombreux camions et toujours pas d’espace où se placer en cas de crevaison. Les véhicules en face de vous foncent et ceux derrière restent collés à votre remorque faute de pouvoir doubler. La crevaison dans un moment pareil, un cauchemar… Ça n’est pas arrivé, mais j’ai eu peur que cela se produise tout le long du tronçon.

Certains tunnels apportent le même sentiment de peur. Mal éclairés et sans piste d’urgence, il faut se fier à ses lumières, ne pas traîner et ne pas crever.

Maintenant que je repense au sentiment de peur, il me faut vous parler d’une ville qui m’en a procurée. C’est arrivé au Kazakhstan, juste quand je commençais à prendre mes marques, à être à l’aise. J’arrive dans la ville, je commence à la traverser pour trouver un hôtel. Les habitations, d’abord. Elles me font une drôle d’impression. Il y en a de somptueuses et juste à côté des délabrées, comme abandonnées. La ville est tout en longueur, un peu à l’écart de la voie rapide. La ville m’a fait penser au film Il était une fois dans l’Ouest qui montre l’arrivée du train dans la civilisation. Des villes qui étaient prospères périclitent tandis que d’autres naissent. J’ai eu l’impression que cette ville périclitait, qu’elle n’était plus traversée par le flot de la circulation. Ce sentiment a été renforcé par le contact avec les autochtones. Certains me répondaient avec un entrain excessif et d’autres me fuyaient. Du jamais vu avant ni après cette ville.

— Oui, il y a un hôtel par-là, on vous accompagne

Un groupe pour m’accompagner ? Pas confiant le Laurent. Et l’hôtel ne sera plus en service. Je chercherai en vain un hôtel. Pour dormir, je ne sortirai pas de la ville car il n’y avait rien pour s’abriter. Vu l’état de certaines maisons, je poserai la tente derrière une maison délabrée, inhabitée. Dans la nuit j’entendrai le muezzin lancer sa prière, pas très fort mais l’unique que j’entendrai de mon voyage. Je me demandais si en plus d’une baisse économique il n’y avait pas un changement de culture. Les panneaux de la route avaient trois écritures : cyrillique, latine et arabe et c’était assez rare. Les russophiles face aux kazakhophiles ?

J’étais content de quitter la ville au petit matin.

Un regard en soirée lors du stress montant
Un regard en soirée lors du stress montant

Jamais malade ?

Il est vrai que je ne suis pas souvent malade dans la vie. Mais sur un tel voyage il est préférable d’envisager les petits maux de ventre liés aux changements d’environnement. Pour palier le plus possible aux problèmes, dès le moment où je suis passé à l’eau en bouteille plastique, j’ai également bu du coca-cola ou équivalent. Je trouverais les deux boissons partout et j’arriverais souvent à en boire de la bien fraîche (je sais ce n’est pas conseillé mais c’est trop tentant). L’eau pour la route et le coca pour les pauses plaisir.

J’ai été un peu chahuté au ventre pendant une dizaine de jours mais très légèrement. Mais le soir où j’étais hébergé gracieusement dans l’hôtel de Kyzylorda, j’ai passé quasiment une nuit blanche. Tantôt assis sur les toilettes, tantôt devant, la tête en position « attention ça va sortir ». La journée suivante sera vraiment difficile, la pire au niveau physique de tout le parcours. J’ai trouvé ce jour-là que le soleil tapait plus fort que d’habitude, j’avançais avec difficulté. J’ai dû trouver refuge dans un cimetière musulman pour me reposer une heure. Il n’y avait de l’ombre nulle part ailleurs et le regroupement de petits mausolées en offrait. Je suis désolé si j’ai enfreint une règle.

Un autre souci qui ressemblait beaucoup au même problème rencontré par Yann, une tendinite. J’ai suivi ses conseils pour relaxer le plus possible au moment des pauses, en roulant une bouteille sous le mollet. Et j’ai plié le talon de la chaussure qui m’incommodait pendant plusieurs jours, le temps du retour à la normale.

Les gros orteils me provoqueront des fourmillements qui persisteront six mois après la fin du voyage.

A mon retour, je ferai une escapade avec Christel au Portugal. J’avais du mal à la suivre à la marche à pied, le temps que les muscles prévus pour cette activité se remettent en fonction.

Et quelques mois plus tard j’ai constaté une augmentation de mes acouphènes à l’oreille gauche, celle côté route. J’ai perdu sur les fréquences au dessus des quatre mille hertz. Je ne peux pas dire que cela est lié au volume des klaxons, j’ai juste un doute. Je préconise donc un bouchon d’oreille pour la plus exposée aux klaxons. Il faut pouvoir rester en vigilance auditive, en placer sur les deux oreilles serait dangereux.

Ce que j’ai préféré

— Tu as préféré quoi dans ton voyage ?
— Bonne question… laisse-moi réfléchir encore un peu !

Ce que j’ai préféré c’est surtout d’avoir intégré un projet un peu fou, de m’y être accroché et d’avoir été jusqu’au bout. C’est un plaisir très personnel que je sais devoir en partie à une multitude de personnes. J’en suis fier et redevable.

Ensuite vient le plaisir de me confronter aux éléments, ressentir la terre telle qu’elle est au moment où je la traverse. L’invitation à la réflexion sur les trajets plats, prendre le temps de repenser à son passé, à ses actes, à son avenir. Les moments de solitude qui amènent parfois à pleurer tout seul, surtout lorsque dans sa liste musicale passe une musique triste, ou au contraire à prendre un coup de speed avec un bon rock qui dépote. On peut être n’importe quoi dans ces moments, se prendre pour un agent secret qui apporte une information capitale à l’aide de son bolide d’après fin du monde, en autonomie imposée par la destruction des lignes électriques… On peut devenir fou si on reste un peu trop tout seul, non ?!

Le plaisir des rencontres, qui fait toujours un peu peur au départ mais qui laisse souvent un bon souvenir. La confrontation à l’humanité hors de ses frontières et sans passer par une agence de tourisme. Cette impression d’être un habitant du monde, qu’on pourrait vivre n’importe où si on le voulait… (C’est juste une impression car la réalité administrative reviendrait vite).

J’ai aimé les plats de pâtes aux œufs que je dévorais le soir après une rude journée.

Pour situer des moments plus concrets, comme un endroit qu’on pourrait mettre dans un guide touristique, je peux citer la traversée de la Volga par le pont qui m’a semblé immense. Pour moi il représente le franchissement de l’Europe vers l’Asie. Un changement de climat.

Je peux également indiquer la frontière Kazakhstan - Chine à Korghos, d’un côté l’archaïsme des contrôles et de l’autre la modernité avec scanner pour contrôler l’intérieur des camions (et n’oubliez pas de passer au scanner le vélo sinon vous ne pourrez pas passer le poste de sortie) ! Le passage d’une petite ville à une ville moderne. Deux mondes différents côte à côte.

Et peut-être de façon égocentrique, le plaisir d’avoir été suivi sur Facebook ou sur le site du Sun Trip par un groupe de personnes dont certaines me disaient que je les faisais rêver.

Les jeunes trop content de voir Silky One et un cycliste
Les jeunes, trop content de voir Silky One et un cycliste

Guangzhou la fin du voyage

22 août 2018

— On voit que tu es content d’être arrivé à Guangzhou (Canton) !

La joie d’être enfin arrivé et d’avoir réalisé la totalité du voyage (ma femme adore cette photo)
La joie d’être enfin arrivé et d’avoir réalisé la totalité du voyage (ma femme adore cette photo)

Oui j’étais content d’être arrivé. La dernière journée avait été plus longue que prévue. Je finirai la batterie complètement à plat au lieu de rendez-vous, dans un parc municipal qui grimpe.

Ne vous attendez pas à vous reposer les derniers jours proches de Canton. Garder de la réserve jusqu’au dernier kilomètre.

Le repos se fera dans un hôtel grand luxe. Chambre individuelle et petit déjeuner, gracieusement offert par Lingnan Hotel, avec coupe de fruits dans la chambre ! Trop bien pour le final.

J’aurais pu en profiter pour visiter Guangzhou avec ma femme… si elle était venue me rejoindre. Ou bien rester quelques jours avec l’équipe du Sun Trip et les Suntripeurs toujours présents pour présenter notre voyage lors de cérémonies organisées. Malgré la demande de Florian de me voir rester encore quelques jours de plus, je n’ai pas tardé à repartir.

Le dernier hôtel
Le dernier hôtel

Le 66e jour j’ai passé la journée à emballer Silky One. L’air de rien il y avait pas mal de boulot. Commencer par trier les affaires à ramener par avion ou à laisser dans la remorque. Puis le démontage et emballage de Silky One. Et ne pas oublier de recharger la batterie avant de repartir pour quelle conserve un peu d’énergie pendant sa longue période de stockage avant retour à la maison.

— Et comment as-tu rechargé ta batterie vu que tu n’avais pas emmené ton chargeur ?

Herman m’a prêté le sien. Ne pas en avoir m’a permis un gain de poids et m’a évité d’être tenté de l’utiliser pendant le voyage.

Pour réduire la taille du vélo et donc du colis, il fallait démonter les panneaux photovoltaïques, les cadres en acier, le guidon, la roue. Un colis pour le vélo, un autre pour la remorque et un dernier pour les cadres et panneaux photovoltaïques. J’y ai laissé une partie du cadre qui était sur le vélo, les bras en Y étaient en partie cassés, j’ai fini par achever les soudures qui tenaient encore. Le mieux aurait été de prévoir une accroche entre les montants et les cadres afin de pouvoir démonter proprement et avoir un colis plat. Les panneaux photovoltaïques ont été protégés en mode sandwich, les panneaux au milieu suivi d’une première couche des cadres en acier pour finir par les cartons et le plastique élastique.

Quelques mois plus tard, après le voyage en camion-train-camion j’ai retrouvé les trois colis bien emballés et intacts.

Le 67e jour, le déluge tombait, la mousson commençait et j’étais bien heureux d’avoir fini le voyage. J’ai plaint les Suntripeurs qui étaient encore sur la route. Le soir venu, j’ai pu dire un dernier au revoir à Florian, Angélique et tous les Suntripeurs encore présents.

Silky One un repos bien mérité à l’hôtel Lingnan après un petit nettoyage
Silky One, un repos bien mérité à l’hôtel Lingnan, après un petit nettoyage

L’après Sun Trip

23 août 2018 en soirée

— Me voilà à nouveau seul !

Oui mais pas pour longtemps et dans un avion à destination d’Istanbul en Turquie, non pas dans un esprit de boucler la route de la soie, mais plus pragmatiquement pour le coût du transport. Pour quatre fois moins cher que le prix d’autres vols plus direct, j’aurai droit à quelques heures de pause à l’aéroport d’Istanbul.

Quelques heures pendant lesquelles je tenterai de dormir un peu sur des fauteuils qu’il est assez difficile de trouver. On vous invite plutôt à profiter des espaces commerciaux, des espaces restaurants que j’ai fini par fréquenter avec une certaine volupté. Le début du retour à l’excès de nourriture ! En deux mois j’aurai repris mon poids porte bonheur chinois.

Le retour en famille

24 août 2018 en soirée

A l’aéroport de Lyon Saint-Exupéry, une petite troupe est venue m’accueillir, ma femme, ma mère, mes enfants et quelques ami-e-s avec banderole pour bien marquer le coup.

Je n’avais aucun cadeaux à offrir de mon voyage, juste des souvenirs à partager et des bricoles achetées en urgence à l’aéroport de Canton.

J’ai pu retrouver le calme et le confort de la maison. La complicité d’un couple et la chaleur d’une famille proche. Petite ombre au tableau toutefois, et c’est peut-être un petit prix à payer pour laisser sa femme un laps de temps aussi important… un nouvel arrivant est venu agrandir la famille pendant mon absence, parait-il pour la combler. Jingle, un grand chien noir efflanqué, récupéré à la S.P.A., qui partagera maintenant la garde de la maison avec Mocka et avec qui je devrai apprendre à vivre… Moi qui adore les chiens !

Comité d’accueil à l’aéroport Saint-Exupéry
Comité d’accueil à l’aéroport Saint-Exupéry

Les liens avec les Suntripeurs

Vivre près de Lyon était un avantage pour se rendre au point de départ de l’aventure. De même pour récupérer Silky One, que j’attendais avec impatience.

Comme j’étais à vingt minutes en voiture du site Bel Air Camp, à Villeurbanne, lieu de stockage des vélos, j’ai pu aider Florian à débarquer les vélos des camions pour les entreposer sur le site et repartir dans l’heure avec mon compagnon d’aventure.

Dans les jours qui ont suivi, avec ma femme on a pu offrir le gîte et le couvert aux Suntripeurs qui venaient chercher leur vélo. C’est avec grand plaisir qu’on a pu continuer à partager autour du Sun Trip avec Bernard Cauquil dans un premier temps, puis la fine équipe composée de Cathy Pozzobon, François Médalle et Gilles Coural. J’ai pu également revoir sur Lyon Eric Morel le moment d’un repas.

Eric Morel de passage à Lyon pour récupérer son trophée
Eric Morel de passage à Lyon pour récupérer son trophée

Le courant est passé avec les Albigeois, et notre déplacement à Albi pour assister à la projection du film de Jean-Claude Viguier sur son voyage du Sun Trip, a été l’occasion de profiter de leur hospitalité à notre tour.

Le regard des ami-e-s

J’ai présenté le voyage du Suntrip lors d’un week-end des Talents Locaux, où l’artisanat local rencontre son public. J’avais un stand et j’ai rencontré du monde. Des gens que je connaissais déjà et d’autres qui me découvraient pour la première fois.

Pour les personnes qui me connaissaient, le retour auprès de ma femme a été du genre :

Ton mari est plus ouvert, il est transformé

Le voyage de ce type transforme. Il y a trente-cinq ans c’était déjà le cas, lorsque j’avais réalisé mon voyage d’un mois à vélo en solo sur un trajet Paris-Hollande-Paris. Mais là, la durée et les zones traversées ont apporté un peu plus de transformation. Et ce n’était qu’un voyage de 65 jours !

J’imagine très bien qu’un voyageur ou une voyageuse, comme il en existe et que je suis de loin, qui partent plusieurs années, ne puissent plus revenir à leurs habitudes d’antan, à leur travail qu’ils avaient quitté.

Dans mon cas, le retour a été possible, même si un léger détachement s’est opéré, la reprise n’a pas été difficile. C’est même plutôt le contraire. J’apprécie le confort de la routine, du cadre et du type de travail que je réalise. Cogiter sur des lignes de code m’apporte pas mal de satisfaction. Si en plus le projet est utile c’est encore mieux !

C’est une vraie chance de pouvoir partir trois mois et de revenir à son poste, avec des collègues qui vous attendent, un bureau en suspens. Je plébiscite le compte épargne temps.

Je me sens plus fort, moins stressé par le travail, plus sûr de moi. Il était temps n’est-ce pas ? Lorsque j’ai réalisé les derniers trajets en compagnie des jeunes, Auguste & Camille les Belges et Jack l’Anglais, je me suis dit qu’ils avaient bien de la maturité ces jeunes et que l’avenir s’ouvrait à eux ! Un conseil donc, n’attendez pas pour aller à la découverte du monde… d’avoir cinquante ans ou plus ! Mais si vous n’avez pas pu, n’hésitez pas non plus à le faire sur le tard !

Comme je le dis toujours on n’a qu’une vie.

Martine Mass grand sourire
Martine Mass, grand sourire

Quelle aventure pour la suite ?

— Alors, Laurent tu repars en 2020 ?
— C’est quoi ton prochain voyage ?

J’ai eu droit plusieurs fois à ces questions.

Je ne ressens pas le besoin de refaire ce trajet, ni de refaire un trajet en solitaire vers une autre destination.

Par contre je serais partant pour un périple en couple ou à plusieurs, prendre le temps de visiter lors du voyage. Pouvoir passer plus de temps pour échanger avec les personnes qu’on rencontre. Pouvoir accepter plus d’invitations à discuter et partager. A l’image du couple de Cyclomigrateurs qui arpentent le monde à vélo et font découvrir leurs voyages avec une quantité impressionnante d’informations et de photos.

Pour cela j’ai commencé à préparer le terrain. Ma femme et moi avons trouvé un trike d’occasion sur lequel on a ajouté un moteur électrique pédalier, un Bafang. J’y ai ajouté une des deux batteries de Silky One ainsi que le cadre solaire (avec le nouveau cadre refait par Patrick).

Mais le voyage en couple n’est pas pour tout de suite. Une grande surprise est tombée à noël 2018. Lucie notre première fille, nous a annoncé l’arrivée de jumelles pour fin juillet 2019 !

Au moment où je reprends ces lignes, Jade et Lou ont maintenant plusieurs mois et l’organisation s’est centrée autour d’elles. L’aventure de mamie et papy à vélo attendra un peu. Une autre aventure plus familiale et intime est en cours. On s’imagine très bien, d’ici quelques années, rouler à vélo cargo avec lequel on pourra promener les petites filles. Des petites balades en perspective à défaut de grands périples.

Lou et Jade pré-inscrites pour le Sun Trip 2040
Lou et Jade, pré-inscrites pour le Sun Trip 2040 :-)

Si je repartais je changerais quoi ?

— Imagine que tu repartes, tu changerais quoi ?

Si je repartais pour le Sun Trip 2020 ou 20xx, je verrais à être plus léger encore et plus robuste en même temps. Et j’aimerais que la communication soit de meilleure qualité.

Aujourd’hui encore, je reste impressionné du nombre de personnes qui m’ont suivi, moi, mais également l’épreuve du Sun Trip dans son ensemble. Pas forcément au quotidien, mais en suivant les grandes lignes de ce voyage un peu fou. Et il y a aussi ceux qui pourraient presque vous suivre 24h/24h si on avait les moyens de le faire. Avec l’arrivée progressive de la 5G et des forfaits illimités qui pourraient suivre, il n’est pas impossible que le Sun Trip 20xx puisse en profiter.

Mais il est difficile de préparer son parcours du lendemain, de manger, se laver et communiquer avec qualité avant d’aller se coucher. Pas complètement impossible non plus, mais j’aurais préféré avoir un intermédiaire qui aurait retouché mes photos et vidéos. Et la publication des articles, j’aurais préféré qu’ils soient publiés sur le site web J’me Recycle afin de toucher encore plus de personnes. Facebook, Twitter, Instagram et WeChat serviraient de relais en plaçant le lien de l’article. J’avais emmené la version Wordpress sur mon mobile pour tenter cette approche d’édition du site, mais avec un mobile c’est vraiment trop difficile.

Retoucher la communication c’est le travail que fait l’équipe du Suntrip tout au long du voyage. Mais parfois on aimerait faire la même chose avec notre point de vue. Donc pouvoir compter sur un ami ou un service communication pendant son trajet est à mon avis un plus dans la valorisation de son voyage.

Regarder ce qu’a pu faire Jack en 2018 avec les vidéos de drone, cela laisse une marge d’expression entre le texte, les photos et les vidéos vue du ciel.

Si vous voulez communiquer efficacement avec des outils que vous aurez avec vous, sur mobile ou ordinateur portable (ou autre), entraînez-vous avant le départ, après le temps défile.

Pour le vélo, je resterais sur le même modèle que Silky One. Je ne me vois pas partir avec un trike, ni en position VTT même si j’avais bien apprécié le vélo cargo d’Eric. Par contre il faudra que, soit je retravaille ma souplesse de dos, soit je révise l’assise de l’Azub Six pour le bas du dos.

Je prendrais moins de panneaux solaires et je retravaillerais la connectique afin d’être plus sûr de mes branchements. Les connecteurs Anderson et mes soudures sur les panneaux photovoltaïques pourraient être plus robustes à mon humble avis.

J’économiserais un peu mieux la batterie le soir en éteignant la Databox et le Cycle Analyst en ajoutant un interrupteur global (j’avais trop la flemme d’ouvrir la sacoche pour décrocher le câble… ou la crainte d’abîmer la connectique).

Je reverrais également le cadre pour pouvoir incliner les panneaux en roulant, le matin on peut gagner des centaines de watts.

Je prendrais un mobile de secours car j’ai bien eu peur lorsque une ou deux fois je ne voyais plus rien à l’écran du mobile… C’est juste le couteau suisse numérique, je ne me verrais pas faire le trajet sans. Lorsqu’il était impossible d’obtenir du réseau pendant plusieurs heures… c’était assez stressant.

J’emmènerais également un pneu avant et arrière de remplacement et un bon paquet de chambres à air linéaires.

Je prendrais une bombe pour repousser les chiens ou un autre truc à tester avant (le problème c’est qu’il faut trouver un chien agressif dans le quartier et être assez méchant pour tester… toujours pas testé donc).

Pour réduire le poids je n’emmènerais pas de réchaud à essence comme j’avais, trop lourd de transporter de l’essence qui sert peu.

Par dessus tout j’aimerais être accompagné de Christel, quitte à arriver le dernier.

Christel et Laurent complices
Christel et Laurent, complices

J’me Recycle se recycle !

Janvier 2019

— Je fais quoi maintenant de l’association J’me Recycle ?

Maintenant qu’on sait que je ne vais pas repartir pour le Sun Trip 2020, ni un autre type de voyage avant peut-être trente-cinq ans comme je m’amuse à le dire, alors que faire de l’association loi 1901 J’me Recycle ?

Je clos l’association ou je passe à autre chose dans la continuité ?

Lors de la préparation j’ai été séduit par l’atelier d’auto-réparation de la P’tite Rustine de Bron. Pourquoi ne pas tenter à mon tour de proposer la même activité ?

C’est ainsi que j’ai tenté de mettre en marche un atelier d’aide à l’auto-réparation de vélo sur Saint-Bonnet de Mure. D’abord chez moi, puis sous un kiosque au centre-ville pour revenir à la maison à l’arrivée de la mauvaise saison.

A l’automne 2019, je ne sais pas si je vais continuer sur cette activité sur Saint Bonnet de Mure.

Et pourtant je sens l’urgence à aider les personnes à reprendre le vélo, à savoir se dépanner rapidement avec quelques outils et peut-être aller plus loin pour certains, très loin même.

Affaire à suivre…

Christel tient la bannière J’me Recycle Atelier
Christel tient la bannière J’me Recycle Atelier

Remerciements

Depuis le début

— Merci à toutes et à tous de m’avoir encouragé, de m’avoir soutenu et de m’avoir suivi

Quand je prends mon vélo pour aller au boulot, combien de fois je jure par jour ? Combien de fois j’ai la haine qui me monte au nez ? Trop souvent c’est sûr.

C’est comme ça que j’avais démarré mon parcours, mais c’est sur des tonnes de remerciements que je voudrais finir.

Merci d’abord à Florian et son équipe qui nous a permis à quelques dizaines de folles et fous de passer du rêve au voyage Lyon-Canton en moins de 100 jours en mode autonomie sans assistance. Mon doux rêve n’aurait pas été accompli sans eux.

Merci à ma femme et ma famille proche qui a toujours su renforcer ma motivation lorsque le doute m’assaillait, le doute avant et le doute pendant. Un éternel remerciement à Christel qui a su maintenir le lien WeChat même lorsque j’étais à quatre heures du matin, heure française, à lui demander de l’aide sur un parcours ou la recherche d’un lieu d’hébergement… Oui je n’ai pas toujours été très cool !

Un grand merci à Patrick Gouttenoire qui dès le début a cru en moi (plus que moi) qui a su me rassurer sur la poursuite du projet par son talent de soudeur et qui m’a soutenu jusqu’au bout.

Merci à tous les amis qui ont cru dans ce pari et qui voulaient en être à leur façon, par des encouragements et du soutien de toute sorte. Des amis que j’ai découvert pour l’occasion et il s’avère que ma vision était trop restrictive en la matière. Ce sont les occasions qui manquent probablement pour déclencher l’envie d’aider ou de partager. Ce voyage a été l’occasion pour eux d’exprimer leur amitié et leur assistance que je n’imaginais pas pouvoir exister. Merci du fond du cœur.

Merci également à mes collègues que j’ai saoulés pendant un an de préparation. Il m’ont dit qu’ils avaient allumé l’ordinateur du bureau, chaque matin au moment du café, pour suivre l’évolution de mon parcours sur la carte du Suntrip. J’imagine très bien les échanges :

— Mais que fait-il ?
— Il décroche ? Pourquoi il n’avance pas ?
— Super, il gagne une place !
— Wouha, il a rattrapé les jeunes !
— Pas mal, il a réussi à finir sixième avec Jack

Plus de deux mois à suivre un parcours, on peut se lasser, partir en vacances, mais c’est aussi une bonne occasion d’échanger sur la géographie, le temps qui passe… et la persévérance ! Persévérance de ceux qui font le voyage mais persévérance également de ceux qui suivent. Et des suiveurs il y a en a eu plus que je ne pensais, j’en découvre encore un an plus tard !

Merci à Clément Contet et Jérôme Mermet-Burnet qui m’ont fait un retour de lecture. J’ai pu ainsi corriger un grand nombre de fautes d’orthographe, de grammaire, d’oublis… (mise à jour du 28/12/2019).

Merci à tous les inconnus, ceux que j’ai croisé sur ma route, qui m’ont soutenu d’un regard ou d’une aide. Ils se reconnaîtront s’ils tombent sur ce texte de remerciement.

PG Soudure, Starterre, C2AI, Solbian, Azub, EDF, Bel Air Camp, La Grange Aux Crêpes, Click-Stand, Catherine Biessy, Jocelyne Brissaud, Association Les Talents Locaux, Jeannique et Thierry Martinez, Marc Jay Opticiens, Association Cœur de Ville Murois, Florence Artolle, Marie et Laurent Gillot, Ophélie Brissaud, B. Mangon Optic, Rosanne et Antoine Ciletti, Annick et Benoit Pfister, Dominique Césari, Martine Mas, Florence Louat, Jérôme Laffitte, Thibaut Despoulain, Tilou et Jean-Paul Combaz, Alexandre Driss, Jérôme Laurent, Thomas Lepoutre, Frédéric Brousse, Marc Chalvignac, Agnès Bacconnier, Jean-François Fichet, Laurent Knoll, Denis Belmont, Denis Gounelle, Jean-Marie Clair, Eric Mangeat, Clément Roussillon, Casino, Christelle et Stéphane Ciletti Beyssac, Reine et Bernard Pavo, Fabienne et David Pleynet, Loïc Robitail, Gérard Thuillier, Wendy (professeure de Chinois comme le nom ne l’indique pas !), Michèle Filleton, Patricia Ribes Casella, Patricia Requier, Aline Mostachetti

Jusqu’à Canton j’ai pris soin de nettoyer la remorque
Jusqu’à Canton j’ai pris soin de nettoyer la remorque

Postface

Une pluie persistante s’abat sur Kiev cette journée du 2 juillet 2018, le ciel est gris et bas à l’image de notre moral du jour. La veille en compagnie de Romain nous avons battu notre record de distance avec plus de 300 km parcourus mais ce matin au réveil Yann ressent une vive douleur au tendon d’Achille, sa tendinite s’est réveillée.

La décision de prendre une journée de repos pour soigner le mal s’impose afin de ne pas compromettre la suite de notre aventure. Le cœur serré, nous laissons Romain continuer son chemin vers la Russie en imaginant nous retrouver peut-être un de ces prochains jours sur la route…

Autour de 17h00 en rejoignant notre hôtel il me semble discerner au loin la silhouette de Laurent sur son Silky One.

— Yann, Yann, regarde là-bas juste avant le feu rouge, c’est Laurent Souchet.

On traverse la contre-allée en nous égosillant en vain.

— Laurent, Laurent, Laurent !!!!

Imperturbable même à l’appel de son prénom, fidèle à l’image que nous en avions, le regard fixé sur l’horizon, il continue sa route sans même nous apercevoir et disparaît dans les brumes humides du crépuscule ukrainien…

24 heures plus tard après avoir avalé un paquet de kilomètres dans l’espoir de refaire notre retard, plus une seule chambre disponible à l’heure du couvre-feu dans le village où nous nous arrêtons. Une lueur d’espoir nous anime quand nous apercevons un attelage solaire orange sur le parking de l’auberge déjà complète. La décision de rendre une petite visite à Laurent avec le secret espoir de partager sa chambre est vite prise. Lorsque nous ouvrons sa porte, je ne sais lequel de nous trois était le plus heureux.

En compensation du désordre que nous venons de mettre dans son organisation nous lui offrons sa première pinte de bière du parcours… Mais comment a-t-il a pu faire pour tenir jusqu’aux confins de l’Ukraine sans aucun acide aminé essentiel depuis le départ ?

Le lendemain, chacun continue de suivre sa route en conservant ses habitudes, notre tandem est ralenti par les 20km de piste et nous laissons filer Laurent avant le poste frontière vers la Russie. L’histoire de notre trio s’instaure peu à peu au gré de nos chassés-croisés quotidiens. Des occasions saisies par chacun de nous trois pour découvrir l’autre, mesurer nos différences et apprécier nos complémentarités.

Nous nous retrouvons alors à rouler de concert pour franchir le fleuve Volga et basculer de l’Europe vers l’Asie. En cette fin de journée, des liens profonds se sont tissés entre nous trois : nouveau record de distance journalière pour Laurent, suivi par un bivouac inoubliable retiré au fond d’un minuscule village non loin de Saratov.

Le soir à la veillée il nous arrive souvent de parler de la vie et de refaire le monde en nous demandant parfois ce que nous sommes bien venus chercher dans cette aventure. Nos problèmes mécaniques couperont court à l’épopée humaine de notre trio quelques centaines de kilomètres à peine après notre entrée au Kazakhstan.

Avec Yann nous avions la certitude que malgré tous les doutes exprimés par Laurent, il rallierait Canton fidèle à son tableau de marche : 200 km/jour. Avait-il d’autre choix ? Nous lui avions donné procuration pour nous représenter à Canton… Vous retrouverez ici le récit poignant d’un homme de cœur sur cette aventure hors normes. Aventure qui a permis notre rencontre et le partage de ces précieux moments qui resteront gravés dans nos esprits. Merci Laurent pour tous ces souvenirs couchés sur le papier.

Les EcoSunRiders, Yann et Bernard Cauquil

Vos retours

Je suis avide de vos retours. Vous pouvez me contacter à jmerecycle@gmail.com.

LE CRÉATEUR DU SUN TRIP S’EXPRIME SUR LE LIVRE
Vraiment, c’est super ton livre. Il y aura celui de Raf, et le tien. Deux approches différentes mais bien complémentaires. Utile pour les futurs participants.
— Florian Bailly
UN LECTEUR QUI N’A PAS PU S’ARRÊTER DE LIRE AVANT LA FIN
A cause de toi je suis fatigué. Ce matin :-):-):-) pas pu arrêter ma lecture avant la fin. En tout cas bravo vraiment sympa.
— Sun Fredybike
LE REGARD D’UN AMI SUNTRIPEUR
Un récit poignant d’un homme de cœur sur une aventure hors norme…​ Merci Laurent pour ces souvenirs couchés sur le papier.
— Bernard Cauquil
LE LIVRE, COMPLÉMENT AU SUIVI JOURNALIER FACEBOOK
J’ai fait une première lecture de ton ouvrage hier soir avec plaisir. Après le suivi au jour le jour de ton voyage sur Facebook l’été dernier, cela donne une tout autre vision de ton aventure, plus profonde et plus réfléchie : très intéressant ! Et cela fait réfléchir sur ses propres envies (ou non envies) d’aventures. Merci pour ce livre en tout cas :-).
— Denis Gounelle
UNE LECTURE GLOUTONNE ENTRE LA DINDE ET LE FOIE GRAS !
Bonjour Laurent, J’ai trouvé un peu de place entre la dinde et le foie gras pour dévorer ton livre. Je me suis régalée. J’ai appris plein de choses. C’était drôle aussi parfois. Bref bravo pour ton travail instructif, utile, plaisant à lire. Le fait que ce ne soit pas un journal mais un travail synthétique ajoute à l’intérêt.
— Béa Caza
LE GUIDE DU ROUTARD DU SUNTRIPEUR
Hello Laurent. J’ai fini ton livre: il est excellent, une mine d’informations !! Le guide du routard du sun trip :-) Bravo et merci ! C’est un vrai cadeau que tu fais aux futurs sunriders.
— Jean-Marc Queau